C’est une première en France et en Europe: depuis ce mardi 14 septembre, l’hôpital Central de Nancy utilise un logiciel pour mieux orienter les patients qui arrivent aux urgences. L'objectif est de faire gagner du temps aux infirmières et médecins.
Des urgences saturées, des médecins débordés et des patients stressés… Pour fluidifier le circuit des malades qui arrivent aux urgences de l’hôpital Central de Nancy, un dispositif inédit, importé tout droit du Québec, est en phase de test à compter de ce mardi 14 septembre 2020 et jusqu’en mars 2021.
Comment fonctionne-t-il ? Est-il vraiment fiable ? Éléments de réponses avec Tahar Chouihed, médecin urgentiste au service des urgences au CHRU de Nancy.
- Comment fonctionne ce nouveau dispositif ?
Quand le patient arrive aux urgences, celui-ci est tout d’abord accueilli par un agent administratif qui lui crée un dossier. Puis, il est pris en charge par l'infirmier d’orientation qui va lui poser les questions habituelles sur son état de santé avant de prendre sa tension et sa température.
La nouveauté, c’est que toutes ces informations vont être rentrées dans le logiciel Logibec. Son algorithme va évaluer le niveau de gravité du patient avant de proposer ou non sa réorientation vers une structure plus adaptée (SOS médecin, le cabinet médical rue Lionnois ou le centre médical de soins immédiats d’Essey-les-Nancy).
Cet algorithme va apporter une sécurisation et une homogénéisation de la prise en charge du patient. A terme, le but est que l'infirmier ou infirmière devienne autonome à 100%, sans avoir besoin de la validation d’un médecin pour la réorientation. Notons que jusqu’en mars 2021, qui correspond à la phase de test du logiciel, un médecin validera ou non la réorientation.
- À combien évaluez-vous le nombre de patients réorientés ?Il y a quelques années, j'ai rencontré l’équipe d’urgentistes et de chercheurs de l'hôpital de Montréal lors d’une réunion scientifique. Ils m'ont présenté ce logiciel et cet algorithme. Depuis, cela fait plus de deux ans que l'on travaille avec l'équipe d’Alexandre Messier pour adapter ce logiciel à la France. Voilà pourquoi Nancy est la première ville à tester ce logiciel en France et en Europe.
Selon nos statistiques, 8 à 10% des patients qui consultent aux urgences pourront être réorientés chaque jour. Sachant que nous avons 100 à 130 patients en 24 heures…
Au Québec, le taux de reconsultation est de l’ordre de 3% dans les 48 heures qui suivent la première venue à l’hôpital. Il s’agit de patients qui jugent que leur état ne s’améliore par aussi rapidement que prévu. Vous savez, il faut parfois une semaine de traitement pour traiter une angine douloureuse. Nous sommes confiants car nos collègues Québécois ont déjà réorienté 50.000 malades.
- Et concernant la protection des données ? Seront-elles conservées par l’hôpital ?
Concernant la protection des données, elles sont nominatives dans le logiciel de réorientation. Nous n’avons ni le nom, ni le prénom de la personne qui vient consulter. Nous avons uniquement un numéro, le patient est complètement anonymisé.
- Ce dispositif n’est-il pas une fausse solution pour repousser le problème du manque d’effectif au sein de l’hôpital public ?
Rien ne palliera au manque d’effectif. Pour cela, il faut embaucher plus de personnel. Ici, le but est d’optimiser le temps de travail des infirmiers et des médecins pour qu’ils soient plus efficaces dans la prise en charge des patients. Un patient qui se rend aux urgences alors qu’il n’en a pas besoin fait perdre du temps à l’équipe médicale qui pourrait s’occuper d’une autre personne.