La montée en puissance de la consommation répétée de gaz hilarant chez les jeunes inquiète la Ville de Nancy qui s'est lancée dans une campagne de prévention le 6 septembre. Pour France 3 Lorraine, Michaël Bisch, responsable du service d'addictologie au centre psychothérapique de Nancy, fait le point sur les dangers de la consommation de protoxyde d'azote.
La Ville de Nancy se lance mardi 6 septembre 2022 dans une campagne de sensibilisation et de prévention contre la consommation de protoxyde d'azote. Son usage détourné comme gaz hilarant est en recrudescence chez les jeunes, avec des consommations répétées. Un arrêté en date du 13 mai 2022 interdisait déjà la consommation détourné du protoxyde d'azote dans l'espace public. Michaël Bisch, psychiatre, addictologue et responsable du service d'addictologie du centre psychothérapique de Nancy, expose à France 3 Lorraine les dangers de la consommation de gaz hilarant.
Pourquoi la Ville se saisit-elle de ce problème maintenant ?
Si la Ville de Nancy se saisit aujourd'hui de la problématique, ce n'est pas parce que ces usages sont nouveaux, ils sont relativement anciens. Mais c'est parce qu'aujourd'hui, ils prennent une dimension épidémique. La banalisation et l'acceptation sociale de l'usage détourné du protoxyde d'azote fait que beaucoup plus de personnes, et notamment des jeunes, en consomment. Plus les personnes en consomment, plus il y a de risques que des usages détournés et problématiques, avec des conséquences médicales, soient mis en jeu.
Pourquoi l'inhalation de protoxyde d'azote est-elle dangereuse ?
Ce qui est inquiétant, c'est que, chez les jeunes, le protoxyde d'azote a une image relativement banalisée, d'innocuité, comme si ce n'était pas dangereux alors qu'en fait, il y a des risques immédiats. Quand on inhale ce gaz, on ne respire pas d'oxygène donc il peut y avoir des conséquences immédiates, y compris dès la première utilisation. Ça peut simplement être des vertiges, mais ça peut aussi être une perte de connaissance avec une chute et un traumatisme crânien. Ça peut aussi être une crise d'épilepsie.
Quels sont les risques d'une consommation régulière ?
Si on en consomme régulièrement, cela peut avoir des conséquences médicales graves, notamment neurologiques. On peut développer des maladies neurologiques qui peuvent créer des troubles de la marche, des paresthésies, c'est-à-dire des sensations désagréables dans les membres notamment, et aussi des complications cardio-vasculaires, sur le cœur ou le cerveau.
Qu'implique une consommation répétée sur un court laps de temps ?
Le risque est notamment lié au fait que l'effet se produit très vite et disparaît très vite. Cela engage les personnes qui en consomment à en inhaler de manière répétée et intensive pour maintenir les effets. Et évidemment, la multiplication de la consommation augmente le risque d'avoir des conséquences.
Il y a un gros décalage entre la dangerosité réelle et la dangerosité perçue.
Michaël Bisch, responsable du service d'addictologie au centre psychothérapique de NancyFrance 3 Lorraine
Comment lutter contre ce phénomène sachant que la vente est certes interdite aux mineurs, mais qu'on peut s'en procurer partout ?
Ce n'est pas l'interdiction ou l'autorisation qui règlent le niveau d'usage mais c'est le sentiment qu'en consommer est acceptable. Pour réduire les risques, on a tout d'abord besoin d'informer les gens, c'est le sens de cette campagne. Parce qu'il y a un gros décalage entre la dangerosité réelle et la dangerosité perçue. Le niveau d'information de la population générale, des parents, et des jeunes est assez mauvais sur les risques liés au protoxyde d'azote. L'idée est aussi de parler de l'orientation si nécessaire des usagers problématiques afin qu'ils puissent se rendre notamment dans une consultation jeune consommateur pour faire le point sur leur consommation, soit l'arrêter, soit reprendre le contrôle dessus.
Si vous cherchez de l'aide, vous pouvez joindre Drogues info service au 0 800 23 13 13, de 8h à 2h, 7 jours sur 7. L'appel est anonyme et gratuit.