Privée de son allocation adulte handicapée (AAH) pour des raisons administratives, Claire Floury veut faire reconnaître ses droits et s’indigne des injustices dont sont victimes les handicapés. Nous l'avons rencontrée
C’est une jeune femme déterminée, drôle et bravache que je rencontre dans son appartement de Jarville-la-Malgrange, ce jeudi 23 septembre 2021. Claire Floury, 30 ans, est née avec une maladie génétique, le spina bifida qui touche sa moelle épinière. Handicapée de naissance, elle a toujours eu besoin d’un fauteuil et d’autres équipements spécifiques nécessaires à son bien-être.
Depuis 10 ans, elle touche l’Allocation Adulte Handicapée versée par la CAF, dont le montant varie en fonction de sa situation professionnelle et familiale. Depuis qu’elle a perdu son travail de secrétaire médicale en février dernier, Claire touche 1.080 euros mensuels pour subvenir à ses besoins, avec un loyer de 600 euros et une aide-ménagère, indispensable pour la jeune femme en fauteuil, qui lui coûte 300 euros par mois.
Depuis début septembre elle ne touche plus rien, la CAF l’ayant informée que son allocation était suspendue.
Je ne mange plus, je ne dors plus, je fais des crises d’angoisse, car je ne sais pas combien de temps cela va durer, je me sens abandonnée.
La jeune femme est en colère : "j’ai cherché des réponses à cette suspension, la procédure pour obtenir l’allocation a changé et on ne m’avait pas expliqué, Je ne mange plus, je ne dors plus, je fais des crises d’angoisse, car je ne sais pas combien de temps cela va durer, je me sens abandonnée".
Dans les méandres de l’administration
Claire me raconte son histoire, il faut l'avouer un peu kafkaïenne.
Il y a quelques mois, la CAF de Meurthe-et-Moselle dont elle dépend, lui demande un justificatif de pension d’invalidité pour son dossier d’allocations. Claire est handicapée, pas invalide, elle ne la touche pas et ne souhaite pas en faire la demande car elle estime que cela constituera un frein à sa recherche d’emploi et la jeune femme souhaite rester active. Elle répond donc qu’il n’y a pas de pension d’invalidité. Mais la demande lui est faite de nouveau et elle fait la même réponse : elle ne peut pas en justifier puisqu’elle ne la touche pas.
Début septembre 2021, ses allocations ne lui sont pas versées, elle découvre alors qu’elles ont été suspendues.
Elle comprend, trop tard, car personne ne lui avait apparemment expliqué, qu’elle devait obligatoirement justifier de cette pension, qu’elle la touche ou non. Elle se tourne alors vers la CPAM 54, où elle doit de nouveau constituer un dossier pour cette fameuse pension, un dossier qui pourrait mettre deux mois à être instruit avant régularisation de sa situation avec la CAF.
Pour Claire Floury c'est la goutte d'eau : "tout le monde se renvoie la balle et personne ne semble comprendre que je n'ai plus aucun revenu, car personne ne m'a bien expliqué la procédure. J’ai un niveau BTS, je suis en mesure de comprendre, de faire un dossier, si moi je ne comprends pas, combien sont-ils comme moi, à ne pas oser faire valoir leurs droits!" s'énerve la jeune femme.
"Les handicapés ont été habitués à se taire, mais moi je ne veux plus la fermer !" assène-t'elle.
Claire Floury est une battante, mais elle estime que sa vie n'est déjà pas simple avec la lutte contre la maladie, les incivilités et les insultes du quotidien dont elle est victime en tant qu'handicapée. Alors ne plus recevoir les aides auxquelles elle a pourtant droit, la met franchement en rogne. Aucune procédure d'urgence ne serait prévue à la CPAM, ni à la CAF, pour ce genre de situation.
La réponse de la CAF
Contactée ce vendredi, la CAF de Meurthe-et-Moselle a rapidement répondu.
Directeur en charge de la relation de service à la CAF 54, Paulo Viana assure que la jeune femme va être rapidement rappelée, afin d'être accompagnée dans ses démarches. "Nous avons juste besoin du récépissé de dépôt de demande à la CPAM, on va gérer cette situation au plus vite pour que Madame Floury puisse bénéficier de ses minima sociaux, nous sommes très attentifs à cela".
Ce vendredi, Claire a prévu de se rendre au CCAS de Jarville où elle réside pour aller chercher des bons alimentaires car elle ne peut plus se payer de quoi manger.
Quelle que soit l'issue du dossier, elle envisage de solliciter l'aide juridictionnelle et de porter plainte auprès du tribunal administratif.