Au moins quatre migrants de la même famille, dont deux enfants, ont trouvé la mort mardi 27 octobre au large de Dunkerque en voulant traverser la Manche pour rejoindre les côtes anglaises. 3 autres migrants, dont un nourrisson appartenant à la famille décimée, sont toujours portés disparus.
Ce naufrage est le plus grave drame migratoire survenu dans la Manche. Au moins quatre migrants de la même famille, dont deux enfants, ont trouvé la mort en tentant de rejoindre les côtes anglaises.
Trois autres sont portés disparus, parmi lesquels un nourrisson de 15 mois appartenant à la famille décimée dans ce drame. Il n'y a plus aucune chance de les retrouver vivants. Une enquête, ouverte sous l’autorité du procureur de la République de Dunkerque, doit déterminer les causes de ce drame. On fait le point.
Que s’est-il passé ?
Mardi 27 octobre, il est environ 9h30 lorsqu’un plaisancier anglais évoluant au large de Dunkerque donne l’alerte : un bateau de pêche-promenade rigide et à moteur vient de se retourner et commence à couler. À son bord, une vingtaine de migrants.Premier bilan : les secours retrouvent 19 migrants dont un homme d’une trentaine d’années déclaré décédé sur place et trois autres - une femme et deux enfants, âgés de 6 et 8 ans - en arrêt cardio-respiratoire. Ils décéderont quelques heures plus tard. Les quinze autres migrants, en hypothermie, sont transférés dans les hôpitaux de Calais et Dunkerque.Parallèlement, une opération de secours d’envergure est déployée pour retrouver d'éventuels disparus : six embarcations et trois moyens aériens quadrillent la zone toute la journée, en vain. Les recherches, stoppées à 18 heures à cause de la tombée de la nuit et de la visibilité réduite, n’ont pas reprises ce mercredi nous indique la Préfecture Maritime de la Manche.
Qui étaient ces migrants ?
D’après les premiers éléments de l’enquête, il y avait 22 migrants sur le bateau, d’origine Iranienne ou Irakienne, qui auraient été conduits du camp de Grande-Synthe jusqu’à Loon-Plage par des passeurs.Selon des témoignages récoltés lors des auditions des quatorze des quinze migrants menées ce jour – l’un est toujours à l’hôpital, son état de santé ne permettant pas de l’entendre – les victimes décédées font toutes parties de la même famille. Les victimes se seraient "retrouvées dans la cabine" au moment du naufrage.
Ce jeudi, le procureur de la République de Dunkerque Sébastien Pièvre a confirmé ces informations. L'homme avait 35 ans, son épouse 32 ans. Les deux enfants décédés, une fille âgée de 8 ans et un garçon âgé de 6 ans, avaient également un petit frère âgé d'un an. Il fait partie des trois personnes disparues, avec deux hommes dont l'identité n'a pour l'heure pas pu être établie.La famille était originaire de Sardasht, dans l'ouest de l'Iran. Le frère du père de famille décédé a témoigné sur BBC, expliquant que la famille avait "payé beaucoup d'argent" pour rejoinde le Royaume-Uni.
Quelle enquête ?
Pour l'heure, les corps des trois migrants disparus -deux hommes et un nourrisson- n'ont pas été retrouvés. Ce mercredi 28 octobre, quatorze migrants présents sur le bateau ont été entendus afin d’identifier les potentiels responsables dont le pilote. "Ces 14 migrants, tous majeurs ou adolescents âgés de plus de 16 ans, ont été pris en charge par la police aux frontières" et placés en garde à vue "comme habituellement pour ce type d'infraction" précise le procureur.D’après les premiers éléments de l’enquête, le bateau aurait navigué une quarantaine de minutes avant de se retourner en raison du mauvais temps. "Tous n’auraient pas eu de gilet de sauvetage" précise le procureur de Dunkerque. L’objectif désormais étant d’identifier les passeurs, en particulier le conducteur du bateau."Il s'agit d'établir s'ils sont des victimes ou des passeurs (...) et d'identifier de possibles mis en cause, en particulier le conducteur de ce bateau."
Réactions en cascade
Dans un post facebook, l’association L’auberge des Migrants exprime sa tristesse face à "ces vies perdues dans l’espoir d’une vie plus sure", sa honte car la France "n’a pas su les accueillir" et sa colère car "le gouvernement va juste accuser les passeurs." Un rassemblement en hommage aux victimes est prévu ce mercredi à 18h30, parc Richelieu à Calais.Marlène Schiappa, ministre déléguée à la Citoyenneté a exprimé sur twitter sa "grande tristesse", assurant que l'Etat français est pleinement mobilisé "pour éviter que de tels drames se produisent.""Oui, les passeurs sont des criminels, mais ce sont les autorités françaises et britanniques qui sont responsables. Bloquer la frontière, c'est créer du business pour les passeurs. La bloquer plus, c'est faire augmenter les tarifs des passeurs."
"Mes pensées vont aux proches de ceux qui ont tragiquement perdu la vie dans la Manche aujourd'hui" a déclaré Boris Johnson, Premier ministre britannique, affirmant que le Royaume-Uni a offert tout son soutien aux autorités françaises dans leur enquête, avant de conclure que "nous ferons tout notre possible pour réprimer les passeurs qui s'attaquent aux personnes vulnérables en facilitant ces voyages dangereux."
Ce naufrage, le plus grave drame migratoire survenu dans la Manche, porte à sept le nombre de migrants morts dans ces eaux et 3 disparus en 2020 : en mai, un homme est décédé et a été retrouvé dans le port de Calais. Le 19 août, le corps sans vie d'un migrant de 19 ans est retrouvé sur la plage de Sangatte. Deux mois plus tard, un homme de 28 ans est découvert sur la même plage après le naufrage de son embarcation de fortune.Les tentatives de traversées se multiplient malgré les dangers. Depuis le début de l'année 2020, 7891 migrants y ont tenté leur chance, selon les chiffres officiels.My statement on those who tragically lost their lives in the Channel today. pic.twitter.com/W7zT5NKINr
— Boris Johnson (@BorisJohnson) October 27, 2020