Après le changement de formule de son médicament contre l’hypothyroïdie en mars 2017, le laboratoire Merck a été mis en examen ce mercredi 19 octobre pour "tromperie aggravée". Un motif de satisfaction pour les victimes et leurs représentants. Dont une à Reims.
Cinq ans plus tard, l’émotion est toujours là. L’évocation de la mise en examen ce mercredi 19 octobre du laboratoire Merck pour "tromperie aggravée" dans l'affaire du Levothyrox, replonge une habitante de Reims âgée de 59 ans, dans des souvenirs ineffaçables. Marie-Thérèse Picot le dit et elle pèse ses mots, elle a été victime de la nouvelle formule du médicament.
En mars 2017, le laboratoire Merck modifie la composition du Levothyrox sur le marché français. Le principe actif reste le même, la Levothyroxine, mais avec de nouveaux excipients. Des patients se plaignent alors de nombreux effets secondaires : crampes, maux de tête, vertiges et perte de cheveux. Elle reste marquée aujourd'hui encore.
“On a été pris pour des malades imaginaires, se souvient l’élue de la ville de Reims, également à l’origine du collectif de défense des victimes dans la région. On est des milliers à avoir été abusés, on a avalé ce médicament en toute confiance, et on s’est retrouvés impuissants.” Un sentiment d’impuissance d’autant plus fort qu’aucune alternative n’est à l’époque proposée à ce changement de formule. “Nous n’étions que des dommages collatéraux”, déplore-t-elle.
"On ne lâchera pas"
Alors, voir le laboratoire mis en examen pour "tromperie aggravée" est une première étape. “C’est très bien, on a des avancées et il faut que ça continue. On ne lâchera pas ! assure Marie-Thérèse, qui a pu reprendre son traitement avec l’ancienne formule du Levothyrox. Ce que nous voulons, c’est qu’il y ait plus de surveillance et que ça ne se reproduise pas. Il ne faut pas qu’ils jouent avec la vie des gens, c’est pas normal !”
Même discours du côté des médecins qui ont porté cette cause. “C’est un grand pas et un grand progrès pour toutes les victimes qui voient leur souffrance reconnue, c’est très important, souligne Nicolas Bouvier, médecin généraliste à Reims. C’est l’écroulement de la thèse de l’effet nocebo.” La thèse selon laquelle les effets indésirables seraient induits avant tout psychologiquement par l'absorption d’une substance en réalité inerte.
C’est un grand pas et un grand progrès pour toutes les victimes qui voient leur souffrance reconnue.
Nicolas Bouviermédecin généraliste à Reims
Le médecin avait porté plainte contre X pour tromperie aggravée et saisi le défenseur des droits en 2017. Aujourd'hui il continue de faire confiance à la justice et attend désormais qu’elle suive son cours. “Nous voulons avoir des réponses sur ce qui s’est passé, comprendre pourquoi les patients ont rencontré de tels effets, afin d’apporter une solution thérapeutique à leurs maux”, détaille-t-il.
En France, 2,5 millions de personnes utilisent quotidiennement le Levothyrox, selon le laboratoire Merck. Dans l’hexagone, moins de 100 000 patients continuent d’être traités avec l'ancienne formule, désormais importée, sous le nom d'Euthyrox.