À l’issue du second tour, Marine Le Pen est arrivée en tête dans les Hauts-de-France avec 52,13% des suffrages. Ces bons scores pour la candidate du Rassemblement national pourraient-ils impacter les élections législatives de juin prochain ?
Les 12 et 19 juin auront lieu l’autre scrutin fondamental de l’année : les législatives. Lors de cette présidentielle, c’est dans les Hauts-de-France que Marine Le Pen a fait ses meilleurs scores. L’Aisne et le Pas-de-Calais sont les deux départements métropolitains ayant le plus plébiscité la candidate du Rassemblement national, avec respectivement 59,91% et 57,49% des suffrages exprimés pour la candidate RN au soir du second tour de la présidentielle.
Depuis 2012, celui qui se revendique comme étant "le premier parti de France", gagne du terrain, jusqu’à faire son nid à l’Assemblée nationale. En 2017, huit députés FN sont élus pour siéger au Palais Bourbon. Un nombre quatre fois plus important que pendant la précédente mandature.
Ainsi, les enjeux pour les prochaines législatives sont importants. Après la déroute des partis historiques à la Présidentielle, le parti de Marine Le Pen espère pouvoir enfin former un groupe parlementaire (19 députés élus) à l’Assemblée nationale. Pour cela, il faudra surpasser les scores des Républicains, de la France Insoumise ou de LREM dans certaines circonscriptions.
La droite modérée, bien ancrée localement
Un défi pas si simple pour le Rassemblement national : "Le casting reste solide chez les partis traditionnels, qui profitent toujours d’un ancrage puissant, surtout à droite., analyse Mickaël Guiho, journaliste politique à France 3 Picardie, C’est plus compliqué pour le RN. En 2017, il n’a remporté que 5 circonscriptions dans les Hauts-de-France, alors que Marine Le Pen avait déjà explosé les scores. Même l’an dernier, aux régionales, son candidat Sébastien Chenu a été sèchement battu".
On aurait tort d’enterrer les Républicains avant juin tant ils disposent encore de figures locales et de jeunes formés pour assurer la relève.
Mickaël Guiho, journaliste politique France 3 Picardie
En 2017, dans les Hauts-de-France, sur les 50 députés élus, 15 ont l'étiquette LR-UDI. Parmi ces figures locales des Républicains : Julien Dive, élu dans l’Aisne et Maxime Minot dans l’Oise, dont l’avenir au sein du parti est incertain. "L’un comme l’autre sont jeunes. Le premier est un proche de Xavier Bertrand. Le second a fait entendre sa différence lors du vote sur la GPA. Vont-ils rester chez les LR ? Vont-ils devenir "Macron-compatibles" après sa réélection et la création d’un gouvernement élargi ? Ou joueront-ils une autre carte, au sein d’une droite républicaine désormais exposée à un pôle "droite nationale" très puissant ?", s’interroge Dominique Malige, journaliste politique à France 3 Picardie.
"Les marcheurs peuvent espérer profiter de cette réélection, mais il n’y aura probablement pas la même vague de blancs-saints signés à des inconnus comme en 2017", rapporte Mickaël Guiho. Agnès Thill, élue dans l’Oise sous l’étiquette LREM, puis exclue du mouvement après des prises de position jugées extrêmes a fini par rejoindre l’UDI. Ses électeurs vont-ils la suivre à nouveau ?
La gauche, en difficulté dans la région
Du côté de la gauche, on le sait, des alliances sont en discussion, sous le leadership de la France Insoumise, arrivée troisième à la Présidentielle. Seulement, "rien ne dit que ceux qui ont voté stratégiquement pour Mélenchon à la présidentielle le feront à nouveau pour son poulain, souvent inconnu, aux législatives. Surtout si le reste de la gauche se réunit autour de figures locales fortes", analyse Mickaël Guiho.
"François Ruffin, député de la Somme siégeant dans le groupe des insoumis et élu à la surprise générale il y a 5 ans, renouvellera-t-il l’exploit ? Échappera-t-il à une éventuelle menace d’une candidature RN face à lui ?", questionne Dominique Malige. Rien n’est moins sûr :
Mélenchon cible (avec succès) le peuple des quartiers, Ruffin veut y ajouter le peuple des campagnes, profondément séduit par Marine Le Pen. Il l’a dit, c’est son défi pour les législatives, prouver que c’est possible. Ce n’est pas dit, parce que ces deux catégories populaires n’ont pas exactement, spontanément du moins, les mêmes aspirations.
Mickaël Guiho, journaliste politique France 3 Picardie
Dans la métropole lilloise, les deux députés insoumis, forts du score de Jean-Luc Mélenchon au premier tour de la présidentielle, devraient rempiler plus facilement. À Lille, plus de 40% des électeurs s’étant déplacés le 10 avril dernier ont glissé un bulletin France insoumise dans l’urne. Bien que pas encore officiellement candidats pour respecter le mode de désignation interne au parti, Adrien Quatennens et Ugo Bernalicis ont toutes les chances d’être réélus.
Autre circonscription qui pourrait être raflée par les insoumis : Roubaix-Wattrelos. Catherine Osson (LREM) y a été élue en 2017 suite au retrait du candidat portant les couleurs de Jean-Luc Mélenchon pour faire barrage à l’extrême-droite. Mais ce scénario pourrait ne pas se reproduire pour les législatives de juin prochain. Avec 52,5% des voix, Jean-Luc Mélenchon est arrivé largement en tête au soir du premier tour, 33 points devant le président sortant. David Guiraud, orateur du parti et candidat FI aux législatives de juin prochain, compte bien remporter la bataille.
Dans le Nord enfin, le député communiste Fabien Roussel devrait se représenter dans la 20ème circonscription. Candidat malheureux du PCF à la présidentielle, le natif de Saint-Amand-les-Eaux n’est pour autant pas assuré de remporter la majorité des voix en juin prochain. "Déjà distancé de 8 points au premier tour de la présidentielle dans sa commune par Marine Le Pen (Fabien Roussel a obtenu 20,7%, la candidate du RN 28,2%, ndlr), le député sortant est réellement menacé dans sa ville", décrypte Jean-Louis Manand, journaliste politique à France 3 Nord Pas-de-Calais.