Complètement à l’Est vous emmène à la frontière avec nos voisins européens. Première étape, à Schengen, le village Luxembourgeois des accords de libre circulation, signés en 1985. Quels sont les particularités de cette situation géographique ? Rencontre avec des habitants. 

Fernando s’en souvient comme si c’était hier, ou presque. Cet habitant de Schengen (Luxembourg) a 61 ans aujourd’hui. Il vit sur place depuis 1974, à la frontière entre la France, l'Allemagne, la Belgique et le Luxembourg. Il était présent en 1985, lorsque les fameux accords de Schengen ont été signés officiellement. Il a même servi du crémant de Moselle aux hommes politiques à l'époque ! « Je travaillais comme beaucoup ici, dans les vignes, et mon patron avait été choisi pour servir le vin. Pour moi c’était un plaisir d’être là. J’étais jeune et un peu stressé, avec toutes ces grosses voitures et les gardes du corps ».

34 ans plus tard, ce Portugais d’origine reconnaît que le village de 500 habitants a gagné en notoriété. Mais il n’a pas vu de gros changements sur la vie quotidienne suite aux accords. Il a tout de même noté que la disparition des douanes a facilité la circulation. 

Un concentré d’Europe incarné par cette zone située au coeur géographique d'une partie historique de l’Union européenne. Ce qui donne lieu à des approches particulières de ses voisins. D’autant que la barrière de la langue n’est ici pas un problème. A Schengen on parle français et luxembourgeois, mais aussi allemand et francique, une langue héritée de l’Histoire. "C’est un village où l’on s’intègre facilement, ajoute Fernando. Je me sens européen, et Portugais. Ici on se connaît tous". 
 


 

"C'est un peu une grande famille"


Gérard, 78 ans, est français, il habite tout près de Schengen, à Contz-les-bains. Il a travaillé 33 ans au Luxembourg dans la sidérurgie à Belval aux Terres Rouges. Il se rend régulièrement dans ce village du Luxembourg, car les cafés de son secteur ont tous fermé. « Les accords de Schengen ont fait venir les touristes, et ça facilite les échanges. Avec les copains des autres pays, on se taquine au bistrot, avoue-t-il.

On parle de nos pays respectifs, des caractères de chacun, pas forcément de l’idée européenne. Mais c’est un peu comme une grande famille.


Plus qu’européen, il se sent davantage international. On a l’habitude de rire avec tout le monde"

Sur la question des avantages de chaque pays voisin, il a son idée. « En France on est moins bien payé, les assurances sont moins intéressantes pour les vignerons. Au Luxembourg d’une manière générale, on est plus protégé ». D’ailleurs ses trois enfants y travaillent. Et ils sont trilingues. 
 

"Ici, on vit à la carte", ajoute Francis, un autre français qui habite le secteur. Cet ancien cadre connaît tous les avantages des pays voisins. Il a ses petites habitudes.

Pour les courses, je vais en Allemagne, c’est 30% moins cher, pour les cigarettes et l’essence, je vais au Luxembourg. Et en France ? Je paye mes impôts, lâche-t-il dans un sourire amusé. 


Plus sérieusement, il conserve la nationalité française car ce sont ses racines. "C’est notre pays, notre culture, et puis en Allemagne non plus tout n’est pas rose. Certains sont payés 2 ou 3 euros de l’heure", reconnaît le retraité aujourd’hui âgé de 65 ans. "Mais c’est humain de se plaindre…"

"Mieux vaut parler trois langues"

Le long de la Moselle, le soleil commence à percer le brouillard épais de ce matin de février. On distingue le musée de l’Europe en contrebas. Il attire chaque année 40 000 visiteurs. Des Chinois, en nombre. Parfois étonnés par la simplicité de cette petite commune rurale dont le nom est si connu en Europe. 
 


En remontant la rue principale, Raphaelo nous accueille dans son salon de coiffure tout neuf. Il a choisi de s’installer ici parce que c’est bien situé. "On est à deux heures de partout. Mais tout est plus cher, (même ses tarifs). Car les salaires sont plus élevés qu’en France". Le salaire minimum est à 2000 euros au Luxembourg. « On vient à Schengen pour une certaine qualité de vie, reconnaît ce jeune homme de 27 ans. C’est calme, paisible et tranquille. On se sent en vacances. Mais pour travailler à Schengen, mieux vaut parler les trois langues, français, luxembourgeois et allemand". Le coiffeur de 27 ans regrette que certains Français ne fassent pas plus d'efforts sur l'apprentissage du Luxembourgeois. "C'est dommage car ça faciliterait l'intégration", dit-il entre deux coups de ciseaux. 

Aujourd'hui il réfléchit à aller habiter en Allemagne, où la vie est moins chère qu’au Luxembourg. Selon lui, les Allemands habitent de plus en plus loin de la frontière luxembourgeoise. Repoussés par les Luxembourgeois plus aisés qui s’installent dans cette zone frontalière et font monter les prix de l'immobilier. 
 

Face au miroir, en train de se faire coiffer, sa cliente du moment, Marie-Laurence, ne tarit pas d’éloge sur Schengen. "Oui les accords ont changé le village. Il y a plus de touristes. Les gens se prennent en photos devant les drapeaux".

Mais ce qui l’étonne le plus c’est de voir le nom de Schengen sur les panneaux dans les aéroports. (Ils signalent l'entrée dans l'espace Schengen, NDLR).  C’est une fierté ! On est heureux que le village soit connu.


Un peu plus loin au coeur du village vit Sophie, une Allemande, avec son mari et leurs deux jeunes enfants Oscar et Julie. Ils ont fait le choix de venir s'installer à Schengen pour le symbole. "Je me sens vraiment européenne, l'accueil est vraiment excellent. Mes enfant auront la double nationalité. Ils apprennent déjà le luxembourgeois et le français, en plus de l'allemand que nous parlons à la maison, explique-t-elle dans un français impeccable.  "C'est une grande part de l'Histoire européenne qui se joue ici". 
  

 
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