Sport amateur : la reprise se fait (très très) en douceur dans les clubs picards

Le gouvernement a annoncé la possibilité de reprendre une activité sportive en club en même temps que le début du déconfinement. Mais pas pour tous les sports, pas pour tout le monde, et en aucun cas comme avant... Alors les clubs avancent encore à tâtons. 

 

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Après deux mois d'exercice à la maison devant des storys Instagram de coachs ou des vidéos sur Youtube, les sportifs amateurs peuvent enfin reprendre leur activité... ou presque. Le ministère des Sports a annoncé la possibilité de rouvrir les clubs sportifs mais sous certaines conditions sanitaires strictes, qui excluent notamment la pratique des sports collectifs ou des sports de combat, qui ne sont pas compatibles avec les mesures de distanciation. Dans un document de plus de 110 pages, le ministère détaille ces consignes discipline par discipline, écrit avec le concours des différentes fédérations.

Mais pour les sports individuels, ce n'est pas toujours simple non plus. Obligation d'exercer en extérieur, distances à respecter, interdiction de partager le matériel... Pour certaines disciplines, la reprise de l'entrainement peut se transformer en casse-tête. 
 


Chacun ses balles de tennis

Pour le tennis par exemple, les amateurs peuvent à nouveau s'entraîner, mais uniquement en extérieur et en simple. Le Tennis club d'Amiens Métropole a rouvert ses portes - en partie, uniquement les cinq courts extérieurs - mais il a fallu faire quelques aménagements. "On a dû retirer les bancs et les chaises d'arbitre pour éviter que les joueurs ne contaminent les sièges, et chacun doit ramener son propre jeu de balles, et inscrire ses initiales ou son nom dessus, de façon à ce que seul le propriétaire des balles ne les touchent", explique le directeur sportif du club, Emmanuel Daverdin.

"Comme les joueurs ne doivent pas se croiser, il faut partir cinq minutes avant la fin de son créneau pour ne pas entrer en contact avec les joueurs du créneau suivant." Un peu plus contraignant et un peu moins convivial, certes, mais plus prudent. Comme le club ne peut affecter un salarié en permanence du matin au soir pour surveiller le comportement des joueurs, il compte sur la bonne volonté et la compréhension des licenciés.
 


Responsabilité individuelle

"Dans l'ensemble, les gens comprennent. On passe régulièrement pour contrôler, et on voit que personne n'essaie de tricher ou de passer outre les règles", explique le directeur sportif, confiant. Chaque joueur doit d'ailleurs signer une attestation pour indiquer qu'il a bien compris le nouveau règlement. En plus de l'entraînement libre, quelques cours particuliers ont également repris. Mais pour les cours collectifs, c'est non. "On espère pouvoir reprendre en juin, car ça représente 300 personnes, adultes et enfants, qui ont perdu un trimestre qu'ils ont payé", admet Emmanuel. "Si on peut reprendre rapidement, on essaiera de pousser jusqu'à fin juillet pour rattraper un maximum."


Du vélo seul pour plus de sécurité

Au Cyclo-club de Nogent-sur-Oise en revanche, les portes resteront closes encore quelques semaines. "On est autorisés à reprendre les entraînements collectifs, mais les conditions sont inapplicables, alors on n'a pas repris", déplore Frédéric Simon, coach des 12-16 ans. En temps normal, Frédéric entraîne une quinzaine de jeunes cyclistes sur les routes du bassin creillois. Alors pour limiter au maximum les risques d'accident avec les véhicules, le peloton reste groupé.  "Là, en théorie, on peut sortir, mais par groupe de dix au maximum, et il faut que les coureurs soient espacés de 10 mètres les uns des autres. Niveau sécurité routière, c'est trop dangereux.

Il espère pouvoir reprendre dans une configuration moins risquée d'ici le mois de juin, selon ce que la fédération et le comité national olympique aura décidé. "En attendant, je leur conseille de faire des sorties à vélo de manière individuelle pendant les deux à trois semaines à venir, avec leurs parents si possible, puisque pour les sorties en famille la règle des dix mètres ne s'applique pas." Et il continue de leur proposer des exercices de renforcement et d'endurance à faire à la maison, comme il l'a fait pendant le confinement.
 

Ils ont travaillé dur tout l'hiver, pour ne courir qu'une seule fois. Forcément, c'est frustrant.


"On essaie de maintenir un niveau convenable, mais on peut dire que la saison est quasiment foutue", explique-t-il. "Les jeunes sont déçus, déjà parce que ça leur manque de faire du sport, surtout en ce moment, dans une période un peu angoissante." Sans compter que dans ce club, qui a formé Arnaud Démare et un certain nombre d'autres cyclistes professionnels, plusieurs jeunes ont l'ambition d'aller loin dans ce sport. "Ils ont travaillé dur tout l'hiver, pour ne courir qu'une seule fois, le 8 mars. Forcément, c'est frustrant", ajoute l'entraîneur. "Jules Engels par exemple, qui a été champion des Hauts-de-France, il est dans une année charnière, alors il est frustré que la saison soit gâchée." 
 


Encore un peu de patience pour le handisport

Enfin, une autre question cruciale se pose : comment permettre à des personnes en situation de handicap de reprendre le sport ? Au comité départemental handisport de la Somme, on réfléchit depuis plusieurs semaines à la question. Conclusion des débats : la reprise se fera plus tard que pour les valides. "On a parmi notre public des personnes plus vulnérables que les autres. Ceux qui ont des problèmes de mobilité par exemple, que l'on doit transférer pour pour les installer sur certains équipements", explique Benjamin Gaillien, le délégué départemental. Par exemple, le kayak, a priori autorisé car il se pratique en extérieur, est impossible puisqu'il faudrait qu'un accompagnant transfère (et donc, entre en contact avec) le sportif pour l'installer dans le kayak.

"Même la sarbacane, ce n'est pas possible. La plupart de ces sportifs ont des handicaps lourds qui nécessitent un accompagnement physique, donc on ne peut pas le faire en respectant les conditions d'hygiène", poursuit-il. "On va devoir adapter les disciplines, et peut-être leur proposer des disciplines qu'ils ne font pas habituellement, comme le tai-chi en plein air, le self-défense en autonomie, sans contact, ou des sorties vélo en petit groupe. Mais ce ne sera pas possible avant le mois de juillet, le temps que la fédération nous donne des consignes en fonction de la discipline et en fonction du public accueilli."

En attendant, les sportifs handicapés n'ont d'autres choix que de prendre leur mal en patience. "La plupart sont déçus, car l'activité sportive est un moment de plaisir, de bien-être, de partage et de lien social, admet Benjamin Gaillien. "Mais dans l'ensemble, ils prennent du recul et se rendent compte qu'en ce moment, ce n'est pas la priorité, alors ils relativisent."

Pour tous ceux privés de leur sport préféré aussi, il faudra relativiser et patienter encore quelques temps. De nouvelles annonces du gouvernement sont attendues le 2 juin.
 
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