Le trafiquant de drogue alsacien Sofiane Hambli, mis en examen en novembre dans une affaire de stupéfiants, est une fois de plus en cavale, a indiqué mercredi 26 mai le parquet de Bobigny. Retour sur le parcours de ce baron de la drogue devenu indic.
La justice soupçonne l'Alsacien Sofiane Hambli d'avoir perçu 2,5 millions d'euros pour organiser la logistique de l'importation de quatre tonnes de cannabis, des accusations qu'il dément d'après son avocat Hugues Vigier. Arrêté en novembre 2020 à Bordeaux, M. Hambli, 45 ans, avait été placé en détention provisoire début décembre dans cette procédure, un placement cassé mi-mars par la Cour de cassation, a précisé Me Vigier, mercredi 26 mai.
Il a alors été libéré sous contrôle judiciaire, ce qu'a contesté le parquet de Bobigny au vu du risque de fuite. Quelques jours plus tard, le 22 mars, "la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris a décerné un mandat de dépôt à son encontre" afin qu'il soit de nouveau incarcéré, a déclaré le parquet de Bobigny. Ne s'étant pas présenté aux autorités et n'ayant été retrouvé par les services de police, "il est effectivement en fuite", a ajouté cette source.
"La Chimère" à nouveau en cavale
À la demande des autorités françaises, Interpol a émis une notice rouge à l'encontre de l'homme de 45 ans surnommé "La Chimère", au casier judiciaire chargé de lourdes condamnations pour trafic de cannabis. "Je pense qu'il s'est dit +ils ont tout organisé pour que je sois coincé, ils vont me remettre en détention, ils veulent absolument ma peau+. Du coup il a décidé sans doute de partir", a dit à son avocat Hugues Vigier, qui a indiqué ne pas savoir où se trouvait son client.
Sofiane Hambli est le personnage-clé d'une enquête sur les pratiques de l'ex-patron de la lutte antidrogue François Thierry, qui avait conduit au remplacement de l'Ocrtis par l'Ofast (Office anti-stupéfiants) en 2019. Pendant six ans, François Thierry s'est s'appuyé sur les réseaux de Sofiane Hambli pour effectuer des livraisons surveillées.
Premiers deals à Bourztwiller
Mais sa « carrière » débute bien avant, à Bourtzwiller, dans ce quartier de Mulhouse où il a grandi. Lorsque en 1997, la brigade de recherche de la gendarmerie s'intéresse au réseau qui inonde l'Alsace de hashich, elle identifie Sofiane Hambli à un poste clé. Quand le réseau tombe, Hambli est déjà loin de Mulhouse, l'enfant de Bourtzwiller a trouvé refuge dans le sud de l'Espagne, la porte d'entrée de la drogue en Europe.
Hambli devient l'un des plus gros importateurs de haschich d'Europe et réinvestit sa fortune dans l'immobilier. Mais en 2009, il tombe lors d'un coup de filet antidrogue de la police espagnole. Incarcéré à Madrid, sous la menace d'une extradition et d'une condamnation à 18 ans de prison, Sofiane Hambli reçoit la visite qui va changer son destin. François Thierry est le prochain patron de l'Octris, l'office de lutte contre les stupéfiants. Et en échange d'une importante réduction de peine il propose a Hambli de devenir son principal informateur...
De baron de la drogue à indic
Pendant six ans, François Thierry va s'appuyer sur les réseaux de Sofiane Hambli pour effectuer des livraisons surveillées. Ces bons et loyaux services lui valent de voir sa peine réduite de 18 à 5 ans de prison. Mais à peine sorti, le baron de l'or vert retrouve un train de vie qui interpelle : appartement de 300m2 avec piscine au coeur du 16e arrondissement de Paris.
Hambli a-t-il repris son trafic, dans le dos, ou avec l'accord tacite de François Thierry ? Cette ambiguité est révélée au grand jour par les douanes, qui saisissent en 2015, trois camionnettes remplies de 7 tonnes de haschich au pied de son appartement. Une saisie sur fond de guerre des services qui provoque la chute du patron de l'Octris. Sofiane Hambli, soudain sans protection, prend à nouveau la tangente, avant d'être rattrapé quelques mois plus tard en Belgique.
Depuis, de remise en liberté en violation de son contrôle judiciaire, il enchaîne les séjours en prison. Mais ses voyages en Espagne, ou son implication dans une nouvelle affaire de stupefiants laissent penser que l'histoire du Scarface de Mulhouse continue de s'écrire.