L'agglomération d'Épernay (Marne) s'est associée à la start-up Hoali et son réseau "Gourde Friendly". Le but : permettre aux touristes et à la population locale de remplir sa gourde dans des lieux géolocalisés : il s'agit d'une démarche éco-responsable.
Le plastique n'a pas très bonne presse ces temps-ci. Et cela ne risque pas de s'arranger au vu de l'importance planétaire qu'a pris la réduction des déchets.
Pour y participer, la start-up (ou "jeune pousse" dans la langue de Molière) bretonne Hoali a mis en place le réseau "Gourde Friendly". La communauté d'agglomération d'Épernay, Coteaux, et Plaine de Champagne (Marne) s'y est associée.
Le but : inciter les touristes et la population locale à remplir leur gourde dans les points-clés du secteur plutôt qu'acheter de l'eau en bouteille. "C'est très concret comme action visant à ne pas créer de déchets plastiques", explique Laure Koupaliantz, directrice du développement touristique à l'agglomération auprès de France 3 Champagne-Ardenne.
"Certains touristes peuvent hésiter à s'arrêter dans un café pour remplir leur gourde d'eau. Au moins, là, ils savent où ils peuvent s'arrêter et être extrêmement bien accueillis." Un QR code permet en effet de géolocaliser les commerces, services, et institutions qui participent (à Épernay comme partout en France).
De quoi aussi connaître les horaires de ces différents points. Et savoir, en ce qui concerne les fontaines publiques, si elles sont potables. "On a recruté un réseau de 36 ambassadeurs sur notre territoire. Des prestataires touristiques, essentiellement, ont été démarchés." Des lieux qui possédaient déjà des labels "Accueil à vélo" ou "Vignobles et découvertes". Ainsi que des bars ou restaurants, mais pas que : on trouve même des agences du Crédit agricole, histoire de retirer du liquide à la banque... littéralement.
Une démarche "gagnante-gagnante, vertueuse dans tous les sens. Eux fournissent un service sur le territoire, aux touristes mais pas seulement : les locaux aussi peuvent en profiter. En échange, ils sont mis en lumière, bénéficient d'une visibilité éthique et commerciale. En affichant cette démarche, pragmatiquement, quelqu'un peut s'arrêter là pour remplir sa gourde d'eau, par exemple dans une maison de champagne, et voir qu'il peut faire une visite." Rejoindre le réseau est gratuit : il suffit d'envoyer un courriel à tourisme@epernay-agglo.fr, la démarche est aisée et "l'objectif est d'atteindre 50 ambassadeurs avant la fin de l'été".
C'est le cas à l'embarcadère de Champagne La Nautique. Frédéric Dricot explique qu'il a rejoint le réseau "car ça me paraît tellement évident. Je suis dans le tourisme - et l'oenotourisme - depuis des années. Et les bords de Marne, c'est très nature : je vois forcément beaucoup de randonneurs, de gens à vélo. Offrir une gourde d'eau à ces gens qui se déplacent jusque chez nous, c'est quand même la moindre des choses. Je m'étonne même qu'on puisse ne pas le faire." (voir l'embarcadère sur la vue panoramique ci-dessous)
Un véritable enjeu écologique, sociologique, et économique
Roxane de Varine est la septième vice-présidente de l'agglomération. En charge du développement du tourisme, elle a été immédiatement séduite par le projet qu'elle juge très ingénieux, et qu'il fallait valoriser. "Il y a une création de valeur écologique évidente : ce n'est plus une option, on y est et on en a besoin, dont acte. La consommation nomade en bouteille plastique a le moins bon taux de recyclage d'emballage en France : ce n'est plus possible, c'est une véritable nuisance."
"On créé aussi de la valeur sociologique. L'adoption d'un outil d'intelligence collective pour créer un bon comportement, je trouvais ça vraiment pertinent. C'est intergénérationnel et facile, on associe tous les acteurs du tourisme et en embarquant tout le monde : pas seulement les touristes, mais aussi ceux qui vivent sur le territoire. Je trouvais ça vraiment sérieux et responsable."
Je trouvais ça vraiment sérieux et responsable.
Roxane de Varine, septième vice-présidente en charge du développement du tourisme dans l'agglomération d'Épernay
"Il y a aussi une vraie création de proximité quand on permet aux gens d'aller vers les autres pour obtenir un bien : on a d'ailleurs la chance en France d'avoir de l'eau potable à peu près partout. On peut pousser une porte et demander de l'eau, mais quand on cartographie et qu'on affiche, on a une vraie proximité. Il y a une véritable notion de solidarité jolie, intéressante, et vraiment utile."
La dimension économique entre évidemment en compte également. "On a une volonté d'acteurs privés ou publics de s'afficher comme donnant de l'eau à des personnes qui vont le leur demander. Et ça créé un lien économique entre des personnes qui, en temps normal, ne se seraient pas rencontrées." Premier territoire de la région à tenter l'aventure, ce secteur de la Marne pourrait inciter le Grand Reims ou les Ardennes à faire de même (la très touristique Montagne de Reims en a d'ailleurs fait la promotion sur ses réseaux sociaux).
La régie des eaux en a profité pour rénover et/ou remettre en valeur ses fontaines publiques. On peut aussi noter que cette démarche peut inciter des ménages a priori réfractaires à consommer leur eau du robinet plutôt que des bouteilles. Bref, que du bénéfice, "pour pas très cher". Prochaine étape du projet, éventuellement : mettre en vente les fameuses gourdes. "Idéalement, il faudrait qu'elle soit française, dans un matériau recyclé dont le coût ne soit pas rédhibitoire. Ce serait le jackpot." Si jamais ça intéresse une entreprise du coin...