Crainte de déranger, ou d'être contaminé... La réticence des malades à se rendre aux urgences pousse personnel soignant à appréhender une "troisième vague" de patients qui ne seraient pas atteints du Covid-19.
C'est l'un des effets pervers, et a priori paradoxaux, de la crise du coronavirus : dans certains hôpitaux, les urgences sont quasi désertes. À Lille, on voit ainsi trois fois moins de patients qu'avant la crise, avec un silence inhabituel.
"Ça fait pratiquement 11 ans que je suis aux urgences, c'est la première fois qu'on a si peu de patients", confie-t-on à l'accueil. "Habituellement on n'a pas le temps de regrader nos écrans !"
Car pendant qu'une partie de l'hôpital doit gérer le flux de patients atteints du Covid-19, l'autre partie reste vide, à tel point que des services ont dû fermer temporairement, faute de patients.
Pourtant, les services sont bien cloisonnés entre eux. "Ici, vous avez des patients Covid avec tout le matériel pour, et là on a parfaitement cloisonné ce service, où normalement où on est très libre d'espace", explique-t-on. "On a même été obligé de séparer en deux les pharmacies."
Vers une troisième vague, non-liée au Covid-19 ?
Malgré ce dispositif, de nombreux patients rechignent à venir, ce qui risque d'amener à une troisième vague. "La troisième vague, ce sont des patients qui n'ont pas souffert du Covid, mais qui sont porteurs de pathologie chroniques, pour lesquelles ils n'ont plus de suivi !" craint le Pr. Patrick Goldstein, chef du service des urgences à Lille.
"Ils vont venir, et ils seront beaucoup plus graves, avec les pathologies qui seront fixés. On ne sera plus au stade de 'Je traite', on sera au stade de 'Comment je traite la séquelle' ?" poursuit-il.
Jeudi, un cardiologue avait également averti sur le fait que l'on constatait une diminution de 50% à 80% de prise en charge de patients atteints d'infarctus du myocarde. Un signe probable d'une "autocensure des patients", qui pourrait s'avérer dramatique.