Migrants de Calais : la justice ordonne des mesures d'aide, malgré l'Etat

Nouveau rebondissement dans le dossier des migrants de Calais, le tribunal administratif de Lille a ordonné lundi en référé une batterie de mesures d'aide à cette population actuellement livrée au dénuement, tout en écartant la réouverture sur place d'un centre d'accueil d'urgence.

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Sous 10 jours, avec une astreinte de 100 euros par jour de retard, le juge a ainsi exigé des autorités la mise en place de plusieurs points d'eau, de sanitaires et de douches afin d'éviter que les réfugiés errant actuellement dans le Calaisis, entre 400 et 600, ne soient "exposés à des risques de traitements inhumains et dégradants".

Cette décision a été saluée par les défenseurs des droits des migrants, tandis que la maire de Calais a annoncé qu'elle ferait appel. Avec cette ordonnance, le juge donne en partie raison aux onze associations qui avaient saisi le juge administratif de Lille mercredi dernier pour demander l'arrêt des "entraves" à la distribution de nourriture. Elles s'étaient appuyées sur le dernier rapport du Défenseur des droits qui, le 14 juin, avait dénoncé des atteintes aux droits "d'une inédite gravité".

"En tout état de cause, il n'est pas possible de laisser sans aide aucune des personnes en état de dénuement total - à défaut de pouvoir les faire entrer dans les dispositifs d'aide auxquels ils peuvent légalement prétendre -, en espérant qu'elles finissent par se lasser et par partir d'elles-mêmes ailleurs", explique le juge dans son ordonnance communiquée à la presse. Les autorités locales se voient ainsi enjointes de "créer, dans des lieux facilement accessibles aux migrants, à l'extérieur du centre de Calais, plusieurs points d'eau leur permettant de boire, de se laver et de laver leurs vêtements, ainsi que des latrines". Le tribunal rappelle aussi l'obligation "de laisser les associations continuer à distribuer des repas".


Exigences "inacceptables"


En revanche, le juge n'est pas allé jusqu'à exiger la création d'un centre d'hébergement d'urgence fixe sur Calais car cela ne constitue pas "la seule solution pour prendre en charge efficacement et dignement les personnes concernées".

La mise en place d'un tel dispositif avait été balayée par le ministre de l'Intérieur Gérard Collomb qui, en déplacement vendredi à Calais, avait argué que cela risquerait de provoquer un "appel d'air" dans la région, craignant la réapparition d'une "Jungle", en allusion au vaste bidonville démantelé en octobre, opération qui avait entraîné l'évacuation de 7.000 personnes.

Le juge propose plutôt de rediriger les personnes en exil vers "le dispositif national d'asile, ailleurs sur le territoire français". Un nouveau "plan" sur le traitement des demandes d'asile doit d'ailleurs être présenté sous quinze jours, selon M. Collomb. La décision du juge "permet de stopper l'aspect inhumain de la situation actuelle à Calais", s'est félicité Christian Salomé, président de l'Auberge des migrants.


La municipalité va faire appel


Le préfet du Pas-de-Calais, Fabien Sudry, a constaté que "la principale demande des associations, qui aurait pu conduire à la création de points de fixation à Calais et à terme la formation d'un nouveau camp, a été rejetée". "Je rappelle que les services de l'Etat sont attachés à apporter aux migrants une réponse digne en prenant en compte la situation des plus vulnérables mais en évitant une reconcentration sur Calais de campements", a-t-il ajouté. Toutefois, "L'Etat se réserve la possibilité de donner une suite juridique au moins partiellement à cette ordonnance", a dit M. Sudry.

La maire de Calais Natacha Bouchart (LR) a elle qualifié d'"inacceptables" certaines exigences formulées par la justice administrative. "Considérant que les réponses humanitaires peuvent être apportées en dehors du Calaisis, les élus de la majorité ont unanimement décidé de ne pas mettre en oeuvre les mesures imposées sur le plan local par le tribunal administratif et, par conséquent, de faire appel (...)", a indiqué Mme Bouchart.


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