Les avocats se mobilisent encore une fois dans toute la France. En cause, toujours, la réforme de la carte judiciaire qui est présentée ce mercredi au Conseil d'État.
La ministre de la Justice Nicole Belloubet marche sur des œufs : la réforme de la carte judiciaire, qu'elle présente ce mercredi au Conseil d'État, hérisse les avocats de toute la France, et les journées "Justice morte" qui s'organisent en réaction n'ont pas épargné le Nord et le Pas-de-Calais.
Le barreau de Lille, notamment (1300 avocats) a voté à l'unanimité la grève générale. De nombreux avocats de toute la région s'étaient d'ailleurs réunis devant la préfecture du Nord pour transmettre leurs doléances à l'État.
Aujourd’hui mercredi 21 mars, journée #justicemorte.
— les Avocats d'Arras (@avocatsarras) 21 mars 2018
Le Bâtonnier de l’Ordre des #Avocats d’#Arras sera ce midi à la Préfecture de Région à Lille avec tous les Bâtonniers de #HautsdeFrance pour porter l'unanimité du Barreau contre le #PJLjustice
"Nous nous opposons à ce projet tel qu'il est établi aujourd'hui, en premier lieu pour dénoncer l'absence de concertation" regrette Xavier Peres, avocat au barreau de Beauvais et président de la conférence régionale des bâtonniers des Hauts-de-France.
On nous parle du juge de proximité, mais en fait on remplace le juge par un ordinateur, par un écran
Parmi les menaces,"nous déplorons des perspectives qui permettent notamment d'envisager la disparition du juge de l'instruction, de faire en sorte que les enquêtes soient exclusivement sous le contrôle du parquet et que le justiciable ne soit plus assisté d'avocat, ce projet de loi est sur ce point très inquiétant."
Surtout, "nous dénonçons également l'éloignement à terme du justiciable par rapport au juge. On nous parle du juge de proximité, mais en fait on remplace le juge par un ordinateur, par un écran".
Il n'y a pas qu'à Lille que les avocats étaient mobilisés. Le barreau de Saint-Omer s'est manifesté à sa manière en publiant sur le site Le Bon Coin une annonce pour la vente du tribunal : 50 pièces, 3000 m² "geôles tout confort", "accueil entièrement numérique, déshumanisé et robotisé (après la réforme...)" et surtout, un "personnel dévoué disponible pour une reconversion professionnelle". Un humour grinçant en écho aux menaces qui pèsent sur le petit tribunal.
À Avesnes-sur-Helpe, où le gros de la mobilisation est prévu jeudi, un avocat nous a d'ailleurs confié mardi son désarroi face à la réforme qui s'annonce.
Si on supprime les juridictions, les avocats de fait disparaîtront
"Cela veut dire que nous allons un jour ou l'autre, les 35 avocats du barreau d'Avesnes-sur-Helpe, devoir quitter la région. Pour aller où ? À Valenciennes ? À Lille ?" interroge Jean-Raphaël Doyer. "Bien sûr, qu'il y a des craintes."
"Nous sommes des auxiliaires de justice, nous participons au service public de la justice. Mais notre rôle est extrêmement dépendant des juridictions elles-mêmes. Si on supprime les juridictions, les avocats de fait disparaîtront. Économiquement, c'est évident."
Sur France 2, la Garde des Sceaux Nicole Belloubet a répliqué que "les avocats ont été très impliqués dès le départ", rappelant ses "lignes rouges : les objectifs du texte, une justice plus rapide, une justice plus proche".
Dans les tribunaux qui se mobilisent, cette semaine, les audiences sont reportées jusqu'à nouvel ordre. Par ailleurs, un avocat a créé une carte de tous les barreaux en "Justice morte".