Idée sortie week-end en Nord-Pas-de-Calais. Seule en scène, Lilia Benchabane l'autodérision comme exutoire

Le parcours personnel de cette Douaisienne de 26 ans colore son premier spectacle. Un Seule en scène d’1h15 pour dépoussiérer le regard sur le handicap. Attention… méchant talent en vue.

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Au premier regard, la paresse invite au jugement de l’apparence. Un aspect esthétique devenu depuis deux ans son fond de commerce, soir après soir. « Mes interlocuteurs s’y intéressent immédiatement. Même si ça ne me définit pas, c’était un peu mon avantage. Je m’en sers pour faire rire les autres », indique avec malice Lilia Benchabane.

L'art de l'auto-décision

La native de Fréjus, installée à Douai depuis sa tendre enfance, est une humoriste au grain singulier : celui de l’auto-dérision. Sa proie préférée : elle-même. Son signe particulier : Lilia Benchabane est albinos oculo-cutanée. Les cheveux et sourcils sont blonds, les pupilles très claires. Et sa peau vierge de pigmentation. « Ce défaut génétique a été détecté à la naissance. Quand on est maghrébin et qu’on sort une blonde à la peau claire… mes parents ont tout de suite compris qu’il y avait un problème », ironise-t-elle.

Après des premières « blagues » essuyées au collège, Lilia Benchabane cultive ce goût pour l’autodérision à l’adolescence. Une nécessité pour apaiser son mal-être. « J’ai un côté renfermé. J’étais très agressive. Après avoir rencontré ma bande de potes en Terminale au lycée Arthur Rimbaud de Sin le Noble, je découvre l’autodérision. Et j’autorise les autres à en faire », concède-t-elle. C’est là qu’arrive l’intérêt pour l’humour : « je me dis que si je peux faire rire mes potes, je peux faire rire le public. »

Le Café-Théâtre scène de sa libération

Une fois validé son master en Economie de l’Université de Lille – un « impératif pour mes parents », Lilia Benchabane se lance dans l’écriture de son tout premier Seule en scène. « En fait, aucun de mes proches n’était au courant de ma seconde vie », avoue la Lilloise d’adoption. Désireuse de se confronter au regard des spectateurs de salles spécialisées, Lilia Benchabane multiplie les séjours chez sa « Tata parisienne » avec une idée : se produire dans des cafés-théâtres. Chose faite en 2019 au mythique Labo du Rire, la scène des humoristes débutants du Paname Comedy Club. « Je décide d’y aller sans dire un mot à personne. J’avais 20 ans. Je crois que j’ai eu 1 ou 2 rires. Je me dis sur 5 minutes, ça va. C’était ma petite vie d’agente secrète ».

Au bout d’un an de plaisirs scéniques, la découverte de son activité parallèle par une amie de sa Tante ralentira un temps son ascension. « Ma mère était vraiment contre. Je suis issu d’une famille où la réussite professionnelle est un incontournable. Pour elle, c’était 'Deviens Cadre comme prévu. Tu ne peux pas te lancer dans une activité instable alors que tu es malvoyante ». Une des nombreuses anecdotes familiales contées dans son livre Ma vie est un Blind Test (Éditions Solar). 

Tantôt attirée par la production d’une thèse sur « l’entrepreneuriat durable et la jeunesse », tantôt éreintée par les desiderata de sa famille (« Humoriste… Trouve-toi un vrai métier ma fille »), Lilia Benchabane fait de l’humour son exutoire. Après ces premiers pas réussis, un accord est trouvé avec ses parents : terminer ses études avant de se lancer dans l’humour. À 100%. « Nous sommes cinq frères et sœurs et je suis la seule de la famille à baigner dans ce secteur, précise-t-elle. Ma grande sœur est en Management et Marketing. Et la petite sœur en Psychologie. Obtenir ce master en économie était la moindre des choses ».

Le talent fera le reste. Une prestation remarquée au prestigieux Lillarious Montreux Festival, un triomphe au Tarmac – une émission produite par la RTBF – avec 10 millions de partages de sa vidéo en moins d’un mois ; et une résidence hebdomadaire obtenue depuis un an au Théâtre du Marais, « après sept mois dans La Petite Loge avec 25 places assises. Une expérience très enrichissante mais c’est beaucoup plus simple de faire rire 500 personnes : le rire est contagieux ».

Un succès sur les planches, agrémenté d’une présence dans la Bande Originale sur l’antenne de France Inter. « Un dimanche vers 23h, je reçois un message WhatsApp de Nagui. Il me propose de réaliser une chronique hebdomadaire pour la saison 2022-2023. J’ai mis cinq heures avant de comprendre que ce n’était pas une blague ! ». Sa première à l’antenne « face à tous ces micros rouges » fut un moment stressant et compliqué. « J’ai développé des méthodes de travail : la rigueur dans l’écriture et l’adaptation à son auditoire ». Un lâcher prise essentiel dans une vie méchamment colorée par l’ivresse de réussir.

« Attention ! Handicapée Méchante » - De Lilia Benchabane

Ce vendredi 16 février 2024 à 20h à Noyelles-sous-Lens et en tournée dans toute la France.

23/02 Lille ; 16/03 Marcq-en-Baroeul ; 27/04 Lille

Florent A. MOTEY

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