TEMOIGNAGE : grâce à un test ADN, une Strasbourgeoise retrouve son père biologique

A l'âge de 24 ans, Morgan Spengler apprend que son père n'est pas son père. Plus de vingt ans après, la Strasbourgeoise retrouve ce père biologique qu'elle a tant cherché à connaître. Récit.

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C'est une histoire à peine croyable que nous raconte Morgan Spengler. A 46 ans, cette Strasbourgeoise mariée et mère de deux enfants, explique qu'elle vient de retrouver son père biologique. Elle qui, pendant plus de vingt ans, a espéré un jour mettre un visage sur le nom dont elle disposait.

Morgan Spengler a grandi à Strasbourg, avec sa famille. Sa mère, son père et sa soeur. "J'ai eu des pressentiments dès ma petite enfance. Il y avait beaucoup de sous-entendus de la part de plusieurs membres de la famille." Au fil du temps, elle a commencé à avoir "de gros doutes. Je sentais qu'il y avait quelque chose". Alors, à l'âge de 24 ans, elle a mis sa mère devant le fait accompli. En lui demandant la vérité. "C'est là qu'elle m'a dit que mon père n'était pas mon père". Une annonce finalement pas si surprenante pour la jeune femme. "C'est comme les pièces d'un puzzle, qui, mises bout à bout, ont fait sens. J'ai revu la tête de mes grands-parents quand je leur demandais pourquoi j'étais la seule à avoir les yeux bleus. Tout a fait sens !".

Retrouver ce père dont elle ne connaît rien

De cette révélation, Morgan a gardé un nom : Claude Ettel. Et une fonction, non sans lien avec sa propre passion : "La musique revenait régulièrement dans ma vie. J'avais beau laisser mon côté artistique, je finissais toujours par y revenir. Quand ma mère m'a appris que mon père biologique était pianiste, j'avais trouvé l'explication. Voilà pourquoi j'étais autant attirée par la musique !" Cette annonce a même été le déclencheur de la carrière de la jeune femme. "Je me suis sentie plus légitime et suis devenue chanteuse professionnelle", dit-elle, tout sourire. Pour autant, la relation avec l'homme qui l'a élevée n'a pas changé. "Mon père, je l'appelle toujours papa. Il restera toujours mon père".

Forte de ces informations, Morgan n'a plus qu'une idée en tête : retrouver ce père dont elle ne connaît rien. Avec l'aide d'un policier (le mari d'une collègue), elle mène des recherches pendant deux ans. Sans succès. Morgan se raisonne alors et poursuit sa vie.

Un test génétique révélateur

Pendant toutes ces années, Morgan n'a pu s'empêcher de se sentir attirée par tout ce qui concerne la généalogie. "J'adorais regarder les émissions où des personnes se sont retrouvées après des années, même si ça me faisait un pincement au coeur. Je me disais toujours que ce ne serait jamais mon cas. En plus, comme je savais que mon père était âgé, je me disais qu'il était peut-être déjà décédé".

Morgan a alors entretenu le maigre espoir d'un jour, peut-être, tomber par hasard sur des demi-frères ou demi-soeurs. "Quand je rencontrais des personnes dont je me sentais proche, instinctivement, je leur demandais quel était le nom de leur père. On ne sait jamais...", confie-t-elle. Une fois que certains tests ADN (illégaux en France à cette fin, voir le dernier paragraphe) sont devenus abordables, Morgan n'a plus hésité. "J'ai réalisé le test à Noël, en 2019". Plutôt par curiosité, pour connaître ses origines. "Le résultat est composé de pourcentages en fonction des pays", explique-t-elle.

C'est un soir de septembre 2020 que sa vie bascule. La veille d'un spectacle. "Je voulais me coucher tôt pour être en forme. Au moment d'éteindre mon ordinateur, j'ai vu un mail, reçu de l'entreprise qui a réalisé le test génétique. Je lis : "vous avez reçu un message de Jacques Ettel"".

Fébrile, Morgan clique. Et découvre l'individu avec qui elle partage 50% de son ADN. "Quand j'ai vu qu'au regard de ce résultat, le site estimait qu'il s'agissait de mon père..." Morgan, émue, rit et pleure en même temps. "C'était magique. J'ai réveillé mon mari. Il ne comprenait pas ce qui se passait vu mon état. J'étais en transe !". Finalement, Morgan n'aura dormi qu'une heure, cette nuit-là. 

Le lendemain, Jacques l'appelle. "Jacques, et non pas Claude !" s'amuse Morgan. "J'ai trouvé tellement improbable d'avoir au bout du fil quelqu'un que j'ai cherché toute ma vie que je n'arrivais plus à m'arrêter de rire. Il a dû me prendre pour une folle !", dit-elle, toujours en riant. Sa première question l'amuse : "qui est ta mère ? m'a-t-il demandé". Il se trouve qu'à l'époque, la mère de Morgan lui a annoncé qu'elle était enceinte, mais il ne l'avait pas cru. Et vu son jeune âge - 18 ans à ce moment-là - la famille de sa mère a préféré l'éloigner du trentenaire de l'époque.

La première question de Morgan paraît, quant à elle, encore plus surprenante. "Je lui ai demandé s'il était pianiste de jazz. Et en fait, pas du tout ! Le piano n'était qu'un loisir pour lui." Le hasard est d'autant plus grand que Jacques Ettel a réalisé le test génétique à l'initiative d'une amie, qui elle, s'est découvert un frère de cette manière. Une fois le premier contact établi, tous deux ont ressenti une sorte d'urgence à se voir. Alors quelques jours après, Morgan a rejoint son père biologique à Dôle (Jura).

"C'était tellement émouvant. Un homme avec les mêmes yeux que moi !". Jacques Ettel, lui, a commencé par s'excuser. "Il avait peur que je lui en veuille, mais ce n'était pas du tout le cas. L'important, c'est ce qu'on peut partager maintenant", assure Morgan. Depuis, ils s'appellent régulièrement et n'attendent qu'une chose : que le coronavirus fasse partie du passé, pour enfin passer plus de temps ensemble. 

"Le puzzle est entier"

Depuis cette rencontre, la vie de Morgan a changé dans le bon sens. "Le puzzle est entier à présent. Je ne pensais pas que ce serait si important pour moi. Jusqu'ici, je vivais très bien sans le connaître. Mais maintenant, je vis une sensation de plénitude. J'ai vécu un truc de dingue. Et ça me rend heureuse !"

Pour rappel, "en France, tout test génétique pour l'identification des liens familiaux ne peut être demandé que par un juge", explique François Eisinger, membre du comité d'éthique de l'INSERM. "Les tests génétiques peuvent se faire uniquement pour une finalité médicale ou scientifique, et avec l'accord de la personne, bien entendu", conclut-il.

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