Coronavirus chez nos voisins : la pauvreté explose au Royaume-Uni à cause de l'épidémie

C'est une des conséquences à plus long terme du coronavirus : pandémie risque de faire exploser un peu plus la pauvreté au Royaume-Uni. Les enfants sont les premiers touchés, dans un pays déjà frappé par la précarité après une décennie d'austérité.

Pertes d'emplois en cascade, ruée sur les aides sociales, ou encore fermeture des écoles : cette crise sanitaire se double d'une profonde crise sociale qui préoccupe le monde associatif.

"La pandémie braque les projecteurs sur la situation précaire d'une grande partie de la population" et les carences de la sécurité sociale britannique, constate Dave Innes, économiste pour la fondation Joseph Rowntree, qui lutte contre la pauvreté. Selon les derniers chiffres officiels, plus de 14 millions de personnes au Royaume-Uni sont touchées par la pauvreté, soit un quart de la population. 
 

Un million de Britanniques ont demandé à recevoir le "crédit universel" depuis deux semaines



Or signe de la gravité de la crise, depuis deux semaines, près d'un million de Britanniques ont déposé un dossier pour recevoir le "crédit universel" (Universal Credit), sorte de minima sociaux mis en place en 2013. "De nombreuses personnes vivant avec des salaires décents avant l'épidémie n'ont jamais fait appel à l'aide sociale. Beaucoup vont se retrouver avec très peu d'argent", explique à l'AFP Louisa McGeehan, une responsable de l'association Child Poverty Action Group.

Avec aussi le risque que nombre d'entre eux se retrouvent sans toit. Contrairement à la crise de 2008, le gouvernement a pris le taureau par les cornes et dépense des milliards de livres pour éviter les licenciements et revaloriser le crédit universel. Un adulte de plus de 25 ans pourra recevoir 1 000 livres de plus par an, soit une allocation mensuelle qui passera de 320 à 400 livres, mais en dessous du seuil de pauvreté qui se situe autour de 600 livres.

Des millions de Britanniques pourraient avoir du mal à se nourrir et les banques alimentaires font face à "des défis sans précédent", a averti le Trussell Trust, qui en gère 1 200 à travers le pays. Un phénomène qu'on retrouve aux Etats-Unis par exemple, où près de 10 millions de personnes viennent de s'inscrire au chômage.
 

L'arrêt de l'école prive les enfants les plus démunis d'un repas chaud au moins une fois par jour 


Au Royaume-Uni, 30% des enfants, toujours parmi les plus populations les plus vulnérables, vivent dans la pauvreté soit 4,2 millions. La fermeture des écoles les prive pour beaucoup d'un repas gratuit le midi, et d'un endroit où ils sont "au chaud et en sécurité", remarque Amanda Martin, présidente du principal syndicat de l'éducation, National Education Union (NEU), interrogée
par l'AFP.
 

Elle propose en ce moment dans son école de Portsmouth (sud de l'Angleterre) des paniers-repas que les enfants encore scolarisés, des familles les plus démunies, peuvent récupérer. Dans le tweet ci-dessus, elle demande aussi la suspension des dettes, sans intérêts supplémentaires et des aides pour payer loyers et fractures pour les familles les plus en difficulté. 


"Nombre de familles n'ont pas internet ou d'ordinateurs" ce qui empêche de suivre les cours en ligne, relève aussi Mme McGeehan. Ce qui aggrave les inégalités pré-existantes. La décennie d'austérité après la crise financière de 2008 a porté un coup très dur, entre baisse des salaires et gel des aides sociales entre 2016 et 2020. Si le marché de l'emploi semble solide avec un taux de chômage très faible jusqu'à présent, il repose sur la précarité avec les fameux contrats "zéro heure", qui ne garantissent aucun minimum horaire. "Le risque de pauvreté est particulièrement élevé dans des secteurs comme la restauration et les commerces où les salaires sont bas et le travail précaire", selon M. Innes.
 

Entre manger, se vêtir ou payer le loyer, beaucoup doivent choisir 



La pandémie pourrait frapper fort dans les régions défavorisées du centre et du nord de l'Angleterre, et à Londres où "des familles doivent faire des économies sur la nourriture ou l'habillement des enfants pour payer les loyers" souvent astronomiques, souligne Mme McGeehan. Si elle salue les mesures du gouvernement, elle estime qu'une augmentation des allocations familiales "serait beaucoup plus efficace contre la pauvreté infantile".

Cette épidémie pourrait laisser des traces, surtout si le gouvernement revient sur les mesures d'aide dès la crise sanitaire terminée, alors qu'il est difficile pour un pays de se relancer après une telle dégringolade économique, fait encore valoir Mme McGeehan.  Or, ceux qui avaient déjà du mal à joindre les deux bouts, conclut M. Innes, "sont les premières victimes en cas de grande récession".

 
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