Elle avait vu de près "l'infernale saleté" de la guerre : Paulette Héron, une héroïne de la Résistance s'éteint à 104 ans

Elle était l'une des dernières figures de la Résistance. Paulette Héron est décédée le 28 octobre à Cabourg (Calvados) à l'âge de 104 ans. Elle n'avait rien oublié des atrocités commises pendant la guerre dont elle a souvent témoigné. Paulette en restait sidérée : "c'est l'Homme qui a fait tout ça".

Paulette n'en imposait pas. Lorsqu'elle rencontrait des écoliers, elle s'amusait presque de leur regard incrédule. "Je suis pas bien grosse et pas bien grande. Ça les épate peut-être un petit peu ce que j'ai fait. Mais pourquoi pas ? Pour moi, c'était normal", avait-elle confié dans un reportage de France 3 Normandie en 1992.

Pendant l'occupation, Paulette Lecomte travaille à la préfecture du Calvados, au service du téléphone. C'est là qu'elle effectue ses premiers actes de résistance. Paulette alias "Marianne" intègre le réseau de renseignement Arc-en-ciel. "J'étais lieutenant, deux galons", rappelait-elle fièrement. "Mon mari (Jean-Claude Héron, NDLR) était le chef du réseau pour toute la Normandie. J'étais chargée de surveiller les mouvements des troupes, les trains et toutes les zones côtières".

Le réseau Arc-en-ciel est bientôt décimé par les arrestations. Son propre père est de ceux qui furent passés par les armes le 6 juin 1944 à la prison de Caen. "Près de 97 personnes furent tuées dont 18 résistants sur les 40 que comportait le réseau", rappelle la préfecture du Calvados qui avait publié son portrait en 2016. "Malgré les arrestations, elle poursuivit avec la même ardeur son action en faisant preuve cependant de plus en plus de prudence."

Au lendemain de la guerre, Paulette Heron est affectée à Annemasse dans un service de la Sécurité Militaire. Elle veille au rapatriement des déportés féminines de Ravensbrück encore vêtues de guenilles et chaussées de morceaux de bois tenus par des ficelles. "Elles sentaient le cadavre", a-t-elle témoigné. Cette mission lui permet d'approcher l'horreur des camps. "Plus on est cruel, plus on cherche à être cruel ; c’était la cruauté la plus infernale, c’était terrible. Si vous trouvez que ce n’est pas un acte de sadisme…".

Elle est ensuite nommée consule en Pologne, dans ce pays où les Nazis avaient installés plusieurs camps d'extermination. "Mon beau-frère est mort à Auschwitz. Médecin au camp, il s’insurgea contre le traitement de ses malades : ils étaient en effet régulièrement battus… Les nazis le punirent d’atroce façon : il dut monter et descendre un escalier en portant une lourde pierre jusqu’à épuisement. Mon beau-frère tomba, l’Allemand qui le surveillait prit alors sa charge et lui fracassa la tête avec la pierre. Comme il n’était pas encore mort, on l’enterra debout et l’on fit passer un rouleau sur sa tête ! "

Paulette Heron, qui fut pendant vingt ans conseillère municipale de Cabourg, a été décorée de la Légion d'honneur en 2015. Les Archives départementales du Calvados souligne qu'elle avait aussi reçu une multitude de décorations : "la croix de guerre avec citation, la médaille de la résistance, la croix nationale du mérite et la croix de guerre polonaise."

Comme beaucoup de témoins de cette époque, elle était partagée entre le désir de reprendre une vie normale et le besoin de raconter, peut-être pour essayer de comprendre. Elle emporte ses souvenirs douloureux, et les questionnements qui ont hanté ceux qui ont été marqués dans leur chair par les atrocités de la Seconde guerre mondiale. "C’était une infernale saleté, quelque chose d’immonde ! C'est l'Homme qui a fait tout ça..."

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