Inaugurée le 14 septembre 2022 par Emmanuel Macron, la nouvelle table du Conseil des ministres a été fabriquée par onze entreprises françaises dont une seule basée dans les Hauts-de-France. Située à Friville-Escarbotin, dans la Somme, l'usine Marchio est spécialisée dans le polissage et le traitement de surface.
Fini les tasseaux, les planches et la feutrine, le Conseil des ministres a désormais une vraie table : la Medulla ("moëlle" en latin).
Conçue pour être fonctionnelle et démontée chaque semaine, elle est constituée de vingt modules qui s'emboîtent les uns dans les autres, "comme un assemblage de vertèbres" selon leurs concepteurs, et qui permettent d'adapter sa longueur au nombre de participants à la réunion. Sa surface est recouverte d'un béton taloché, avec un décor constitué par des subtiles bandes de laiton légèrement dorées.
Une table 100% française
Onze entreprises artisanales, basées dans plusieurs régions, ont participé à sa fabrication. Parmi elles, la société Marchio, la seule située dans les Hauts-de-France, plus exactement à Friville-Escarbotin, dans la Somme. Et pourtant, une semaine après avoir été contactée par le Mobilier National, la directrice, Adélaïde Lefèvre, a bien failli annulé la commande : "nous venions de subir un incendie fin janvier, se souvient Adélaïde Lefèvre, directrice de Marchio, donc c’était une très bonne nouvelle, un projet qu’on espérait fédérateur pour retrouver un engouement au sein de la société et de son personnel et ce fut le cas".
Spécialisée dans le polissage et le traitement de surface, l'entreprise Marchio s'est occupée des parties métalliques qui décorent la surface de la table. "Pour l’esthétisme, on a conjugué les dorures de l’Élysée avec le côté très design et contemporain de la table, ce qui donne une teinte un peu dorée et légèrement grisée pour le côté contemporain", précise Adélaïde Lefèvre.
En plus de ces décorations, la société s'est aussi chargée de fabriquer les luminaires ainsi qu'un meuble à casiers : "un meuble où les ministres insèrent leurs téléphones portables pour éviter tout espionnage et écoute extérieure", précise la directrice.
Un savoir-faire d'excellence
Réfugiés dans un autre bâtiment de la commune, les salariés expriment leur fierté : "Le fait de pouvoir présenter notre travail, d'être reconnu aussi haut, c'est bien pour nous", confie Christophe Monard, vernisseur. "Tout au début, quand j'ai su que j'allais le faire, j'ai eu un gros stress, se souvient Aurélie Alix, contrôleuse qualité. Et au final, je suis fière d'avoir mis mes mains dessus. En fait, c'est une fierté. Je remercie ma patronne de m'avoir laissée la chance de pouvoir l'emballer."
Tous les pôles de l'entreprise ont été concernés par le projet. Pour la partie polissage, le chef d'atelier Fabrice Desplanques a été désigné en raison de son expérience, mais a tenu à faire équipe avec Laurent Provost, arrivé il y a deux ans : "Il y avait pas mal de pièces à faire, explique le chef. On a passé trois semaines de travail dessus. On peut montrer qu'on peut faire autre chose que de la robinetterie". Moins expérimenté, le jeune homme n'a pas compté ses heures : "L'intérêt déjà, c'est que ce sont des pièces de luxe, donc on n'a pas le droit à l'erreur. Un chantier comme celui-ci, on ne l'aura pas deux fois dans notre vie".
Habituée à travailler au quotidien dans le monde du luxe, il s'agissait cette fois pour la société de porter ce savoir-faire au plus haut sommet de l'Etat. "C'était vraiment une pression de travailler pour les ministres et le président de la République, conclut Adélaïde Lefèvre, avec également l'exigence du Mobilier National que l'on connaît. C'est travailler pour l'Histoire de France, le patrimoine des Français donc, il faut en être digne".
Pari réussi. Une commande a déjà été passée par le Mobilier National pour une ambassade de France à l'étranger.