Gérald Darmanin de Tourcoing au ministère de l'Intérieur

Gérald Darmanin, élu maire de Tourcoing dès le premier tour et rare ministre "politique" expérimenté aux côtés d'Emmanuel Macron malgré son jeune âge, ancien lieutenant de Nicolas Sarkozy devenu "cogneur" de Bercy, se voit récompensé avec sa nomination au ministère de l'Intérieur.

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Juste après son élection en mars dernier, le désormais ex-ministre des Comptes publics avait expliqué vouloir "peser davantage" sur les choix politiques et "continuer à travailler" avec le président de la République.Une sortie interprétée par certains comme une offre de services pour Matignon, même si l'intéressé jurait qu'il était un "soutien loyal et fidèle" d'Edouard Philippe.

L'arrivée de cet ambitieux de 37 ans place Beauvau en remplacement de Christophe Castaner récompense son soutien réitéré au président de la République, après plus de trois ans passés au sein de Bercy.


Avant de rejoindre le "paquebot", Gérald Darmanin était novice en matière budgétaire. Mais il y a imposé sa marque en faisant voter plusieurs textes de loi, comme le droit à l'erreur, ou avec la mise en place d'une brigade d'agents des impôts dotée de pouvoirs de police.Il peut surtout se prévaloir d'avoir mis la fiscalité française au diapason de la plupart des grands pays avancés en faisant prélever l'impôt sur le revenu directement sur la feuille de paie, malgré les fortes réticences d'Emmanuel Macron.
    
"Je suis sociologiquement de gauche et culturellement de droite":
voilà comment se définit l'ancien porte-parole de Nicolas Sarkozy, passé avec armes et bagages chez En Marche après la présidentielle de 2017. Un discours qui trouve pleinement sa place dans le credo présidentiel du "en même temps", avec lequel Gérald Darmanin -- présenté par beaucoup comme le ministre le plus "politique" du gouvernement -- affirme être "très à l'aise", rejetant les accusations d'"opportunisme politique". 
    
Ce petit-fils de tirailleur algérien, né à Valenciennes d'un père tenancier de bar et d'une mère femme de ménage à la Banque de France, a pourtant connu une ascension sinueuse depuis son engagement au RPR à l'âge de 16 ans. Diplômé de Sciences Po Lille, Gérald Darmanin a débuté sa carrière comme collaborateur de Christian Vanneste, exclu en 2012 de l'UMP après des propos considérés comme homophobes, avant de rejoindre Xavier Bertrand, alors secrétaire général du parti. Passé au secrétariat d'Etat chargé des Français de l'étranger et à celui des Sports, il s'est ensuite fait élire député du Nord en 2012, puis maire de Tourcoing en 2014.

C'est aux côtés de Nicolas Sarkozy, dont il devient le porte-parole en vue de la course à la présidence de l'UMP, qu'il se fait cependant remarquer, en raison de ses prises de position en faveur des classes populaires, qu'il défend au nom de ses origines modestes.

Coordinateur de la campagne de Nicolas Sarkozy pour la primaire de la droite en 2016, à l'issue de laquelle ce dernier se fait balayer au premier tour, il finit par abandonner la campagne de François Fillon, en désaccord avec la ligne de LR.
    
Quand Emmanuel Macron remporte la présidentielle en 2017, M. Darmanin acte la rupture avec son ancien parti en rejoignant Edouard Philippe, dont il est proche, au gouvernement. Une décision vécue comme une "trahison" à droite mais que l'intéressé assume crânement. A l'université d'été du Medef l'an dernier, il mettait en garde contre "ceux qui demandent plus de libéralisme" et prennent le risque d'une "situation à l'italienne, d'un pays fracturé".
    
Il a "parfaitement décodé le logiciel En Marche" et s'est fait le chantre d'un programme présidentiel appris "par coeur", abonde un député de la majorité.

Interrogé sur la possibilité pour Gérald Darmanin de cumuler avec la mairie de Tourcoing, l'entourage du chef de l'Etat s'est contenté de répondre que le nouveau ministre avait démissionné dès lundi du conseil régional des Hauts-de-France, en attendant que sa situation sur la mairie de Tourcoing soit "clarifiée".

La plainte pour viol


Mais Gérald Darmanin est promu au sein du gouvernement au moment où la justice a ordonné la reprise des investigations concernant une accusation de viol le visant en 2009. Avant la réouverture de cette enquête, il avait bénéficié d'un non-lieu.
    
Début 2018, il avait en effet été mis en cause par deux femmes, l'une pour viol, l'autre pour abus de faiblesse, en plein mouvement #MeToo -- des accusations qu'il réfute. Si l'enquête se poursuit donc pour l'une d'elle, le parquet a rendu un non-lieu pour l'abus de faiblesse. 

La plainte pour viol visant le nouveau ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin semble évoluer "dans le bon sens" et cette plainte "n'a pas fait obstacle" à la promotion d'un ministre qui "aspirait à plus", a indiqué lundi l'entourage du président."Il semble que les choses vont dans le bon sens", a déclaré cette source sans autre précision. L'Elysée ne fait "jamais de commentaires sur les affaires en cours", a cependant ajouté cette source.

Mi-juin, les avocates de la femme qui accuse Gérald Darmanin de l'avoir violée en 2009 avaient dénoncé le soutien apporté par le gouvernement au ministre. Après deux ans de bataille procédurale, la cour d'appel de Paris avait ordonné début juin la reprise des investigations sur les accusations de viol, harcèlement sexuel et abus de confiance portées contre le ministre par Sophie Patterson-Spatz.
    
Entendu en audition libre le 12 février 2018, M. Darmanin a confirmé avoir eu une relation sexuelle avec Mme Patterson-Spatz, mais selon lui librement consentie et à l'initiative de la plaignante.

Réactions des policiers

 Yves Lefebvre, Unité-SGP-FO: "Il avait les cordons de la bourse comme ministre du Budget. Maintenant qu'il est le premier flic de France, à lui d'aller chercher l'argent pour les policiers, pour l'indemnité du travail de nuit ou la nouvelle bonification indiciaire.Espérons aussi que la décision de la cour d'appel de Paris (qui a ordonné la reprise des investigations concernant une accusation de viol en 2009 à son encontre, ndlr) ne vienne pas entraver son action au ministère de l'Intérieur".

Fabien Vanhemelryck, Alliance: "Le malaise est grand dans les rangs de la police et nous le jugerons sur les actes. Un soutien sans faille est indispensable et l'amélioration des conditions de travail doit être immédiate (matériel, mesures sociales, revalorisation heures de nuit.... ). En espérant qu'il nous rencontre rapidement et qu'un plan Marshall se mette en place dans la foulée. La tâche est grande, le dialogue social se doit d'être constructif et l'obligation de résultat
réel". "Il connaît les comptes publics (...), il devra faire en sorte de débloquer un budget conséquent pour la police s'il souhaite donner un nouvel élan indispensable à l'institution". 


David le Bars, syndicat des commissaires de police: "Au-delà des personnes, j'appelle à la reprise des dossiers de fond, à la continuité des travaux entrepris. Je pense au livre blanc de la sécurité intérieure, qui est à mettre à l'honneur de Christophe Castaner et Laurent Nuñez. Si le nouveau ministre enterre ce qui a demandé un an de travail de fond, ce serait une catastrophe".

Patrice Ribeiro, Synergies officiers: "L'intérêt principal d'un ministre, c'est sa verticalité et son poids politique. Gérald Darmanin était à Bercy, il en connaît tous les rouages. Il a une proximité du président de la République, il a l'oreille et la confiance de celui-ci. C'est un avantage pour
nous. Après, il y a le domaine de l'incarnation, mais c'est de l'impensé. Les semaines à venir s'annoncent difficiles, il faudra qu'il soit solide sur ses appuis. On a un a priori plutôt positif".

"Il a les gènes de la trahison": réactions dans le milieu politique

Le patron des Républicains Christian Jacob a conseillé mardi à Emmanuel Macron de "se méfier" de Gérald Darmanin, transfuge de la droite promu la veille ministre de l'Intérieur, car il a "les gènes de la trahison". Interrogé dans Le Parisien sur l'inflexion à droite que laisse transparaître la composition du nouveau gouvernement emmené par Jean Castex, qui vient de quitter LR, M. Jacob juge dans Le Parisien que "ces ministres sont d'abord des opportunistes".
"Quel lien a Darmanin avec la droite ? Il est adhérent En marche", rétorque-t-il aussi à propos du ministre issu de la droite, rallié en 2017 à Emmanuel Macron et ministre des Comptes publics dans le précédent gouvernement."Si j'étais le président, je m'en méfierais, parce que le ministre de l'Intérieur a les gènes de la trahison! Le président est allé chercher une personnalité ou
deux qui avaient besoin de reconnaissance, c'est tout"
, critique M. Jacob.
    
Guillaume Peltier, numéro deux des Républicains, évacue aussi la question d'un siphonnage de la droite par Emmanuel Macron. "Si la politique se résume à du spectacle, du cynisme, une simple tactique et des stratégies de débauchage individuels, qu'est-ce qu'elle est triste la politique, et c'est celle que mène Emmanuel Macron", a-t-il commenté sur franceinfo.
    
Pour l'ancien ministre Brice Hortefeux, on nous promettait "des prises de guerre, des ralliements, des choses spectaculaires: résultat à l'arrivée, rien, nada". Il a expliqué sur RTL avoir été appelé lundi soir par Gérald Darmanin, proche comme lui de Nicolas Sarkozy: "Je l'ai naturellement félicité, je lui ai souhaité bon courage, parce que la réalité c'est que les clignotants sont au rouge" en matière de sécurité, a-t-il noté.
    
Annie Genevard, vice-présidente LR de l'Assemblée nationale, "récuse", elle, le terme de "gouvernement de droite" au vu du "bilan" de la politique menée jusque-là,
notamment par M. Darmanin: des déficits public et commercial "abyssa(ux), un niveau d'imposition que le gouvernement n'a pas cherché à réduire, et sur le plan régalien des difficultés sans nom".

Xavier Bertrand, que l'on sait opposé à Emmanuel Macron, a néanmoins continué de soutenir son proche Gérald Darmanin, affirmant dans un tweet, qu'il avait les qualités pour assumer cette mission.
L'eurodéputée LR Nadine Morano, elle, veut positiver: "à chaque fois qu'on a besoin
de compétences, c'est chez nous qu'on vient les chercher !
", a-t-elle lancé sur Cnews. Donc "il vaut mieux voter pour LR, avec des personnalités fidèles à leurs convictions plutôt que pour des gens qui retournent leur veste en fonction du vent", dit-elle en évoquant Gérald Darmanin. Elle juge au passage "assez étonnant" de le voir nommé à l'Intérieur alors qu'"il a une affaire en justice".




    
    



 
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