Alençon : le directeur de "la Luciole" dépose la marque "la Luciole" à l'insu des élus

Les élus d'Alençon (Orne) sont furibards. Loïc Lecomte, le directeur de "la Luciole", la salle des musiques actuelles, a déposé la marque "la Luciole" auprès de l'INPI, l'Institut national de la propriété industrielle. 

Gonflé le directeur de "la Luciole". Alors que cet équipement culturel est financé à 60% par des subventions (de l'argent public), Loïc Lecomte est allé en avril 2013 déposer, à titre personnel, le nom de "la Luciole" auprès de l'INPI. Une démarche très discrète puisque les élus n'en ont pas été informés. Inutile de dire qu'ils se sont étranglés en l'apprenant. 

Le dépot de la marque auprès de l'INPI aboutit à ce que Loïc Lecomte jouisse d'un monopole d'exploitation de cette marque. Il est le seul à pouvoir utiliser le nom, et en tirer les bénéfices commerciaux. 

Rappelons que "la Luciole" existe depuis près de 20 ans. C'est l'unique salle de concert professionnelle du département de l'Orne. La Luciole a un budget de 1,1 millions d'euros, elle est géréé par l'association Euréka.
La Luciole est financée à près de 60 % par des subventions, qui proviennent de la ville d'Alençon (85 000 euros), de la communauté urbaine (135 000 euros), du conseil général de l'Orne (105 000 euros), du conseil régional de Basse-Normandie (130 000 euros), et de l'Etat (100 000 euros). 

Sauvée du naufrage par les collectivités

L'année dernière, la salle a bien failli fermer et déposer le bilan à cause d'un déficit de 178 000 euros. Les collectivités ont évité le naufrage en comblant le trou, en échange de la mise en place d'un protocole cadre d’apurement du déficit, signé avec l’association Eurêka.

L'épisode avait attisé des tensions entre les élus et le directeur. Le coup du dépôt de la marque à l'INPI vient de raviver ces tensions. 
Le maire-adjoint à la culture d'Alençon, Dominique Artois, ne décolère pas, et a remis l'affaire sur la table du conseil municipal lundi soir. Dans les colonnes de Ouest-France, il s'insurge : "Comment peut-on imaginer qu'un titre de propriété ait été déposé sur une structure culturelle dont le financement provient de fonds publics ?"

Joaquim Peyo, le maire d'Alençon et président de la communauté urbaine, n'a pas non plus apprécié l'initiative du directeur de la Luciole. Il a écrit au président de l'association Euréka pour qu'il demande à son directeur de renoncer au dépôt de marque dans un délai de 2 mois. Et envisage même de s'adresser à la justice, pour obtenir la nullité du dépôt.


Défendre un projet artistique


Pour Loïc Lecomte, sa démarche vis à défendre un projet artistique vieux de 20 ans. Depuis l'an passé, il fait face à un nouveau président, un nouveau conseil d'administration qui, selon lui, tentent de modifier en profondeur les statuts de l'association. Il explique même avoir fait une proposition à la mairie: "qu'il puisse bénéficier de faire ce qu'ils voulaient du nom de La Luciole, bien sûr, en travaillant collégialement, ensemble, ne pas dénaturer le nom de la Luciole de quelque manière que ce soit sans mon accord."

Reportage de Jean-Pierre Bonnefon et Damien Migniau





Que dit la loi ? 

Sur le site de l'INPI, la notion de fraude existe. 
Voici ce que dit le texte : "La fraude consiste dans le fait de commettre un acte d'apparence régulière dans le but de nuire aux intérêts d'autrui.
Si vous estimez qu’une personne a effectué un dépôt de marque en fraude de vos droits, vous pouvez agir en justice afin d'en revendiquer la propriété (action en revendication de propriété de marque) ainsi qu’en responsabilité civile pour dépôt frauduleux. Il vous faudra apporter la preuve de la fraude.


Par exemple, un employé déposant volontairement une marque en son nom personnel alors qu’il devait le faire au nom de son entreprise, fait un dépôt en  fraude des droits de l’entreprise qui l’emploie. L’entreprise peut alors revendiquer la propriété de cette marque."

Reste à savoir si dans ce cas complexe, la notion de fraude pourrait être retenue. 
Pour le moment, les élus espèrent un règlement "à l'amiable", et éviter des dégâts colatéraux qui pourraient fragiliser "la Luciole" et l'offre culturelle dans l'agglomération et dans l'Orne.
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