Ce sont les seuls sapins qui ne perdent pas leurs épines qu’elles soient naturelles ou artificielles. Des sapins en bois de palettes de différentes tailles en matière recyclée et durable sont fabriqués en Haute-Marne depuis plusieurs mois, par des travailleurs handicapés.
En plein cœur de Chaumont, en Haute-Marne à la jonction de la rue Pasteur et de la rue Victor Mariotte, une nouvelle boutique éphémère vient d’ouvrir ses portes. Tenue par des travailleurs handicapés de deux ESAT du département, ceux de Froncles et de Breuvannes-en-Bassigny, elle commercialise des décorations de Noël et des sapins en bois recyclés.
"L’idée est venue d’un groupe de parole il y a plus d’un an et demi. Je ne voulais plus voir les usagers ne rien faire entre les commandes clients, je leur ai donc proposé de réfléchir à un projet. Ce sont eux qui ont eu l’idée d’utiliser les chutes de bois et nos déchets pour les recycler. Ils ont commencé par créer des hôtels à insectes, puis des nichoirs à oiseaux, nous vendions ces produits pendant nos portes ouvertes et on s’est rendu compte qu’ils avaient beaucoup de succès. Par exemple sur un week-end en novembre, nous avons réussi à récolter 1700 € seulement avec des petits objets. Alors nous nous sommes lancés le pari d’ouvrir une boutique éphémère pour les fêtes de fin d’année et avons commencé la production de produits en rapport avec la période !" Explique Patricia Ssanguem, directrice adjointe de l’est de Froncles.
En atelier, concentrée sur un petit sapin fait de billes en bois, Françoise, sourit en travaillant. Habituellement, la femme de 45 ans travaille à la vérification de la qualité de pièces automobiles. Ce changement d’activité provisoire lui plaît beaucoup : "Ce n'est pas difficile et j’aime travailler sur les décorations de Noël, j’aime tellement la période des fêtes !"
Sapins en palettes ou billes de bois, bougeoirs, suspensions à mettre dans le sapin, etc. Tous ces produits ont été réalisés à partir des idées des usagers de l’ESAT. "C’est très gratifiant pour eux d’habitude, ils travaillent avec cahiers des charges fournis par nos clients. Là, ils ont eu des idées, leurs accompagnateurs les ont aidés à créer les moules et les modèles à suivre, mais ce sont leurs créations. Ils en sont très fiers." Rajoute Patricia Ssanguem.
Je trouve que le statut de travailleur handicapé est mal reconnu en France.
Caroline, usagère de l'ESAT de reuvannes-en-Bassigny
Une grande fierté, c’est effectivement ce que ressent Caroline, qui sert les clients en boutique : "Je trouve que le statut de travailleur handicapé est mal reconnu en France. Nous sommes comme tout le monde, nous commençons à travailler à 8 h 45, nous finissons à 16 h 45, nous faisons des journées de travail comme des personnes ordinaires. J’espère qu’ouvrir une boutique comme celle-là en plein cœur de Chaumont permettra aux gens de se rendre compte que nous valons quelque chose. Nous n’avons pas les mêmes possibilités que les autres auprès des employeurs, peut-être que s’ils voient notre savoir-faire, ils en prendront conscience."
C’est la première fois que les ESAT de Froncles et de Breuvannes-en-Bassigny font des démonstrations de leur travail en dehors de leurs murs et l’accueil que leur ont réservé les clients n’est pas pour leur déplaire. "J’ai été attirée par les décorations en bois à l’extérieur et dans la vitrine que je trouvais vraiment très chouettes ! D’habitude, cette boutique est inoccupée, je suis donc rentrée pour voir et je vais acheter quelques cadeaux ici, et même des choses pour moi. Je ne savais pas que cet endroit était tenu par des personnes handicapées du département, je suis d’autant plus déterminée à acheter ici plutôt qu’en grande surface. SI ça peut aider des gens qui en ont besoin, et même la ville de Chaumont à ouvrir ce type de boutique, pourquoi aller ailleurs ?" Confie Margaux, une cliente. En trois jours juste après son ouverture, le magasin récoltait déjà 1300 €. "On s’aperçoit que le fait que les produits soient écoresponsables et produits en Haute-Marne intéressent vraiment les clients" confirme Patricia Ssanguem.
Un an et demi de travail en amont
Il aura fallu plus d’un an et demi, ainsi que l’appui de la chambre de commerce et de l’industrie, de la ville de Chaumont et de certains étudiants en commerce de la ville pour que ce projet de boutique éphémère se mette en place. Car une fois la fabrication faite, il a fallu déterminer, les prix auxquels vendre les produits, savoir comment les placer en magasin, comment faire fonctionner une boutique et louer les locaux. Autant de nouvelles compétences que les travailleurs handicapés des ESAT ont été ravis d’apprendre.Dépassés par leur succès, les usagers de l’ESAT ont dû produire certains produits à nouveau, car le stock n’était pas conséquent. Il était difficile de prévoir le succès qu’allaient réserver les Chaumontais à cette initiative. La boutique ne désemplit pas, elle fermera ses portes le 19 décembre.