"Il y a du vrai", "extra-drôle", "caricaturale" : la saison 3 de la web-série "Parlement" sort vendredi 29 septembre sur france.tv. Correspond-elle à la réalité du travail parlementaire ? On a interrogé des députés européens.
C'est l'histoire d'un pari fou : celui de combiner les mots "série comique" et "institutions européennes". Disponible sur france.tv, la série "Parlement" moque avec malice le fonctionnement de l'Union Européenne. Pour la saison 3, qui sort vendredi 29 septembre, les spectateurs retrouveront Samy, jeune assistant parlementaire de moins en moins perdu dans les coulisses de la machine européenne.
L'occasion pour nous d'interroger plusieurs eurodéputés : le Parlement européen est-il vraiment ce théâtre labyrinthique, où parlementaires et conseillers, tantôt paumés, tantôt ambitieux, recèlent de mille stratégies plus ou moins admirables pour arriver à leurs fins, le tout dans un joyeux bazar en 24 langues ?
"Ceux qui ont fait la série ont l'air de très bien connaître les coulisses du Parlement", estime Fabienne Keller, députée européenne (LREM) et ex-maire de Strasbourg. L'élue s'est régalée avec les deux premières saisons. Elle se réjouit de "cette manière rigolote de représenter la technocratie bruxelloise".
"Ça peut faire du bien à certains politiques"
L'eurodéputée écologiste Karima Delli salue aussi "une des premières séries politiques sur l'Europe, et qui, en plus, rend le Parlement européen populaire".
"C'est une série comique, et même un peu satirique : ça peut faire du bien à certains politiques d'être un peu caricaturés, de ne pas tout voir par le prisme de la conquête du pouvoir."
Karima Delli, députée européenne (EELV)
"Bien-sûr, c'est une comédie, mais il y a des parties très justes : par exemple ce montage avec une bille qui circule pour illustrer le cheminement d'un texte législatif", se souvient Fabienne Keller. "Il y a aussi le moment où les Allemands s'entendent pour les postes les plus importants, il y a du vrai, certains se reconnaitront peut-être...", lâche la députée.
Elle aime particulièrement le personnage "extra-drôle" de Michel, un député français effrayé par la bureaucratie européenne, qui préfère la cantine aux salles de réunion, et qui va se voir confier une importante responsabilité.
"Je trébuche, tous les papiers s'envolent, je suis en retard"
Faut-il pour autant prendre la série pour argent comptant ? "C'est un peu caricatural évidemment, mais c'est très drôle, estime Anne Sander, députée européenne. D'ailleurs, la série n'est pas tendre avec les parlementaires. "Je ne voudrais pas non plus que les spectateurs se disent qu'on arrive par hasard à la tête du Parlement européen", prévient l'élue LR originaire d'Alsace.
Du côté des petites mains du Parlement, on n'est pas si catégorique. "De nombreux députés sont super investis, mais pas tous", explique Benoit, stagiaire au Parlement jusqu'à mai dernier.
Benoit s'est particulièrement reconnu dans le personnage de Samy. Le jeune assistant est complètement perdu lors de son premier jour au Parlement. Au fur et à mesure qu'il apprend à maitriser les dossiers, il s'implique dans le jeu politique et prend sa part à l'effervescence ambiante.
Un rythme à 100 à l'heure qui rappelle une anecdote à Benoit : "Je me revois encore en costume, avec deux énormes paquets de papiers sous les bras et je trébuche et je m'étale de tous mon long, tous les papiers s'envole, je suis en retard de 15 minutes, catastrophique", plaisante l'ancien stagiaire.
Du compromis... et des blagues
Une des ficelles de l'humour qui teinte la série repose sur les clichés : Allemands, Néerlandais, Français, Espagnols... tous ceux qui travaillent au Parlement en prennent pour leur grade. Dans la vraie vie, ils n'hésitent pas non plus à s'échanger des boutades. "Tout le monde se fait des blagues, sur les Français, sur les Italiens etc. c'est un peu l'humour de Bruxelles", se souvient Benoit.
"Évidemment, au quotidien, on se charrie sur les clichés sur les différentes nationalités mais c'est toujours gentiment. On développe des relations très amicales entre députés européens".
Anne Sander, députée européenne LR
Au-delà des plaisanteries, la web-série "Parlement" illustre aussi la difficulté de légiférer à 27 avec des langues et des partis différents. "Il faut savoir reformuler, modifier, être original. Cette suractivité, c'est aussi notre quotidien", témoigne Christophe Clergeau, eurodéputé PS.
"Parfois, un sujet est particulièrement important pour un député ou un pays par rapport à une tradition nationale ou à une réalité locale, il faut prendre le temps de se parler, d'expliquer."
Christophe Clergeau, député européen PS
Et lorsque la série évoque les arrangements, les trahisons, les stratégies, Karima Delli reconnait volontiers que "cela fait partie du jeu politique européen : le compromis, le trilogue avec le Conseil et la Commission...". "On voit aussi les lobbys à l'œuvre, qui se déplacent dans le bâtiment librement", souligne l'élue.
De l'avis de tous les eurodéputés que nous avons interrogés, la série "Parlement" est une formidable occasion de populariser l'institution et son fonctionnement. "Ça permet aux gens d'entrer dans les murs, conclue Fabienne Keller. Ça les encourage à venir visiter le Parlement, qui est ouvert à tous, gratuitement et sans réservation."