Après la chute mortelle d'une adolescente dans la nuit de samedi à dimanche, de nombreuses questions se posent sur la sécurisation de cette friche laissée à l'abandon depuis 27 ans.
Lundi, une de nos équipes est entrée sur la friche des Grands Moulins de Paris en compagnie de Jean Delebarre, le maire (DVD) de Marquette-lez-Lille. L'accès est extrêmement simple : on passe par une brèche au niveau des murets censés pourtant bloquer l'accès au site. C'est sans doute par là que Sarah, une jeune Lambersartoise de 16 ans, est entrée samedi soir avec deux de ses amies. Après avoir pénétré dans le bâtiment, l'adolescente, qui était scolarisée au Lycée Jean-Perrin, a effectué une chute mortelle de 20 mètres dans un des silos.
Selon le maire de Marquette, tout a été mise en oeuvre pour sécuriser les lieux. Il rejette la faute sur le propriétaire privé des lieux à l'abandon depuis 1989, date de la fermeture de la minoterie. "Lorsque la ville - qui se substitue encore à lui - remet encore le grillage en place, bouge les blocs de béton, on se trouve avec des gens qui nous cassent les clôtures, qui passent derrière, qui rentrent à droite et à gauche, ce site est vulnérable au possible", déplore Jean Delebarre. Un arrêté de péril avait été pris en 1996, obligeant le propriétaire à sécuriser le site. Des travaux ont été effectués mais ils sont loin d'être suffisants.
Le propriétaire rejette la faute sur l'Etat
La friche des Grands-Moulins de Paris est la propriété d'un certain Jean-Pierre Maurice, via la société Diane de la Provenchère. En 2014, ce dernier a signé un compromis de vente avec la Financière Vauban, porteuse d'un projet de réhabilitation et de transformation du site, avec la création de commerces et de 120 à 130 appartements. Nos confrères de La Voix du Nord ont joint lundi le patron de cette société d'investissement, Xavier Lucas, qui se dit effondré par "ce drame épouvantable". Lui rejette la faute sur l'Etat qui doit donner son agrément pour les travaux, car les Grands-Moulins sont inscrits à l'inventaire des Monuments historiques. "Cela fait un an et demi qu'on attend cet agrément", dénonce-t-il. "Un an et demi qu'on relance Bercy presque chaque semaine par téléphone. Et rien ne se passe. J'ai reçu des courriers de MM. Sapin (ministre des Finances NDR) et Eckert (secrétaire d'Etat au Budget NDR) qui me disaient qu'ils allaient regarder ça de près, mais en attendant, rien de concret"."On serait sur une friche industrielle gérée par la communauté urbaine de Lille ou part l'Etablissement public foncier, ce site serait sécurisé complètement avec des normes publiques", relève Marc-Philippe Daubresse, vice-président de la Métropole Européenne de Lille (MEL) en charge de l'urbanisme et maire (LR) de Lambersart, où vivait la jeune victime. "Vous êtes sur un site privé, le maire a fait ce qu'il avait à faire, il a pris des arrêtés de péril, il ne peut pas reprendre des arrêtés de péril tout le temps...". Pour autant, selon Christophe Mondou, enseignant en droit administratif à l'université Lille 2, la responsabilité du maire pourrait quand même être engagée, au civil comme au pénal. "Sur le bâtiment d'une propriété privée, on a notamment "la police des édifices qui menacent ruine"", nous a-t-il expliqué. "C'est un peu compliqué à mettre en oeuvre, mais il est possible que le maire soit engagé par cette police là.". Jean Delebarre, le maire de Marquette, et le propriétaire doivent tous les deux être entendus par la police dans le cadre de l'enquête sur la chute mortelle survenue le week-end dernier.