DOSSIER. Terres agricoles grignotées par les villes : la situation devient alarmante dans la région

Les villes ne cessent de s'étendre. Chaque année dans le Nord et le Pas-de-Calais, 900 hectares de terres agricoles disparaissent. Les prix des terres cultivables grimpent en flèche et les jeunes agriculteurs n'ont plus les moyens de s'installer.

Édouard Roussez a 21 ans. Aujourd'hui, il est salarié à mi-temps sur l'exploitation familiale. Mais il rêve de s'installer à son compte.

Il le sait bien, ce sera difficile. Ses parents sont jeunes et ne peuvent lui céder des terres. Et sur le secteur, il n'est pas le seul à chercher quelques hectares pour se lancer.

"J'aime mon métier, je veux vivre de mon métier", explique le jeune agriculteur. "L'idéal, ce serait une demi-SMI [surface minimum d'installation], une dizaine d'hectares, pour pouvoir ensuite développer l'élevage et être en auto-suffisance alimentaire."


Partout, la surface dédiée à l'agriculture s'amenuise. Dans le Nord et le Pas-de-Calais, ce sont 900 hectares de terres agricoles qui disparaissent chaque année. Cela représente 1 200 terrains de football.

L'équivalent d'une quinzaine d'exploitations qui ne sont pas reprises ou créées. Car les villes ne cessent de s'étendre. 

Perte de terres fertiles

À Hazebrouck par exemple, une zone commerciale a été bâtie sur des terres agricoles. Ouverte il y a quelques mois, elle a permis la création de dizaines d'emplois.

Les agriculteurs du secteur dénoncent, eux, la perte inutile de terres fertiles. "Ici, il y a deux ans, on avait un corps de ferme et une exploitation agricole", se rappelle Simon Ammeux, le président des Jeunes agriculteurs du Nord et du Pas-de-Calais.


"Si on avait pu densifier toutes ces constructions, ça aurait été un peu plus intelligent. Ici, on a des constructions qui sont sur un seul étage", poursuit-il. "Des parkins qui sont à même la terre. On n'est pas en souterrain, on aurait aussi pu avoir des parkings sur plusieurs étages comme ça peut se faire dans d'autres pays.

Ici, on a consommé de l'espace… On y a été gaiement !


Rogner des terres agricoles, le maire de Comines a du mal à s'y résoudre. Alors, il tente d'exploiter les anciennes friches, les espaces encore disponibles en ville.

Mais sur le millier de logements actuellement en construction, la moitié sera tout de même bâtie sur des terres prises aux agriculteurs.

"Sur la commune, j'ai 450 demandes de logements locatifs. Plus des gens qui veulent construire, des couples qui se marient et qui ne peuvent pas se loger ici puisqu'on n'a plus de logements", précise le maire Alain Detournay.

Il faut ménager les agriculteurs parce que c'est leur outil de travail. Donc c'est vraiment un dilemme.

 

Triplement des prix en 15 ans

Des terres cultivables de plus en plus rares et précieuses. Les propriétaires vendent moins facilement car elles rapportent. Et puis, les agriculteurs belges font grimper les prix en les louant.

C'est dans le Cambrésis que les terres sont les plus chères. Les prix ont triplé en 15 ans, atteignant plus de 16 000 euros l'hectare.


La Société d’aménagement foncier et d’établissement rural (Safer), qui régule le foncier agricole, fait ce qu'elle peut pour limiter cette hausse. "On évite les excès. C'est-à-dire que quand ça vaut 15 000 euros l'hectare et que c'est vendu à 30 000 euros, là on intervient", détaille Dominique Fosse, directeur opérationnel de la Safer Nord Pas-de-Calais.

Maintenant, quand on passe de 18 000 à 20 000 euros, si on essaye de bloquer les choses, on va provoquer des dessous de table. On accompagne le marché, on bloque les excès, mais c'est tout.

La tendance est à la hausse, donc si ça doit continuer, ça continuera.


Dans la région, quand la Safer réussit à acquérir des terres, elle a en moyenne 17 candidats au rachat. La moitié d'entre eux sont de jeunes agriculteurs qui, comme Édouard, ambitionnent de créer leur affaire.

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