Mulhouse: le chien battu et noyé par son propriétaire aura droit à un vrai procès

Pour avoir battu et noyé son chien le 18 juillet 2018, un Mulhousien s'est retrouvé ce vendredi 5 avril devant la justice. Le procureur demandait une peine de travail d'intérêt général. Trop clément pour les associations de défense de la cause animale qui ont obtenu la tenue d'un procès.

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Le 18 juillet 2018 en fin de journée, des riverains avaient vu un individu jeter un chien croisé Labrador, prénommé Sam, âgé de 2 ans, dans un cours d'eau, à proximité du cinéma Kinepolis à Mulhouse. Les pompiers étaient arrivés sur les lieux pour sortir le corps sans vie de l'animal. Dès son interpellation, le 27 juillet 2018, le propriétaire avait reconnu avoir noyé son chien après l'avoir frappé. Il devait être jugé ce vendredi.

Ci-dessous, la video de l'hommage rendu à Sam, le 1er septembre 2018, par plus de 150 personnes.

Dans la salle d’audience, trois femmes s’affairent autour d’un écran, une imprimante et une pile de papiers format A4: sur leur estrade, derrière leur bureau, la juge et les deux greffières préparent le dossier du prochain prévenu. A l’agrafeuse succèdent les coups de tampon sur les feuilles qui s’accumulent. Le dossier que la juge compulse, a l’air assez épais. Les avocats attendent, parlent entre eux, le temps passe, le ton monte dans la salle. "Est-ce qu’on peut avoir un peu de silence?" lance la juge qui demande à faire rentrer le prévenu. Celui-ci s’avance vers le juge et s’installe devant le pupitre, face à elle après un temps d’hésitation. Les bras croisés, impassible, il se balance sur ses jambes et écoute.

"Bonjour monsieur, vous êtes Y. A., vous êtes né le 13 mars à 1984 à Mulhouse. Il vous est reproché le 18 juillet 2018 d’actes de cruauté envers le chien dont vous êtes propriétaire, actes réprimés par le code pénal", commence par dire la juge.
 

La procédure du plaider-coupable

Avant de passer en salle d'audience, le procureur s'est entretenu avec le prévenu qui a reconnu les faits, en présence de son avocat. S'en suit une proposition, en l'occurence, dans le cas présent, une peine de 100 heures de travaux d’intérêt général dans les 12 mois, ainsi que 5 ans d’interdiction de détenir un animal avec exécution provisoire. Pour les parties civiles, quatre associations de défense de la cause animale, la peine est trop clémente.

Maître Tabak, pour la SPA de Mulhouse plaide pour que cette peine ne soit pas homologuée par la juge: "Monsieur reconnait parfaitement les faits, avant la noyade il y a eu des coups de pied donnés au chien. Ensuite, il l’a noyé. Ce sont là des actes de cruauté totalement inadmissibles. Je considère qu’une peine de travail d'intérêt général (tig) n’est pas adaptée aux actes qui restent très graves. Je pose la question: qu’est-ce qui peut se passer dans la tête d’un tel individu pour commettre de tels actes, et je me dis que c’est une personnalité extrêmement inquiétante."
 

"La cause animale est-elle encore une cause secondaire?"

L’autopsie, effectuée par le médecin-vétérinaire, a révélé la lente agonie du chien, meurtri à l’abdomen par un objet contondant, avant d’être noyé. L’avocat plaidant pour la Fondation Brigitte Bardot s’interroge, lui, sur le sens qui peut être donnée à cette proposition de peine et surtout sur la procédure du plaider-coupable: "Est-ce que la cause animale est encore une cause secondaire, accessoire, qui ne mérite pas l’attention de notre juridiction ? Quel est le message que vous allez lancer en homologuant le travail d'intérêt général?" Ce serait un blanc-seing donné à M.Y. si la procédure pénale s’en tenait là, selon lui.

Vient le tour de l’avocat de l’association Stéphane Lamart qui plaide lui aussi pour une non-homologation de la proposition du procureur: "Pour des faits similaires, y compris lorsque l’animal a survécu à des actes de cruauté, les juridictions répressives se montrent intraitables en la matière. Ce sont des peines de prisons avec sursis assorti d’une interdiction définitive de détenir un animal."  L’avocat propose donc un marché à la juge: si M. Y. accepte que cette peine soit définitive, il demandera l’homologation de cette peine, sinon, dit-il "je demande de ne pas homologuer."

Homologation ou renvoi devant le tribunal correctionnel? Après un suspense de quelques minutes, la décision tombe: le dossier est renvoyé devant le tribunal correctionnel le 25 octobre 2019 à 8h30, devant un juge unique. Le prévenu encourt 2 ans de prison et 30.000 euros d'amende. Il y aura donc bien un procès. Justice, toute la justice, sera rendue à Sam, le chien martyr.
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