Le village de Kruth se prépare à l'été

Au bout de la vallée de St Amarin, Kruth, avant-dernier village d'Alsace avant le département des Vosges, bénéficie d'un cadre enchanteur. Depuis le déconfinement, les visiteurs sont encore rares, mais les acteurs du tourisme gardent l'espoir d'un bel été.
 

Kruth est un village pas comme les autres. La plupart de ses 955 habitants vit en fond de vallée, mais certains chalets et fermes auberges avoisinent les 1.000 mètres d'altitude. Entourée de montagnes, la commune s'étend sur plus de 2.000 hectares, dont plus de la moitié en forêts. Pour le maire fraîchement élu, Florent Arnold, Kruth est sans conteste le plus beau village d'Alsace… et du monde : "Chez nous on est en pleine nature, précise-t-il. On se trouve dans le parc régional des Ballons des Vosges et on travaille avec Natura 2000." Et à vol d'oiseau, Kruth est à moins d'un kilomètre de la réserve naturelle du Grand Ventron.

Un lac de plaisance, encore trop calme

L'atout supplémentaire de Kruth, c'est son lac. Un lac de barrage, créé à l'origine "pour réguler le débit de la Thur, qui alimentait les fabriques de textile de la vallée, car il y avait une usine textile dans chaque village", explique le maire. Aujourd'hui, cette retenue d'eau, la plus grande du versant alsacien du massif des Vosges, bénéficie principalement au tourisme. Le grand barrage est actuellement en travaux, mais une digue retient l'eau de la partie supérieure, dédiée aux activités de loisirs, baignade, pédalos, paddle et canoé.

A Kruth vivent les "Kritter" (herbes sauvages), nom des habitants de Kruth.

Florent Arnold, maire

D'ordinaire, à cette époque, on voit de nombreux promeneurs et  VTTistes sur les berges, des embarcations sur l'eau et des amateurs de sensations fortes accrochés à la tyrolienne ou crapahutant dans les arbres du parc accrobranches voisin. Mais cette année, en semaine, le lac reste encore inhabituellement paisible. Il s'anime seulement les week-ends, grâce aux habitués.  Car depuis le déconfinement et le temps de latence avant la réouverture des frontières, les touristes habituels – principalement originaires de "plats pays", comme les Belges et les Hollandais – mettent du temps à revenir. 

Un démarrage très en douceur pour les hôtels et les restaurants

L'Auberge du lac, à cent mètres de la rive, a rouvert début juin, et les week-ends, il y a foule. "Le dimanche c'est plein, les gens doivent réserver, parce qu'on a moins de place en salle puisqu'il a fallu sortir des tables" raconte Marie-Hélène Grunenwald, la restauratrice. Mais pour l'instant, ce sont surtout des habitués, "des collègues, des familles, beaucoup de 'Kritter', des gens de la Bresse, du Ventron…" et en semaine, la fréquentation reste très aléatoire.

Marie-Hélène et son mari Thierry (qui est en cuisine) proposent aussi cinq chambres d'hôtes. Les premiers clients à revenir étaient des Bas-Rhinois, et il a fallu attendre mi-juin pour les réservations de juillet. Mais le couple espère malgré tout pouvoir travailler correctement cet été. Et, ils l'avouent, durant cette période étrange du déconfinement, ils ont pu faire ensemble des virées à vélo, ce qu'ils n'avaient jamais pris le temps de faire en 37 ans de mariage.    

Tout le monde a envie de manger à nouveau autre chose que des boîtes et des pâtes.

Frédéric Mentzinger, restaurateur

Quelques kilomètres plus loin, Christelle et Frédéric Mentzinger, propriétaires de l'hôtel des 4 saisons, vivent une expérience semblable. Lorsqu'ils ont rouvert leur restaurant le 11 juin (ici c'est Christelle qui est aux fourneaux, et Frédéric en salle), ils ont fait le plein dès le premier week-end. Des habitués heureux de pouvoir enfin revenir : "Tout le monde a envie de ne plus manger de boîtes ni de pâtes – c'est l'expression qui revient souvient" sourit Frédéric Mentzinger. "Mais pour l'hôtellerie, c'est plus compliqué pour le moment. On a des réservations qui commencent doucettement."

Le couple, qui a mis à profit le temps du confinement pour faire tous les travaux en attente : rangements de fond, rénovation des chambres, peinture…,  se sent "prêt à repartir, et vite." Mais il craint les soucis financiers "pour plus tard". D'ordinaire, "la belle saison nous aide à tenir l'hiver suivant, vu qu'il y a de moins en moins de neige", explique Frédéric Mentzinger. Or, habituellement en juin, le taux d'occupation de leurs cinq chambres est de l'ordre de 70%. Cette année, il n'était que de 20%.  

Le chalet refuge du Frenz rouvert dès le 1er juillet

A 925 mètres d'altitude, au lieu-dit le Frenz, le chalet refuge du ski club est resté fermé tout le mois de juin. Cette ancienne ferme avait été rachetée par le ski club à la fin des années 1950. "Il y avait de grandes pistes de ski (fermées depuis 1995). Il y avait toujours beaucoup d'activités, d'où l'aménagement de ce refuge" explique Jean-Louis Barthel, l'ancien président de l'association.

Aujourd'hui il ne reste qu'une petite piste pour débutants, en contrebas, mais durant l'hiver, l'association organise des samedis de neige, et le chalet offre 37 lits pour héberger des promeneurs en ski de fond ou en raquettes.

Quand il a enfin neigé en mars, le ski a été interdit et le refuge a dû être fermé.

Jean-Louis Barthel, ancien président du ski club

"Tout s'est arrêté, raconte Jean-Louis Barthel. "Au début de l'hiver, il n'y avait pas de neige, et quand il a neigé en mars, le ski a été interdit et le refuge a dû être fermé." Annulées, aussi, les diverses fêtes et manifestations qui renflouent les caisses de l'association. Cet été, l'hébergement de randonneurs et de motards est à nouveau possible, les week-ends ou sur réservation, mais il faudra apporter ses propres draps. Et Jean-Louis se réjouit déjà pour le petit marché de Noël, prévu sur le site les 28 et 29 novembre prochains. En espérant qu'aucune seconde vague de l'épidémie ne viendra entraver ce projet.

Les habitués de la ferme-auberge préfèrent les repas marcaires en drive

Sur le sommet d'en face, les repas marcaires proposés en drive par la ferme-auberge du Schafert depuis début mai ont rencontré un gros succès, toujours pas démenti. Entretemps, l'auberge a rouvert du mercredi au dimanche, mais bon nombre d'habitués hésitent à revenir manger sur place : "Les gens craignent de devoir s'asseoir trop près des autres" regrette Serge Sifferlin, le fermier aubergiste. Alors qu'ici comme dans chaque restaurant, gestes barrières et distance de sécurité sont respectés, et qu'eux aussi ont dû sortir des tables. "Ce sera un été bizarre, spécial, prévoit-il. Mais on espère malgré tout pouvoir travailler correctement, même si c'est seulement à 50 ou 60% d'une saison normale."

Ce sera un été bizarre, spécial.

Serge Sifferlin, fermier aubergiste

Serge Sifferlen, qui est également le président de l'association des fermes-auberges du Haut-Rhin, veut y croire. D'autant plus que la baisse du tourisme international ne l'inquiète pas trop, puisque la clientèle habituelle est principalement constitué de "locaux" (venus d'Alsace, du Doubs et de Lorraine). Et en calculant bien, le nombre de clients potentiels, qui auront peut-être envie de redécouvrir les sommets vosgiens au lieu de partir en vacances à l'étranger, est assez conséquent. "Cinq à six millions de personnes vivent à deux heures de trajet d'ici" explique-t-il. Avec eux tous, on peut malgré tout envisager un bel été (…) C'est si beau, ici, et le massif vosgien a tant de choses à offrir."   

 

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