Bientôt, il sera difficile de former les futurs ambulanciers diplômés d’État. En cause une consigne de la Direction générale de l’offre de soins qui met en colère les chefs d’entreprise en Lorraine. En ce vendredi 7 juillet 2023, ils tirent la sonnette d’alarme.
Une consigne de la DGOS (Direction générale de l’offre de soins) qui considère les apprentis ambulanciers comme des stagiaires en observation, met à mal la profession. Dans le Grand Est, des dossiers d’agrément pourraient être refusés par l’Agence Régionale de Santé pour non-conformité de statut.
C’est un casse-tête pour les chefs d’entreprise des sociétés d’ambulances en Lorraine. Comment former et recruter ? Car le statut de leurs apprentis n’est plus perçu par l’ARS comme avant. Accompagnées d’un responsable, ces personnes en formation avaient le droit d’effectuer des tâches auprès des patients, aujourd’hui elles ont la fonction de simples stagiaires d’observation.
Attirer les jeunes devient compliqué
Sebastien Munoz est à la tête d’Alliance Ambulance La Deodatienne, à Saint-Dié-des-Vosges. En plus de ses 49 salariés, le gérant envisageait de faire appel à l’Institut de formation d’ambulanciers à Golbey pour recruter des jeunes qui ont passé le concours d’admission.
Ces élèves suivent les cours en apprentissage deux semaines en entreprise et deux semaines à l’école. Mais les nouvelles circonstances vont dissuader le chef d’entreprise.
" Si je dis à un jeune de venir en entreprise juste pour regarder sans rien toucher je ne suis pas sûr qu’il viendra. Nous avons des techniques de manutention, de prise de tension, de glycémie ou d’électrocardiogramme. C’est très important d'apprendre sur le terrain, en complète immersion. C’est la garantie de sortir des professionnels de qualité", nous explique Sebastien Munoz, chef d'entreprise.
Les apprentis ambulanciers passent d’office le diplôme d’auxiliaire ambulancier au début de leurs études. Ils sont opérationnels en équipe et accompagnés par un tuteur. Mais avec cette consigne, ils ne peuvent plus pratiquer pendant leur formation, en attendant de devenir ambulancier diplômé d’état.
Les salariés en formation aussi impactés
Dans un contexte où nous sommes sollicités pour relayer le SAMU dans le transport médical, je ne comprends pas ces décisions. Nos apprentis ne sont pas de simples stagiaires. Ils disposent de CDI".
Steeve Gaillard, gérant de Meuse Médical Services.
Dans la Meuse, Steeve Gaillard est à la tête de l’entreprise Meuse Médical Services. Dans un département considéré comme un désert médical, il a du mal à recruter. Dans les ambulances de transport de patients allongés, la présence d’un ambulancier diplômé d’État est obligatoire.
"A la rentrée scolaire, je voulais former des apprentis ambulanciers parmi mes collègues auxiliaires d’ambulanciers…Je commence à avoir de sérieux problèmes de recrutement. Ici, on manque cruellement de main d'oeuvre." ajoute le gérant de Meuse Médical Services.
Les conséquences
Cette nouvelle consigne pose de multiples problèmes pour les chefs d’entreprise.
Au lieu d’avoir des équipes de deux personnes, ce sont trois professionnels qui partiront en intervention. Un deuxième auxiliaire en plus de leurs apprentis est nécessaire.
"Tous ces difficultés accumulées…signifient l’arrêt de la formation !"
Dominque Hunault président de la Chambre nationale des services d’ambulance et chef d’entreprise en Moselle.
"Depuis 40 ans, je forme tous les ans entre 30 et 50 personnes. La formation est prise en charge par l’entreprise. On n’a pas assez de monde, nous ne sommes pas capables de faire les plannings et nos collègues auxiliaires ambulanciers sont rétrogradés en stagiaires", se révolte Dominique Hunault.
"Ce qu’on demande, c’est qu’à partir du moment où le salarié est en formation qu’il puisse garder son statut de salarié et ne pas être considéré comme stagiaire. Il connaît très bien son métier comme auxiliaire ambulancier. Il n'y a aucun risque pour le patient , car l'auxiliaire ambulancier est toujours en binôme avec son formateur. Cela fait 40 ans que je suis dans le métier, ça a toujours fonctionné ainsi. Je ne vois pas pourquoi ça doit changer", continue le président de l'organisation du transport médical.
Le métier d’ambulancier demande des amplitudes horaires importantes, en plus d’une disponibilité les samedis, les dimanches et les jours fériés. La profession peine à recruter car les salaires sont peu attractifs. Un auxiliaire ambulancier touche 1300 €/nets par mois. Les employés passent le diplôme d’état d’ambulancier, c’est-à-dire au niveau de qualification supérieure, avec un salaire qui oscille entre 1600 et 1800€/nets par mois.
La chambre nationale des services d’ambulance a saisi le ministère de la Santé à la suite des refus d’enregistrement des apprentis, futurs diplômés d’État, par plusieurs Agences Régionales de Santé.
Contactée, l’ARS Grand Est devrait répondre prochainement à nos questions. A suivre.