Un an après la publication de Brigitte : histoire d'une contre-enquête, Daniel Bourdon publie un nouvel ouvrage, Brigitte, acte II. L'auteur continue sa contre-enquête à la recherche de celui qui a tué Brigitte Dewèvre en avril 1972. Un crime aujourd'hui prescrit et jamais élucidé.
Il avait douze ans au moment du meurtre de Brigitte Dewèvre et habitait lui aussi Bruay-en-Artois. Daniel Bourdon publie le 26 mars le deuxième tome de son enquête sur l'affaire de Bruay-en-Artois. Treize après la prescription des faits, le romancier, ancien de la police judiciaire, continue à enquêter. Il affirme être sûr à 90% d'avoir découvert qui est l'assassin. Et il est toujours vivant.
- Que s'est-il passé depuis la publication de Brigitte : histoire d'une contre-enquête ? Un événement vous a poussé à écrire un second tome ?
Lorsque je dédicaçais mon premier livre à Béthune, un homme s'est présenté à moi. Il m'a dit qu'il connaissait l'assassin de Bruay et qu'il fallait qu'on se rencontre. En fait, cet homme m'a permis de recueillir le témoignage de sa tante, qui serait l'ex-compagne de l'assassin. J'ai donc fait plusieurs entretiens avec cette dame. Je l'ai rappelée trois fois, je l'ai enregistrée, j'ai recoupé les informations et je les ai fait vérifier par des experts. Tout le monde autour de moi trouve ça crédible. Bien sûr je reste prudent, car il y a la présomption d'innocence.
- L'enquête est prescrite depuis 2005. Qu'est-ce qui fait que vous trouvez plus d'éléments que les enquêteurs qui ont travaillé dessus ?
Je ne suis pas un "super-flic" comme on a pu me présenter parfois. Je suis surtout un ancien Bruaysien. C'est là que j'ai grandi, je connais tous les codes. Je suis un enfant du pays, je n'ai pas de mal à gagner la confiance des gens. Même pour des questions très pratiques, je connais parfaitement la configuration des lieux.
- Comment mène-t-on une enquête sur une affaire prescrite ?
Je joue la carte du flic et la carte de l'auteur en même temps. Ces deux cartes fonctionnent ensemble. Bien sûr, je ne mène pas l'enquête comme l'ont fait les enquêteurs à l'époque. Je peux avancer plus patiemment. Mais je dois également prendre de plus grandes précautions, notamment en rapport avec mon éditeur. Il faut vraiment montrer du respect aux gens dont on parle dans le livre. Ce qui est moins stressant, c'est que je n'ai pas d'obligation de résultat.
- Est-ce que la région et son histoire sociale sont un terreau fertile pour les écrivains ? Récemment, Sorj Chalandon a publié "Le jour d'avant" qui se déroule dans le bassin minier.
C'est vrai qu'il y a une vraie réflexion sur l'histoire sociale. Ce livre c'est pour moi une lettre ouverte aux Bruaysiens pour leur dire qu'on les avait manipulés pendant toutes ces années. Cette affaire a été présentée comme une lutte des classes pendant longtemps.
- Devoir garder le mystère autour de l'identité de l'auteur, est-ce que c'est une frustration de policier ou une satisfaction d'auteur ?
Ça reste une frustration. Je ne révèle pas le nom de l'assassin présumé au nom de la justice. En revanche, j'aimerais faire lire mon livre à cette personne. Je ne sais pas encore comment je vais lui faire parvenir, si je vais lui envoyer. Je ne veux pas révéler son identité, d'ailleurs très peu de gens autour de moi connaissent son nom. Même ma femme ne le connaît pas.
L'affaire de Bruay-en-Artois
C'est l'une des affaires les plus marquantes des cinquante dernières années. Le 6 avril 1972, le corps d’une adolescente de 15 ans est retrouvé dans un terrain vague, à Bruay-en-Artois. Elle a été étranglée puis frappée avec un objet tranchant. Brigitte Dewèvre est la fille d’un mineur.Les premiers soupçons se portent sur un notable de la région, le notaire Pierre Leroy, dont la voiture a été aperçue par un témoin. Il est incarcéré puis libéré faute de preuves. Le drame se transforme en affaire politique, récupéré par les tenants de la lutte des classes. Un camarade de la victime, avouera le meurtre en 1973, mais il sera également innocenté.
L'affaire, non résolue, a été classée en 1981 et le crime prescrit en 2005. La ville a depuis été rebaptisée Bruay-la-Buissière.