Quand le Festival de la BD d'Amiens pose la question de la rémunération des auteurs

Si le marché de la BD en France se porte bien, avec une croissance régulière, la vie des auteurs est beaucoup plus compliquée : plus d’un tiers vit sous le seuil de pauvreté. Le financement de la BD est le thème de la journée professionnelle des 23èmes Rendez-vous de la BD d’Amiens.

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Les auteurs de bandes dessinées vous font rêver, mais leur quotidien est loin d’être un Eden. Si les « stars » gagnent très bien leur vie, 53% ont un revenu inférieur au Smic et pire : 36% vivent en-dessous du seuil de pauvreté. Deux chiffres en augmentation régulière ces dernières années. Un constat qui laisse entrevoir une conséquence lourde : la diminution, voire la disparition de la BD française…


Petite sociologie des auteurs


Pour bien comprendre de quoi on parle, il est important de savoir de qui on parle. Les auteurs de bandes dessinées francophones sont à 72% des hommes. Et 63% ont entre 31 et 50 ans. 85% sont de nationalité française, 8% sont belges. 25% résident en Ile-de-France. 79% ont un niveau d’études supérieur à Bac+2. 71% ont un emploi parallèle.

Ils sont typiquement ce que l’on appelle des actifs. Leur mode de rémunération est complexe, puisqu’il ne s’agit pas d’un salaire mais de droits d’auteurs. Ceux-ci sont proportionnels aux ventes. C’est un pourcentage par livre. Mais pour anticiper cela, les éditeurs, qui sont les payeurs des auteurs, accordent généralement une avance sur droits.




Concrètement, à la signature du contrat, l’éditeur propose une somme aux auteurs pour qu’ils ne soient pas obligés d’attendre les résultats des ventes pour être payés. C’est une avance qui anticipe un nombre d’exemplaires vendus.


L’avance de droits : parfois le seul revenu


Par exemple un éditeur verse à chaque auteur 5000 euros à la signature. Il définit un seuil de 4000 exemplaires. Les auteurs percevront seulement cette somme tant que le livre ne dépasse pas les 4000 ventes. Dans notre cas, si seulement 2000 ouvrages sont vendus, c’est l’éditeur qui assume le poids financier. En revanche, dès que les ventes sont supérieures, les auteurs sont cette fois rémunérés au pourcentage : ils perçoivent leurs droits d’auteurs. Si l’album ne rencontre pas un succès suffisant en librairie, les auteurs ne touchent donc que cette avance de droits. Naturellement ces chiffres peuvent varier selon les auteurs ou les œuvres.

Scénariste vs dessinateur


Une grande majorité de dessinateurs considère qu’un album de 56 pages représente environ une année de travail. Ce qui revient à réaliser une page complète par semaine. Un travail qui comprend souvent le story board, le crayonné, l’encrage, les couleurs, le lettrage…

Souvent, de ce fait, l’avance faite au dessinateur est plus importante que celle du scénariste. Car ce dernier peut travailler sur plusieurs livres à la fois, avec des dessinateurs différents. Il peut donc cumuler les avances de droits. Mais à une condition : obtenir des contrats ! Et donc être « bankable » !



Création vs commerce : un duel perdu d’avance ?


Les sommes engagées pour la réalisation d’un album de 56 pages sont de l’ordre de 50.000 euros, avances de droits comprises. L’éditeur, qui a un rôle culturel évident de publication de livres, n’en reste pas moins un chef d’entreprise avec des objectifs commerciaux et comptables. Donc il peut avoir tendance à choisir des propositions de BD au succès garanti. Par exemple, écrire la suite d’une série à succès comme « Les Méta-Barons », « Corto Maltese » ou « Spirou ». Le risque est limité et le chiffre d’affaires assuré.



Mais en termes de création, cela laisse à désirer : comment un « Titeuf » aurait-il pu exister sans le pari initial d’un éditeur qui a laissé sa chance à l’auteur ET au personnage ? Car le succès en librairie, l’essor des ventes, a eu lieu à partir du tome 4 ! Clairement, avec à ce jour plus de 21 millions d’albums vendus, la maison d’édition Glénat a eu raison de tenter le coup ! Un résultat qui lui a permis de donner leur chance à d’autres auteurs pas ou peu connus, avec des œuvres de pure création qui, sans doute, n’auraient pas vu le jour autrement.



D’ailleurs Zep, l’auteur de Titeuf, a également pu réaliser des ouvrages très différents avec la confiance d’éditeurs simplement parce qu’il s’était fait un nom, comme son dernier livre « The End » (éd. Rue de Sèvres) et beaucoup d’autres.

Voilà la base de la problématique du financement de la bande dessinée. Un secteur qui est donc culturel, créatif, mais qui doit répondre à certaines logiques commerciales. C’est le thème abordé ce vendredi lors de la Journée Professionnelle des 23ème Rendez-vous de la Bande Dessinée d’Amiens et des Etats généraux de la bande dessinée.



Evidemment, le Ministère de la Culture est interlocuteur essentiel des auteurs, qui demandent tout simplement une amélioration de leur niveau de vie, car sans cela, la bande dessinée française, classée sur le podium de la BD mondiale, pourrait connaître un avenir bien sombre.
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