Les habitants d'un quartier résidentiel vent debout contre la construction d'un immeuble collectif

Un ensemble de 16 logements intégrant une ancienne maison de maître est engagé sur la colline du Rebberg à Mulhouse (Haut-Rhin). Un projet supplémentaire, porté par un promoteur, qui exaspère les habitants de ce quartier historique préservé, tout à la fois riche et arboré.

Seize logements sur un terrain qui abrite actuellement une maison de maître, un jardin et quelques dépendances. Avec la disparition de quelques arbres centenaires. Voilà le nouveau projet qui agite le quartier du Rebberg à Mulhouse. Les riverains ne veulent pas de cette urbanisation collective synonyme pour eux de trafic routier supplémentaire et de destruction de leur cadre de vie.

Ce n’est pas le premier projet immobilier qui fait rugir au Rebberg. Les riverains ont même créé plusieurs associations pour défendre leurs intérêts, et ceux du quartier en général : patrimoine boisé et tranquillité. Il faut dire que le Rebberg, avec ses 4 000 habitants, est une colline sur laquelle il fait bon vivre à l'abri des regards. C’est le quartier historique des patrons de l’industrie textile, quartier le plus riche et le plus vert de la ville.

Avec la vente régulière de maisons de maîtres devenues vétustes et parfois abandonnées depuis longtemps, les projets immobiliers de petits collectifs se multiplient en intégrant plus ou moins les constructions historiques. Une manne pour les promoteurs au grand dam des habitants. Rue des Carrières où les véhicules ne peuvent se croiser sans que l’un fasse une pause en bord de talus, c’est un collectif de 16 logements qui agite actuellement le voisinage. La maison de maître sera rénovée et compartimentée. Les dépendances démolies au profit d'un petit immeuble neuf de 10 mètres de hauteur.

La zone végétale sera dévastée, le parc saccagé, et les voisins vont se retrouver avec des balcons en vis-à-vis à 4 mètres de chez eux

Un riverain du projet immobilier

"Une bâtisse de cette dimension, c'est complètement dingue !", fulmine Léon Palermiti qui vit juste en face du terrain visé par le projet immobilier. "Le bâtiment est disproportionné au regard de la surface disponible. La zone végétale sera dévastée, le parc saccagé, et les voisins vont se retrouver avec des balcons en vis-à-vis à 4 mètres de chez eux. Le promoteur cherche à optimiser la surface, à optimiser son projet d’un point de vue financier." Sauf que ce promoteur, qui a tout intérêt à entrer dans ses frais, respecte le plan local d’urbanisme et compte mener son projet à terme.

Les riverains, constitués en collectif, ont tenté un recours gracieux auprès de la mairie. Il n’a pas été retenu. La municipalité a maintenu le permis de construire "parce que juridiquement, nous n'avions aucun moyen de nous y opposer", précise l'adjoint à l'urbanisme, Jean-Philippe Bouillé. "C'est un particulier qui vend un terrain à un promoteur, ce n'est pas la ville qui est derrière ce projet."

Le collectif espère à présent que la justice lui donnera raison : un recours a été déposé auprès du tribunal administratif. "L’idée, c'est que le projet ne se fasse pas, ou du moins qu’il ne se fasse pas dans les dimensions actuelles. Il y a une réelle colère des riverains de ce quartier dans la mesure où les projets de promoteurs se multiplient à un rythme effréné", explique à notre micro Philippe Guiot, habitant du Rebberg et opposant au projet.

Si une pétition a été mise ligne [1425 signatures à ce jour] pour ces constructions en particulier, le quartier du Rebberg se mobilise plus largement ces dernières années. Avec l’espoir d’un classement de la colline en SPR, "site patrimonial remarquable". Option suggérée dans un plaidoyer pour le Rebberg par le chercheur Pierre Fluck et son ouvrage La colline aux cent tourelles (éditions Mediapop). Option qui n'est pas rejetée en bloc par la municipalité mais Jean-Philippe Bouillé s'interroge sur la motivation des habitants du Rebberg. "Si leur objectif est d'interdire la construction de logements collectifs dans le Rebberg, alors le classement SPR n'est pas la solution", explique l'adjoint à l'urbanisme. "Le patrimoine est déjà protégé avec 300 maisons dites 'remarquables' pour les lesquelles des restrictions sont imposées en matière de travaux, de matériaux, etc. La question est de définir un but pour le quartier et de choisir ensuite le bon outil pour y parvenir."

Une réunion publique d’information s’est ainsi tenue en présence de 120 personnes le 12 janvier dernier pour réfléchir à des modalités de concertation avec les habitants. Deux heures trente de discussions parfois tendues. Le président de l’association Rebberg magazine y a vu au moins une avancée : la promesse faite par la maire de Mulhouse d’activer la Commission d'esthétique "prévue par le droit local et qui jusqu’à présent n’existe que sur le papier", précise Renaud Roche.

Une révision du PLU à venir

"Cette commission consultative concernerait aussi d’autres quartiers de Mulhouse et obligerait la ville à communiquer davantage sur les projets immobiliers." Et surtout en amont. Ce que les riverains attendent avec impatience pour mieux fourbir leurs armes. Pour autant, la ville rappelle qu'elle n'a pas les moyens juridiques de contraindre les promoteurs à présenter leurs projets aux riverains. Et que cette Commission d'esthétique ne remplira qu'un rôle consultatif.

Le débat n'est pas clos au Rebberg. Ni les solutions trouvées pour calmer le mécontentement. Le salut viendra peut-être de la révision du PLU (plan local d'urbanisme) qui entrera en vigueur en 2026 ou 2027. Il devra non seulement s'écrire à l'échelon de l'agglomération pour se mettre en conformité avec l'évolution de la loi, mais encore intégrer le "zéro artificialisation nette". "On doit s'adapter pour transcrire cette loi", précise l'adjoint à l'urbanisme. Ce sera peut-être l'occasion de mieux contrôler l'urbanisation sur la colline du Rebberg.

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