Retards, suppressions de train, manque de place... Les usagers de la ligne TER Laon-Paris pointent du doigt plusieurs dysfonctionnements. Nous les avons suivis le temps d'un trajet direction Paris.
Le vent et la fraîcheur - presque hivernale - picotent les yeux et font frissonner les doigts. Chacun essaie de se réchauffer comme il peut. Un homme - cheveux grisonnants et sacoche sur l'épaule - frictionne ses doigts les uns contre les autres tandis qu'un autre cherche à se protéger de la brise en s'appuyant contre un muret. Il est 5h45 du matin à la gare de Villers-Cotterêts dans l'Aisne et le thermomètre atteint les 7°C.
Ici, alors que les maisons environnantes sont encore plongées dans le noir, le coup d'envoi de la journée vient d'être donné... ou presque. Le premier train direction Paris est annoncé avec "un retard de 5 minutes". "Ça commence bien", lance un voyageur. "Pour changer !", s'exclame un autre. Très vite, une vingtaine de voyageurs s'agglutine devant le panneau d'affichage.
Sur le quai, José Coelho, habitué de la ligne, observe le petit manège. "C'est comme ça un jour sur deux. On est dépendant des aléas des trains. Hier, par exemple, il y a eu plus d'une heure de retard", nous raconte-t-il. Cet agent de maîtrise prend tous les jours le train pour aller travailler à la capitale. Quelques instants plus tard, une autre annonce intervient : "Attention, ce train circule avec un nombre réduit de places assises." Ni une, ni deux, tous les passagers remontent le quai. "Logiquement, on doit avoir deux ou trois motrices, là, on n'en a qu'une. Le train va être plus court donc on se dépêche", nous explique José. Le TER entre en gare. Nous embarquons.
À l'intérieur, un calme plat règne. Capuche sur la tête et écouteurs dans les oreilles, un jeune homme tente de fermer les yeux. En face de lui, une femme, proche de la soixantaine, tricote. Un homme - en costume - actualise presque frénétiquement la page Facebook Paris-Laon : ma 2ème maison !. Sur cette page, suivie par plus de 6000 personnes, figurent les informations sur les trains régionaux. "Tout est actualisé en direct. C'est très pratique", nous assure-t-il.
José Coelho acquiesce. Lui aussi suit ce compte sur les réseaux sociaux. Ces derniers temps, les suppressions et les retards de train se seraient multipliés et les raisons seraient variées : "Ce sont des problèmes de matériel, de signalisation, de personnel ou encore de météo. La dernière fois, il y a des arbres qui sont tombés à cause de la tempête. En fait, les cinq ou dix minutes de retard que l'on prend, ça s'amplifie une fois arrivé à Paris Nord. Comme on loupe nos correspondances, le retard s'accumule." Sa voisine est, elle, très en colère : "Ça fait 42 ans que je prends le train. Avant, il n'y avait pas de chauffage, très peu de confort mais les trains étaient ponctuels. Maintenant, il y a des retards toutes les semaines, on nous prend en otage."
Un manque de place
Au bout d'une dizaine de minutes, le TER s'arrête à Crépy-en-Valois. Des dizaines de personnes inondent les voitures. Tous les places se remplissent. Certains se résolvent même à attendre à moitié assis au niveau des portes."Avec la réduction des trains, c'est quand même très embêtant parce qu'on voyage parfois debout. Quand on a un handicap ou qu'on est chargé, ça devient difficile", se plaint Catherine Degrave, usagère depuis vingt ans. Selon la région des Hauts-de-France, entre 2019 et 2021, le taux de suppression des trains régionaux a augmenté de 50%. "On ne comprend pas on paye notre abonnement cher et on est mal servi. On paye mais on n'a pas de réductions alors qu'on a toujours des problèmes", surenchérit Reshma Seemathree, elle aussi, habituée de la ligne.
Alors que l'on se rapproche de la gare du Nord à Paris, les premiers bruits se font entendre. L'un récupère son sac, tandis qu'un autre range son bouquin et enfile son manteau. Tous attendent debout. À l'arrivée, le train se vide en quelques instants et chacun part vaquer à ses occupations. Ce jour-là, le train aura seulement eu cinq minutes de retard. 5 000 personnes utilisent quotidiennement la ligne Laon-Paris, ce qui en fait l'une des plus empruntée en Picardie.