"Même quand je manque d'eau et que j'ai mal partout, je ne ressens aucun stress dans le désert, c'est ma thérapie", l'Alsacien Pierre Fritsch rentre d'un nouveau raid en Mauritanie

Instructeur de paramoteur dans la vie, randonneur par passion, Pierre Fritsch a une nouvelle fois repoussé ses limites en janvier dernier : à 53 ans, il a avalé 800 kilomètres en 35 jours, au milieu du désert mauritanien. Un besoin de se dépasser pour, ironie de l'histoire, recharger ses batteries.

Il est l'un de ces rares spécimens à savoir voler. Monter en altitude en même temps qu'en sensations. Mais lui a le luxe et l'insolence de ceux que rien n'effraie, d'admettre sans rougir qu'il préfère marcher. Pierre Fritsch, à la tête de sa propre école de paramoteur à Brumath (Bas-Rhin), atteint sa plénitude les pieds à terre. Et plus les kilomètres défilent, mieux il se sent.

Lorsque le deuxième confinement s'est achevé, le 15 décembre dernier, il n'a pas tergiversé. Direction la Mauritanie pour poursuivre sa traversée du pays. Un an plus tôt, il avait déjà rejoint Chinguetti depuis Nouadhibou après 625 kilomètres parcourus en 23 jours (voir sa vidéo YouTube ci-dessous). Cette fois, il a poussé son corps encore plus loin : 800 kilomètres pour boucler son périple entre Tidjika et Kaedi.  

35 jours d'efforts et de souffrances, souvent sous des températures extrêmes : "Un jour, j'ai enregistré 28 degrés à 23 heures". Il a parfois craint de devoir rendre les armes, il ne s'y est jamais résolu. "Mon travail est un peu sportif, mais je ne fais pas tant de sport que ça. Et j’ai la chance, une fois par an, de pouvoir faire du sport huit heures par jour pendant six semaines. Ca remet mon compteur à l’équilibre. Les premiers jours, j’ai l’impression d’avoir 10 ans de plus que mon âge tellement c'est difficile, et à la fin, j’ai rajeuni de 10 ans", sourit le Strasbourgeois de 53 ans. 

 

"J'en suis à 53 pays visités. Mais tout cela ne m'intéresse plus"

Depuis près de vingt ans, chaque hiver lorsque les voiles sont au placard jusqu'au retour des beaux jours, il part se dépenser pour refaire le plein d'énergie. Tout donner pour paradoxalement se requinquer. "Avant, j'étais cadre dans une grosse entreprise de la région. J'étais constamment dans l'avion. Cette vie m'a permis de voyager et de visiter de nombreux pays. Je crois que j'en suis à 53 aujourd'hui. Mais tout cela ne m'intéresse plus", assure-t-il. 

Se dépasser l'aide à s'apaiser (voir le début de son parcours en vidéo ci-dessous). Il explique choisir des pays "chauds pour pouvoir marcher confortablement", "où il en est sécurité", et "pas trop loin pour soigner son bilan carbone". D'où la Mauritanie et le Maroc, plusieurs fois exploré. "Je ne pense pas avoir ressenti une seule fois du stress, même quand je n’ai plus d’eau, quand je suis fatigué, que mes pieds me font souffrir. Le stress n’existe pas. Alors que notre quotidien est rythmé par des décisions à prendre, des responsabilités à assumer... c’est beaucoup de stress. Donc c’est un vrai mois de vacances quand je suis dans le désert."

Une aventure dont la satisfaction finale est proportionnelle à la préparation initiale. Pierre Fritsch anticipe chaque détail, au gramme près... Il ne se sent plus capable de porter plus de 18 kilos, beaucoup moins que les 30 qu'il traînait à ses débuts. Alors il pèse, puis ôte, ajoute, adapte pour aboutir au sac à dos idéal. Chaîne hifi, 196 grammes. Panneau solaire : 370 grammes. Et ainsi de suite... "Je le renseigne donc sur mon fichier Excel pour savoir où j’en suis", explique-t-il, tout en faisant défiler ses tableaux bien fournis. En déduisant les six kilos d'eau et cinq kilos de nourriture qu'il a avec lui lorsqu'il est chargé à plein, il ne peut emmener au maximum que sept kilos de matériel. Tente et sac de couchage inclus. 

 

"Les images satellites me permettent d'aller beaucoup plus loin"

L'itinéraire est tout aussi travaillé. L'arrivée d'images satellites a changé sa façon de procéder : "Au départ, avec les simples cartes routières, on avançait un peu à l'aveuglette. Puis le GPS nous a permis de connaître la direction à suivre et la durée pour atteindre un objectif. Les images satellites indiquent maintenant les courbes de niveau, on peut savoir quand la route monte et descend et où se trouvent des maisons, des villages, des points d'eau, des arbres... Avec la technologie de l'époque, jamais je n'aurais pu aller aussi loin que ce que je fais aujourd'hui, cela aurait été beaucoup trop risqué", confie l'aventurier.

Il explore ainsi les cartes pendant plusieurs mois en préparant son voyage et inscrit d'un repère chaque point intéressant pour lui. "J’ai deux téléphones qui contiennent chacun la carte de Mauritanie, le moindre arbre y figure, poursuit-il. Je peux voir que quatre kilomètres plus loin, après la troisième dune, se trouvent trois arbres. Je pourrai installer ma tente là-bas et trouver du bois pour mon feu."

Pierre Fritsch est rentré fin janvier d'Afrique. Depuis, il se consacre au montage d'un film d'une heure environ (sur huit heures d'images captées) pour raconter son aventure. Il a lui-même immortalisé son périple, au smartphone. "Je posais mon téléphone sur un pied, je déclenchais pour enregistrer, je marchais puis je faisais demi-tour pour rechercher le téléphone", mime-t-il en riant. Des efforts supplémentaires pour montrer au grand public qu'il est possible à n'importe qui de partir voyager léger. Essayer, c'est parait-il l'adopter. 

 

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