Soleil : pic d'activités, préparez-vous au spectacle des aurores boréales près de chez vous

Le Soleil devrait connaître un pic d'activité en 2024/2025. L'occasion de voir des aurores boréales depuis la France. Un phénomène qui peut aussi perturber les systèmes de communication électroniques.

L’activité magnétique à la surface du Soleil peut déclencher une éruption solaire. Ces phénomènes propulsent, dans l’espace, des vagues de radiations, des particules chargées électriquement et de la matière solaire, appelée plasma. Parfois, elle est éjectée en direction de la Terre.

2024 et 2025 verront l’activité solaire s’intensifier. C’est un cycle de 11 ans en moyenne observé depuis des siècles. Une étude, publiée en novembre 2023, dans la revue Monthly Notices of the Royal Astronomical Society, le confirme "Les taches solaires sont observées depuis plus de quatre siècles et la nature magnétique des cycles des taches solaires est connue depuis environ un siècle. (…) Notre analyse indique que le cycle solaire 25 devrait être un cycle faible à modéré, culminant en 2024".

Pour les astronomes amateurs comme pour les chasseurs d’aurores boréales, c’est la promesse d'une année riche en événements à observer. Habituellement, les aurores boréales, plutôt de couleur verte, sont réservées aux régions polaires. Grâce à ce pic d’activité, il sera possible, avec un peu de chance, de voir des aurores boréales, de couleur rouge orangé, en France.

La SLA, Société Lorraine d’Astronomie compte nombre de passionnés, parmi lesquels Jean-Paul Arnould. "Une aurore boréale a été photographiée en Lorraine en novembre dernier". Ce qui pour les amateurs est la confirmation que cela ne fait que commencer.

Il se prépare pour 2024 et 2025 et ne veut rien rater. "Il faut que les conditions soient réunies, une nuit claire et aucun nuage pour commencer. Ensuite, l'éjection solaire doit être puissante et dirigée vers la Terre. Plus l'éjection est importante et en direction de notre planète, plus elle pourra provoquer une aurore boréale visible sous nos latitudes.

En général, elles se forment en début de nuit entre 21 heures et minuit. Ce fameux pic de l'activité solaire, qui se produit toutes les onze années, peut nous offrir ce beau cadeau. Il peut se passer plusieurs jours, plusieurs semaines et même plusieurs mois entre l'éjection et le moment où les particules énergétiques vont venir percuter le champ magnétique de la Terre et provoquer la danse des aurores boréales. La matière expulsée peut atteindre une vitesse de 1.000 km par seconde. Le soleil est à 150 millions de kilomètres de la Terre."

Des applications pour ne rien manquer

Cette distance à parcourir pour les particules énergétiques permet de donner du temps aux passionnés d'aurores boréales. "Il existe des applications, qui vous préviennent de l'imminence d'une aurore boréale. Elles ne peuvent pas prédire avec précision que vous allez voir une aurore boréale, mais elles donnent des indications sur les éjections solaires et les probabilités qu'elles atteignent la Terre".

Ainsi, Jean-Paul Arnould a installé sur son smartphone "spaceweatherlive". Une autre application, "My Aurora Forecast & Alerts" propose une liste de localisations où la probabilité est la plus élevée. On y trouve aussi une galerie de photos postées par les passionnés.

"Northern Light Forecast" a une fonction supplémentaire. Elle géolocalise votre smartphone et vous envoie une notification si vous êtes dans le secteur d'une aurore probable. Enfin le site de la National Oceanic and Atmospheric Administration (NOAA) aux Etats-Unis évalue les perturbations du champ magnétique terrestre et estime grâce à cela la probabilité de voir une aurore en fonction de la zone géographique. 

De nouveaux instruments pour observer le soleil

D’autres amateurs se sont équipés pour observer le soleil lui-même. Des outils de plus en plus performants sont désormais à leur disposition. Daniel Henrion a fait l’acquisition d’un "Sol’Ex" il y a deux ans. "C’est un instrument développé par un Français, nous explique-t-il.

Astronome amateur depuis plus de trente ans à Saint-Avold en Moselle, il est fasciné par le soleil. "Cet outil permet de photographier le soleil en toute sécurité avec beaucoup plus de détails que les instruments classiques, par exemple, les protubérances solaires. On peut observer la nuit, mais aussi le jour. Les premiers instruments étaient réservés aux professionnels. À présent, nous les amateurs, on peut aussi accéder au soleil. Il y a énormément de choses à en apprendre."

Sol’Ex est un instrument d’astronomie, pesant moins de 500 grammes. Il s'installe sur une lunette astronomique.

En Meurthe-et-Moselle, Thomas Lelu, qui est astrophotographe confirme : "il est dangereux de vouloir observer le soleil sans un équipement adapté. 

Je peux faire de l'imagerie solaire sans problème désormais. Ce matériel va filtrer 99,99¨ % de la lumière du soleil. La photo est en noir et blanc. On y ajoute, grâce à l'informatique, de la couleur pour obtenir une belle  image de l'astre solaire."

Les scientifiques au plus près du soleil

Milan Maksimovic est astrophysicien à l’observatoire de Paris. Il contribue à une mission de l’agence spatiale européenne (ESA) qui a justement envoyé une sonde "Solar orbiter" en février 2020 pour observer le soleil. Il a en particulier travaillé sur l’un des dix instruments à bord, le RPW pour Radio and Plasma Waves.

"Tous les 11 ans, en moyenne, il y a un pic d’activité solaire. Solar Orbiter va permettre d’étudier la façon dont les éruptions solaires se mettent en place et ce qu’elles produisent. Une tempête solaire  produit de la matière, de la lumière et des particules énergétiques. Pour la première fois, une sonde va s’approcher du soleil avec des instruments, qui permettent de faire des images et de mesurer les émissions de plasma. On va coupler les données de l’imagerie avec celle de la sonde."

Une autre sonde a fait route vers notre étoile, la sonde solaire Parker de la NASA, partie en 2018. Elle sera plus proche du soleil encore. Fin 2024, elle devrait "frôler" le soleil à une distance incroyable de 6,1 millions de kilomètres, un record. Elle représente un des objets les plus rapides de l’histoire de la spatiale avec une vitesse de 700.000 km/h.

Elle aussi devrait nous communiquer des informations précieuses sur la couronne et le vent solaire, ce flux de particules énergétiques. Quand une éruption solaire est suffisamment puissante, elle est accompagnée d'une "éjection de masse coronale", un gigantesque nuage de plasma. Ces deux missions montrent à quel point les scientifiques veulent étudier ce phénomène et avec lui ce cycle de onze années.

Le soleil est situé à 150 millions de kilomètres de la Terre. Le vent solaire met environ quatre jours pour arriver tout comme une bulle de plasma. Il n’est pas constant. "Parfois, il peut y avoir quelque chose comme une bourrasque. Il y a aussi des événements éruptifs. Les taches que l’on observe à sa surface peuvent en réalité avoir des dimensions de 10.000 à 20.000 km de rayon. On pourrait mettre la Terre dans une seule de ces tâches. Ces taches solaires sont l’émergence du champ magnétique. Elles vont toujours par paires", poursuit Milan Maksimovic.

"L’instrument RPW va permettre de faire un suivi des éruptions solaires et des particules énergétiques émises. Le soleil est un bon accélérateur de particules. Ces particules énergétiques, sur terre, on n’y est pas sensible. Le champ magnétique de la terre nous protège. Thomas Pesquet, lorsqu’il fait des sorties de la station spatiale, est encore protégé par le champ magnétique.

En revanche, il n’a plus la protection de l’atmosphère. Pour revenir à l’instrument, il sert à mesurer le plasma lui-même. Il mesure les ondes, qui se propagent dans le plasma et qui pourraient être la source du chauffage de la couronne, mais aussi au niveau des particules énergétiques. Il agit comme un radar qui détecte les émissions radio, produites par les éjections de particules énergétiques. On pourra les détecter même si elles se forment de l’autre côté du soleil. C’est un peu comme si on avait des oreilles géantes" nous explique Milan Marksimovic.

Perturbations des GPS et des objets électroniques

Ces éruptions solaires, qui vont atteindre la Terre, ne sont pas sans risques pour nos systèmes de télécommunication. En mars 1989, plus de six millions de personnes, à l'est du Canada, ont été privées d’électricité "une de ces éruptions a propulsé un jet de matière grand comme 36 fois la Terre à plus de 1,6 million de km/h, directement vers notre planète. Il aura fallu un peu plus de deux jours pour que ces particules chargées nous atteignent et déclenchent une tempête géomagnétique. C’est cette matière qui a causé les pannes de courant", explique Radio Canada sur son site internet.

"Une tempête solaire a provoqué la fermeture de l’aéroport de Stockholm en 2015", confirme Milan Maksimovic. "Des tempêtes solaires ont perturbé les champs magnétiques terrestres, provoquant un dysfonctionnement des radars" utilisés par les aiguilleurs pour réguler le trafic, avait indiqué à l’AFP, à l’époque, un porte-parole de la LFV, Per Fröberg.

Les satellites, et en particulier ceux qui gravitent à une orbite basse, 200 à 300 km d’altitude, sont vulnérables aux particules solaires. "Les grosses particules énergétiques peuvent interagir avec les composants électroniques. Elles peuvent s’introduire dans le satellite, qui se met alors en veille. Il faut le rallumer en envoyant une commande depuis la Terre. Mais s’il ne répond pas, il est perdu. Un satellite a déjà été perdu de cette façon."

Milan Maksimovic, qui participe aux deux missions Solar Orbiter et la mission Parker, est aussi intéressé par les photographies des chasseurs d’aurores boréales. Tout petit, il comptait, déjà, les étoiles dans le ciel. Passionné de science et d’astronomie en particulier, il a fait des études de physique, puis de physique nucléaire. Passionné par l'idée d'un accélérateur de particules, celui du CERN en particulier, c’est finalement un autre accélérateur de particules, le soleil, qu’il tente de comprendre grâce à l’astrophysique.

Pour les amateurs et autres chasseurs d’aurores boréales, 2024 et 2025 devraient les régaler autant que ceux qui scruteront les éruptions du soleil. Les scientifiques, eux, n'auront jamais été aussi prêts du soleil grâce à Solar orbiter et à la sonde Parker. 

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