Le château de Dinteville, situé dans les environs de Chaumont (Haute-Marne), a accueilli le samedi 1er avril deux invités très particuliers. À savoir Étienne de Poncins, ambassadeur de France en Ukraine, et Vadym Omelchenko, son homologue ukrainien.
L'actualité comme la date peuvent surprendre. Mais pourtant, c'était loin d'être un poisson d'avril. Une réunion diplomatique au sommet a eu lieu dans un château de la Haute-Marne.
C'est à Dinteville qu'il fallait se rendre, le samedi 1er avril 2023. Dans un petit château du XVIe siècle situé à quelques encablures de Chaumont. Deux ambassadeurs y avaient rendez-vous, sur fond de guerre de la Russie contre l'Ukraine.
Deux diplomates qui comptent beaucoup en ce moment. Du côté de la France (et de la Haute-Marne, où il vit), l'ambassadeur Étienne de Poncins, représentant la France en Ukraine. Et du côté ukrainien, Vadym Omelchenko, qui représente son président Volodymyr Zelensky auprès de la capitale française.
Une rencontre très symbolique
Mais pourquoi donc ces deux personnalités se sont-elles retrouvées à Dinteville, et pas à Kyiv ou Paris, leurs lieux respectifs de représentation, pour venir planter un saule pleureur ? "C'est un symbole de l'histoire commune entre l'Ukraine et la France", commente l'ambassadeur ukrainien auprès de Charlotte Meunier, journaliste à France 3 Champagne-Ardenne. "C'est un arbre qui pleure, et maintenant, c'est l'Ukraine qui pleure." Plus pour longtemps, espère-t-il.
"Il y a quelques semaines", explique à son tour Étienne de Poncins (qui vit pas très loin de Dinteville), "je suis allé dans une petite ville au fin-fond de l'Ukraine, qui s'appelle Batouryn. C'est là qu'est né Grégoire Orlyk. Il y a là un petit musée, très bien organisé. On y voit une photo du château de Dinteville." (voir sa localisation sur la carte ci-dessous)
Le lieu a donc été choisi pour son symbole. Orlyk était un diplomate (encore un) originaire d'Ukraine et qui s'était mis au service du roi Louis XV. Ses compétences en matière militaire et d'espionnage en ont fait un précieux atout, et il a été richement récompensé : titres honorifiques, grade de maréchal de camp, et même anneau orné d'un diamant remis par l'illustre monarque lui-même.
Iryna Dmytrychyn, maîtresse de conférences à l'Institut national des langues et des civilisations orientales (Inalco) a écrit un livre sur ce dernier. Elle s'est plongée dans les nombreuses archives détenues au château où a vécu l'Ukrainien. Et éclaire le présent en racontant le passé. "C'est absolument fascinant de voir qu'au XVIIIe siècle, l'Ukraine était beaucoup plus présente dans les esprits européens que par la suite."
"Orlyk proclamait que la liberté d'une nation européenne est importante pour elle-même, mais aussi pour ses voisins. Qu'il est important de défendre le droit et la justice." Des valeurs aujourd'hui cardinales. Et menacées au même titre que la nation ukrainienne elle-même.
Cet homme se faisait le porte-parole de l'entraide franco-ukrainienne. Comme quoi l'histoire est un perpétuel recommencement... "Les longs souvenirs font les grands peuples. Et la mémoire du passé ne devient importune que lorsque la conscience du présent est honteuse", énonçait l'historien Charles de Montalembert.