Non, ce n'est pas l'élève qui fait la leçon au professeur en mode soixante-huitard. La classe inversée, c'est le cours à la maison, et les devoirs à l'école. Une pédagogie qui se répand dans plusieurs pays d'Europe. Elle est aussi expérimentée en Lorraine, par exemple au lycée Cormontaigne à Metz.
Qui n'a pas connu un grand moment de solitude, le soir, devant une équation à multiples inconnues que même papa-maman n'arrivent pas à démêler ?
Et qui ne s'est jamais assoupi en classe, bercé par la douce voix du prof de chimie conjuguée à l'effet hypnotique du tableau de Mendeleiev ?
Ce sont justement deux profs de chimie du Colorado qui, il y a dix ans, ont constaté que trop d'élèves dormaient en cours ou étaient absents. Ils se sont dit que le cours - le seul temps de rencontre entre l'enseignant et l'élève - était mal utilisé. Ils ont décidé de filmer leurs cours magistraux pour les envoyer à tous les élèves (même ceux qui séchaient !). Et de faire, en classe, les devoirs qui jusque là étaient faits à la maison.
La classe inversée, c'est ça : un support de cours (vidéo ou simplement écrit) que l'élève potasse chez lui, à son rythme. Et un temps scolaire consacré aux exercices, aux travaux pratiques, ce qui permet au professeur d'aider ceux qui rament, et aux élèves de travailler ensemble.
Illustration dans la classe de première d'Olivier Guilland, prof de maths à Cormontaigne (Metz)
L'Université de Lorraine n'est pas en reste, où de nombreux enseignants se sont lancés dans l'expérience.
On voit que l'émergence de la classe inversée a été rendu possible par l'évolution technique. Les élèves de Cormontaigne ont reçu une tablette pour apprendre leurs cours. Mais il ne faut pas y voir la panacée. Elle suppose une éducation des élèves à l'autonomie : rien ne sert de venir en classe si on n'a pas étudié le cours à la maison. Tous les élèves n'y sont pas prêts.
La classe inversée est donc plus adaptée au lycée qu'à l'école primaire ; et elle est sans doute plus pertinente dans les disciplines scientifiques que dans les matières telles que le français ou la philo. Ajoutons que le cours (écrit ou vidéo) doit être très bien préparé pour que l'élève puisse le comprendre seul.
C'est en tous cas une piste intéressante, en particulier pour réduire le décrochage scolaire et soutenir plus activement les élèves qui peinent dans certaines matières.