Dans son salon de coiffure, Marc Luttmann a installé un institut capillaire où il reçoit ses clients en toute discrétion, pour leur proposer perruques et prothèses capillaires haut-de-gamme.
On ne se rend souvent compte de l'importance de quelque chose que lorsqu'on le perd... C'est le cas avec les cheveux. Marc Luttmann, coiffeur à Rosheim, l'a bien compris. Après avoir été lui-même touché, à deux reprises, par un cancer des testicules, il s'est rendu compte qu'il existait peu d'offres en Alsace dans le domaine des perruques. Alors, il s'est lancé, dans le salon de son père, lui-même coiffeur à Obernai.
Lorsqu'il s'est ensuite installé à Rosheim, en 1996, la poursuite de l'activité au sein de son établissement n'a fait aucun doute. L'institut capillaire Libert'hair est né alors dans un cabinet discret, au fond du salon. "Cette dimension-là est importante. Les clients n'ont pas forcément envie que tout le monde les voie sans cheveux", explique-t-il. Surtout lorsqu'ils ont subi une chimiothérapie.
Une perruque pour ne plus voir la maladie
C'est le cas de Tania, 54 ans, touchée par un cancer colorectal il y a cinq ans. "J'ai commencé à perdre mes cheveux après deux traitements. Je ne supportais pas de me voir ainsi, et il était hors de question de porter un turban. J'ai alors opté pour une perruque", confie-t-elle. Aujourd'hui, ses cheveux ont commencé à repousser, mais elle continue de venir chez Marc. "Au début, les gens me demandaient : tu es allée chez le coiffeur? Je répondais oui. Huit jours après, ils me disaient : mais tu es retournée chez le coiffeur?" sourit-elle. C'est vrai, avec une perruque, on est toujours bien coiffé.
Même discours teinté d'optimisme du côté de Dorothée. Cette assistante commerciale de 42 ans fait le trajet depuis Saint-Dié tous les 2-3 mois pour entretenir ou changer sa perruque. "On passe beaucoup moins de temps dans la salle de bains le matin pour se faire un brushing!" Elle souffre d'alopécie (perte rapide de cheveux, sans repousse) depuis quelques années, de manière inexpliquée. Dans son cas, comme dans celui de Tania, la prothèse capillaire est prise en charge par la sécurité sociale.
Des perruques qui donnent du style
Tout au long du rendez-vous et des essayages, Marc Luttmann parle, écoute, rassure.. "Souvent, je leur raconte mon histoire. Cela peut faire beaucoup de bien. Les clients se rendent compte que je n'ai pas l'air si mal à présent, et doivent se dire, pourquoi pas eux?" Surtout qu'aujourd'hui, il se dit heureux avec sa femme, Laura, et leur petite fille de cinq ans.
D'autres clients ne se battent pas contre le cancer, mais contre un complexe. Des hommes, par exemple, touchés par une calvitie. Eric, par exemple, client de l'institut depuis plus de dix ans. "Je viens tous les quinze jours pour faire entretenir ma perruque. Dans mon entourage, personne ne sait que j'en porte une. Je fais tout avec", raconte-t-il, pendant que le coiffeur lave ses cheveux artificiels et retire la colle spéciale de sa tête. D'ailleurs, Eric adore changer de style et adopter des coupes tendance. Marc Luttmann n'hésite pas à donner quelques coups de tondeuse ou de ciseau au besoin.
Un site internet, leader en France
Les perruques qu'il propose dans son institut, faites à partir de cheveux artificiels ou naturels, coûtent en moyenne entre 350 et 700 euros, parfois plus. Elles sont fabriquées par des entreprises allemandes. Les mêmes que celles proposées sur le site internet créé par le coiffeur, "Clic perruques", géré par son épouse. L'idée, selon Laura Luttmann, "c'est de rendre accessibles ces produits à des personnes qui sont seules, ou ont du mal à se déplacer. Mais parfois aussi, les clients viennent du monde de la nuit, et cherchent simplement des prothèses capillaires de qualité". Le site est devenu leader en France, et permet aux distributeurs alsaciens de vendre 6000 perruques par an.