Sa discipline reste méconnue en France. La Nancéienne Laura Josserand est revenue des championnats du monde de pole dance en Italie avec la 26è place. Pas si loin de son objectif initial, et ravie de sa deuxième participation dans la compétition.
A la conférence de rédaction les ricanements avaient fusé. Un reportage sur la pole dance ? Réaction quasi unanime : "c’est vraiment un sport ?". Quelques heures plus tard, dans la salle de Nancy où elle s’entraine, Laura Josserand met fin aux doutes. Sa discipline, mélange de gymnastique et de danse autour de deux barres fixées au sol, impose le respect.
L’athlète de 37 ans, danseuse classique de formation, prévient d’emblée : pour les images, il faudra se contenter d’une seule prise. Sa chorégraphie de quatre minutes, qu’elle travaille depuis plusieurs mois, est tellement exigeante physiquement qu’elle ne peut pas la répéter deux fois d’affilée :"ça prend toute la place dans ma vie en ce moment, j’essaye d’avoir un jour de repos par semaine parce que mon corps en a besoin, mais sinon c’est pole dance tous les jours".
Par chance, il s’agit d’un entrainement, et comme elle échoue au début de son programme, elle reprend depuis le début, le temps pour nous de changer de cadre, et d’apprécier la performance de plus près : "j’ai perdu 6 kilos depuis le début des entrainements pour les championnats du monde, mon short c’est du 16 ans !". La jeune femme a la répartie vive et enjouée. Elle déroule l'interview comme elle enchaine les combos.
En forme
Elle ne cache rien de ses débuts fulgurants dans la pole : "il y a quatre ans je venais d’avoir mon deuxième enfant et j’avais pris beaucoup de poids pendant ma grossesse. Je cherchais un sport qui allie la danse et la gymnastique pour retrouver la forme, je suis arrivée un peu par hasard à la salle tenue par Lysiane Giambi, et j’y suis restée". La recette de sa réussite : physique, cardio, et mental : "ça demande énormément de concentration, il ne faut pas se laisser perturber par une glissade ou une mise en place approximative : quand on chute c’est de trois ou quatre mètres, donc la vigilance est très importante".
A la mise en place de sa chorégraphie, elle utilise des « crash mat », des tapis ronds qui amortissent les chutes. Elle compte aussi sur les bras de Maxime Claudet, son entraineur. Ecrite avec lui, sa chorégraphie actuelle évoque principalement le continent de ses origines, l’Afrique. Sur fond d’electro tribale, le Mother Africa de Troyboi, la jeune femme conclut son programme dans un désarmant sourire : "ça vous a plu ?".
Si la caméra suit, l’appareil photo est à la peine pour tenter de saisir les difficultés et les subtilités de la discipline. "Le Covid a tout bloqué pendant deux ans, heureusement les Mondiaux ont pu se maintenir" : à raison de cinq entrainements par semaine, la Nancéienne est partie confiante en Italie le week-end du 4 et 5 décembre 2021. "Elle a bossé dur, elle fait beaucoup de sacrifices, sa chorégraphie est en place" estime son entraineur.
Top 10
Après une prestation quasi parfaite, et une petite glissade au moment de la mise en place, Laura termine 26ème sur 59 participantes avec 109 points. A priori loin du top 10… "mais on ne m’a pas donné le nouveau code de pointage des notes artistiques, si je l’avais eu, j’aurais fait 20 points de plus et j’étais dans les dix premières" explique l’athlète.
Aucune déception, au contraire. A 37 ans, elle signe une performance satisfaisante: "si tout va bien, je vais pouvoir m’entrainer au centre olympique italien en février, avec les meilleurs athlètes du monde". Sur ses épaules, une veste de survêtement aux couleurs tricolores, avec le sigle de la Fédération Française de Danse. La même fédé qui encadre le breaking, olympique en 2024 à Paris. Et pourquoi pas la pole dance ?
Fatiguée, et encore marquée par les courbatures, Laura reprendra l’entrainement "avec la même chorégraphie jusqu’en juin 2022, ensuite j’en travaillerai une nouvelle sur le thème de l’Asie pour aller défendre mes chances aux championnats d’Europe en septembre, et aux Mondiaux de décembre". Du repos ? "Les fêtes c’est sacré, je vais en profiter comme tous les ans avec ma famille, la fin d’année c’est mes vacances". Et après ? "Il y a des catégories pour tout le monde dans ce sport, jusqu’au master + 50, je n’ai pas encore 50 ans donc j’ai encore de l’avenir dans ce sport ! Si mon corps ne me lâche pas avant, je continuerai jusqu’à qu’il n’y ait plus de catégorie qui m’accepte".