Mediapart révèle qu'un Lillois aurait été infiltré dans un réseau de vente d'armes entre la Slovaquie et le Nord, à destination de groupes terroristes. Il était alors en contact avec un commissaire, qui affirme avoir transmis les infos à la PJ de Lille dès 2014.
Dans une longue enquête publiée sur le site d'information Mediapart, le journaliste Karl Laske revient sur la vente d'armes en lien avec les attentats du 7 et 9 janvier 2015. Et s'arrête longuement sur le profil d'un Lillois, arrêté en 2015 en République Tchèque alors qu'il revenait de Slovaquie le coffre rempli d'armes.
Christophe Dubroeuq, 51 ans, est appelé "Monstro". Il affirme avoir été un indic' de Philippe Patisson, ancien patron du SDIG (Service départemental de l'information générale, ex-Renseignements généraux) du Nord, aujourd'hui responsable français du Centre de coordination policière et douanière (CCPD) de Tournai. Entre 2008 et 2011, alors que Patisson est au SDIG, Dubroeuq devient donc son informateur, explique le journaliste dans son enquête.
Le Lillois ajoute qu'il a alors infiltré un groupe d'extrémistes. "Je suis remonté jusqu’à une personne qui a vendu des armes en Belgique, dans la ville de Charleroi. Ils possédaient un magasin sur Internet et j’ai réussi à le faire fermer" explique Christophe Debroeuq lors d'un interrogatoire dont Mediapart a pu récupérer le compte-rendu. Puis, il est arrêté en République tchèque pour avoir ramené des armes de Slovaquie.
Une faille dans la police ?
Ce qui est intéressant, c'est que Christophe Dubroeuq ajoute que les armes ayant servi à Coulibali étaient elles-aussi d'origine slovaque... et que la PJ avaient tous ces éléments en sa possession avant même les attentats des 7 et 9 janvier 2015. En effet, Philippe Patisson avoue lui-même avoir immédiatement transmis toutes les infos à l’un des patrons de la PJ lilloise.Lorsque Christophe Dubroeuq, que Philippe Patisson appelle "Tof", lui parle des armes slovaques, il explique avoir averti ses collègues. "C’étaient des infos importantes et suffisamment précises, avec des heures, des dates d’arrivées, de livraison. Je suis allé voir l’un des patrons de la PJ à Lille, Guy Zapata, dans son bureau. Nous étions trois. Et j’ai donné ces éléments. Quand “Tof” m’a donné ces infos, moi j’ai balancé tout de suite. Mais leur traitement et la stratégie adoptée, je les ignore", précise le commissaire à Médiapart.
Gendarmerie et PJ ont bien surveillé ou infiltré les réseaux qui ont fourni des armes aux terroristes de janv 2015 https://t.co/POtuDKnsm6
— Karl Laske (@karl_laske) 12 mars 2017
L'ombre de Claude Hermant
Le groupe d'extrémistes que Christophe Dubroeuq explique avoir infiltré est intimement lié à Claude Hermant, figure de l'extrème droite du Nord et également informateur auprès de la PJ. L'homme, actuellement incarcéré, a avoué que ce sont les armes qu'il a fait importer de Slovaquie qui ont servi à Coulibali en janvier 2015. "Il s’agissait d’armes qui arrivaient des pays de l’Est, qui étaient remilitarisées par l’entourage d’Hermant, précise le commissaire à Médiapart. Il n’a jamais été question de terrorisme".D'après Christophe Dubroeuq, des armes ont été trouvées dans la friterie alors dirigée par Claude Hermant. Des armes "et des documents" indiquant l’adresse de la firme slovaque...
Retrouvez toute l'enquête de Karl Laske pour Médiapart en suivant ce lien.