Les marins de la Scop SeaFrance, qui bloquent depuis lundi le port de Calais, ont étendu mardi leur action à d'autres points névralgiques du trafic transmanche, notamment en bloquant à nouveau le tunnel sous la Manche et les Eurostar.
Pendant près de deux heures, une trentaine de marins ont bloqué le trafic du tunnel, certains d'entre eux brûlant des tas de pneus sur les voies où ils ont également déposé des plaques de béton, à quelques centaines de mètres à peine de l'entrée du tunnel. Un peu avant 15H00, les policiers ont interpellé cinq manifestants et emmené une vingtaine de leurs collègues, dans le calme, pour des "contrôles d'identité", selon Eric Vercoutre, secrétaire général du Syndicat Maritime Nord, ultra majoritaire au sein de la société coopérative SeaFrance, qui exploite MyFerryLink.
Plainte d'Eurotunnel
Le trafic des Eurostar restait cependant interrompu "jusqu'à nouvel ordre", selon un communiqué d'Eurostar diffusé peu après, alors que les pompiers et les employés d'Eurotunnel remettaient les voies en état, une semaine après un premier blocage par les marins. Eurotunnel a également indiqué que le trafic était interrompu "depuis 14 heures". "Le groupe va porter plainte au pénal avec constitution de partie civile pour mise en danger de la vie d'autrui", en raison de l'intrusion des marins en colère sur ce site, a indiqué à l'AFP un porte-parole du groupe.Dans un autre communiqué, le préfet de la zone de défense et de sécurité Nord a lui invité "tous les transporteurs français et étrangers à reporter leur arrivée sur le Dunkerquois et le Calaisis". Mardi dans le même temps, d'autres marins de la Scop ont entamé une opération escargot sur l'A16 en direction du port de Loon-plage, avec pour objectif avoué d'aller bloquer les navires de DFDS, une action décidée dans la matinée en assemblée
générale par quelque 350 personnes, selon Eric Vercoutre.
P&O victime collatérale
"Nos passagers sont involontairement impliqués au coeur d'une bataille initiée par Eurotunnel, qui a vendu ses ferries à une compagnie concurrente sans préserver les emplois concernés", déplorait dans un communiqué Helen Deeble, directrice générale de P&O Ferries. "Il en résulte que des milliers de vacanciers et de routiers sont bloqués sans solution et équipements adaptés", a-t-elle ajouté, craignant également pour les milliers d'emplois de sa compagnie."Il y a beaucoup de véhicules en attente", avait rapporté dans la matinée une porte-parole de cette compagnie, précisant que la situation était particulièrement tendue à Douvres, côté anglais où de nombreux passagers devaient être redirigés vers d'autres destinations que Calais, comme le port de Dunkerque, par exemple.
Si les blocages devaient perdurer, la situation deviendrait encore plus difficile à gérer, le trafic des poids lourds étant traditionnellement beaucoup plus important en milieu de semaine, créant des bouchons propices à de nombreuses tentatives de passage des migrants vers l'Angleterre en s'introduisant dans les camions à l'arrêt. Mardi matin, plusieurs migrants se sont introduits sur le site sécurisé d'Eurotunnel. Selon une source proche du dossier, ce sont même plusieurs centaines de migrants qui ont tenté de s'introduire sur le site, seuls quelques-uns parvenant à leurs fins, avant d'être interceptés pour la plupart par les forces de l'ordre.
Eurotunnel avait annoncé la semaine dernière avoir signé avec le transporteur danois DFDS un contrat de location, avec option d'achat en 2017, de deux de ses trois navires (le Rodin et le Berlioz) à compter du 2 juillet. Les administrateurs de la Scop SeaFrance jugeaient que le préavis concernant les
contrats d'affrètement était trop court et réclamaient un délai supplémentaire, mais ils ont essuyé lundi un refus du tribunal. Le 24 juin, la compagnie maritime danoise DFDS Seaways avait annoncé garder 202 des quelque 600 employés de la Scop SeaFrance dans son projet de reprise de deux
des trois bateaux de MyFerryLink. Le troisième, employant 120 personnes, serait conservé par Eurotunnel pour le transport de fret.