Le 1er juin 1940, John Atkins, marin britannique, meurt au cours de l'Opération Dynamo, dans le naufrage de la barge à bord de laquelle il avait embarqué. 84 ans plus tard, sa nièce vient à Dunkerque découvrir des objets retrouvés dans l'épave de sa barge.
"It's amazing, it's so amazing", Sandra Wood ne peut retenir ses larmes en découvrant les objets remontés de l'épave de la barge du Lady Rosebery : un vieux flacon de parfum, une assiette de porcelaine anglaise, un robinet, un filtre à air, une brique. Mais elle se dirige immédiatement vers l'assiette de porcelaine bleue. "J'ai la même à la maison. Elle me vient de ma grand-mère, la mère de John !".
John, c'est John Atkins, cet oncle disparu lors de l'opération Dynamo et qu'elle n'a jamais connu. Ces vestiges rongés par la mer la relient à son ancêtre. Elle les caresse et les retourne dans tous les sens, comme s'ils renfermaient l'âme de son oncle, comme si elle pouvait communiquer avec lui à travers eux.
La plus jeune victime britannique de l'opération Dynamo
John Atkins est un jeune britannique, originaire du Kent. Il n'a que 15 ans lorsqu'il embarque sur le Lady Rosebery, une des nombreuses barges utilisées pendant l'opération Dynamo du 26 mai au 3 juin 1940 pour évacuer de Dunkerque vers l'Angleterre près de 350 000 soldats alliés. Mais le 1er juin 1940, l'explosion d'une mine fait couler la barge non loin de Dunkerque. John Atkins fait partie des nombreuses victimes mais son corps n'est jamais retrouvé.
Il faut attendre 2006, pour qu'un groupe de plongeurs dunkerquois découvre l'épave gisant par 28 mètres de fond, à 1 kilomètre au large de Dunkerque, parmi eux : Bruno Pruvost, passionné d'histoire. Mais alors qu'il essaie de replonger dessus, quelques jours plus tard, il ne la retrouve plus. Ce n'est qu’en 2019 que l'épave est à nouveau repérée. Quelques objets sont remontés à la surface et conservés dans les réserves du musée de l'Opération Dynamo à Dunkerque.
Mais l'histoire ne s'arrête pas là. Bruno Pruvost est contacté par Sandra Wood, la nièce de John Atkins qui a entendu parler de ses recherches grâce à un site internet britannique. Commencent alors cinq ans d'échanges par mail qui se concrétisent enfin il y a quelques jours par une visite à Dunkerque.
Quand elle arrive ce 31 mai aux portes du musée "Dunkerque 1940", accompagnée de son époux et de ses deux fils, Sandra Wood se précipite vers Bruno Pruvost et le serre dans ses bras comme si elle le retrouvait après de longues années de séparation. Pourtant, c'est leur première rencontre. Elle ne parle pas le français, Bruno ne comprend pas l'anglais. Mais l'histoire de John Atkins est le fil qui les lie.
La petite histoire dans la grande
Des larmes coulent sur les joues de la vieille dame. "Thank you, thank you" , lui adresse-t-elle très émue. "Je vous suis si reconnaissante pour tout cela. Grâce à vous, l'histoire de John continue à vivre. Je n’ai jamais connu John. J’ai vécu avec ma grand-mère, sa maman, et on parlait toujours de lui. Il y avait ses photos un peu partout à la maison. Et à chaque armistice, à chaque anniversaire, on le célébrait, même quand j’étais petite. Ma grand-mère me racontait beaucoup d'histoires sur lui."
"Nous prenons le large vers Dunkerque. Nous ne reviendrons peut-être jamais. Ne t'inquiète pas".
John Atkins, 1940
Son fils, Mattew, sort de sa poche la copie d'une lettre, probablement la dernière envoyée par John Atkins à sa mère. "Nous prenons le large vers Dunkerque. Nous ne reviendrons peut-être jamais. Ne t'inquiète pas".
"C'est pour des moments comme ceux-là que je plonge" précise Bruno Pruvost. "Certains explorent les fonds sous-marins pour découvrir la faune, la flore. Moi c'est pour l'histoire. La petite histoire dans la grande : c'est cela qui m'intéresse."
Sandra Wood conserve encore des classeurs entiers remplis de lettres de son oncle. Elle espère pouvoir revenir l'an prochain à Dunkerque, à l'occasion du 85 ème anniversaire de l'opération Dynamo. Elle aimerait que tous ces documents puissent être conservés dans le musée. Une manière de perpétuer la mémoire de son oncle.