L'homme qui avait poussé et blessé le maire de Croisilles, Gérard Hué, 69 ans, a été reconnu coupable mais est ressorti libre. L'élu du Pas-de-Calais, déçu et interloqué, demande des changements profonds du système judiciaire.
L'homme qui avait agressé en 2020 Gérard Dué, le maire de Croisilles (62) a été reconnu coupable de "violences sur une personne dépositaire de l'autorité publique" par le tribunal correctionnel d'Arras, selon nos confrères de la Voix du Nord. Mais le jeune homme de 25 ans a été dispensé de toute peine. L'année dernière, l'affaire avait pourtant indigné jusqu'au ministre de l'Intérieur, qui estimait que "derrière un maire, c'est la République qui est attaquée".
"Donc on élève la voix, et on devient agresseur ?"
Selon le procureur d'Arras, André Lourdelle, le tribunal a reconnu, derrière cette dispense de peine, que le trouble causé avait été réparé et que la réinsertion de l'agresseur était "effective." Le respect de l'interdiction de pénétrer dans la commune de Croisilles pendant 6 mois a pu jouer dans le rendu de ce jugement. Voilà pour le pénal.
Sur le volet civil, le tribunal a retenu un partage de responsabilité au moment de l'altercation. C'est lui qui se serait, le premier, "porté au contact" du jeune homme. Gérard Dué, touché au poignet et au dos après avoir été brutalement poussé, ne parvient pas à comprendre.
"Plusieurs soirs de suite, les gens appellent les gendarmes, ils mettent 25 minutes à venir s'ils sont disponibles, ils viennent mais ne peuvent souvent faire qu'un rappel à la loi. Les gens critiquent la gendarmerie pour ça, la moutarde monte, donc on appelle le maire, qui va essayer de venir discuter, même s'il râle parce qu'il est dérangé dans la nuit, plaisante un peu l'élu. Donc on élève la voix, et on devient agresseur ? Quand on lit le jugement, on se dit qu'un élu ne peut pas faire respecter la loi. Je ne suis pas venu faire un coup de baston pour le plaisir, un élu ne se déplace pas pour s'amuser à frapper quelqu'un" proteste Gérard Dué, 69 ans.
233 maires et adjoints agressés depuis janvier, des mesures réclamées au gouvernement https://t.co/hiEtaUhC7E pic.twitter.com/cOAGrDRbqN
— Sud Ouest (@sudouest) August 9, 2020
"Si la prison était éducative, on le saurait" : Gérard Dué veut une autre Justice
Pour lui, même si le tribunal reconnaît des efforts de réinsertion, le cas de son agresseur dessine un problème chronique, celui de jeunes bloqués "dans une société d'aides. Dans ma commune, j'ai un centre de réfugiés, et ce sont eux qui vont travailler avec nos agriculteurs. Ils ne trouvent personne d'autre ! Est-ce que c'est normal ?". Le maire en est sûr, l'incarcération de ce jeune de 25 ans n'était de toute façon pas une solution. "La Justice ne peut pas mettre tout le monde en prison et si la prison était éducative, on le saurait. On prend six mois, on en ressort représentant en cannabis, ça ne sert à rien. On peut les condamner à des travaux d'intérêt général, mais qui va leur confier une tondeuse, à ces gars-là ?"
#Prison Au 1er juin dernier, 66 591 personnes étaient incarcérées en France. C'est 1200 de plus qu'un mois plus tôt. Et près de 8500 de plus qu'il y a un an. pic.twitter.com/mOsbtvDqyX
— OIP (@OIP_sectionfr) June 28, 2021
Gérard Dué défend "toute une réflexion à avoir" sur les condition d'obtention des aides sociales, et sur le sort de certains jeunes qui ne manifestent pas l'envie de s'insérer dans la société. "Il faudrait qu'il soit obligé de faire l'armée, ou un centre fermé avec des éducateurs. Un an pour être rééduqué. Ça lui aurait permis de changer de région, de se lever en faisant du sport, d'apprendre un métier ! Ça serait bien je pense, tout remettre à plat et se reconditionner. Et tant qu'ils sont là-bas, les aides sociales qu'ils perçoivent vont au centre qui les encadre."