A Zillisheim, une association vient d'être créée pour protéger le site du Grand canon, construit par les Allemands pendant la Première Guerre mondiale. L'objectif est d'entretenir le site mais aussi de le faire découvrir aux visiteurs locaux comme aux passionnés d'histoire venus de plus loin.
"Entrez dans la galerie, je vous en prie !". Joseph Goester indique la marche à suivre. Il vient de créer l'assocation de préservation et de valorisation du site du Grand canon. Derrière lui, une petite dizaine de personnes le suivent, à l'étroit entre des murs serrés, pas éclairés. Joseph Goester utilise sa lampe torche pour fournir des explications à ses visiteurs du jour. "Vous voyez ces crochets ? Je pensais pendant longtemps qu'ils étaient utilisés pour relier des câbles, mais j'ai appris qu'en réalité, ils servaient à attacher un hamac", explique-t-il.Les visiteurs sont conquis. Beaucoup d'entre eux connaissaient le site de l'extérieur, c'est-à-dire la grande fosse dans laquelle se trouvait le canon, mais personne n'a jamais eu l'occasion de découvrir l'intérieur des galeries. Des voies ferrées, des chambres à munitions... qui font réagir. "Je ne pensais pas que les galeries étaient aussi bien conservées, je trouve ça vraiment fascinant", témoigne Mathilde Meyer. "Je m'étais fait une idée à partir de ce que j'ai vu dans des bouquins, mais la réalité est quand même différente !" estime Christiane Mougeot, l'air amusé.
Et les surprises ne s'arrêtent pas aux seules galeries. Joseph Goester explique l'histoire du site, qui paraît à peine croyable. Les Allemands ont construit l'intégralité du site dans le plus grand secret, du 8 septembre au 10 novembre 1915. Le canon érigé était un Langer Max, un canon de marine qui peut atteindre sa cible jusqu'à 40 km. Depuis Zillisheim, le canon tirait sur Belfort et Wesserling. "Belfort était un lieu stratégique. Il y avait la gare centrale, la société alsacienne de constructions mécaniques qui produisait des obus et des munitions, une garnison française... tous ces éléments étaient des objectifs pour les Allemands", explique Joseph Goester.
Au total, le canon a tiré 44 obus, faisant 14 victimes. Environ 1000 personnes travaillaient sur le site. Des soldats, mais aussi des prisonniers de guerre, car l'infrastructure demandait du personnel : les obus faisaient deux mètres de haut et pesaient 750 kg. Le Langer Max a tiré du 8 février au 10 octobre 1916. Il a été laissé à l'abandon jusqu'en 1974, lorsque plusieurs bénévoles se sont réunis pour nettoyer le site. Depuis, l'entretien s'est fait de manière très irrégulière. C'est pourquoi une association vient d'être créée.
A présent, 25 bénévoles prennent soin du site. "Nous venons tous les samedis après-midi pour nettoyer, débroussailler, broyer... et 3 à 4 fois par an, nous pompons l'eau qui se trouve dans la fosse, sinon elle monte trop haut", explique Jean-Paul Mullerseck, bénévole au sein de l'association. L'association espère recruter des personnes motivées à prendre soin du site mais aussi dans une perspective de préservation de la mémoire.