C'est le graffeur SoLiCe qui allumera le chaudron dans sa ville ce jeudi 30 mai. Pourquoi lui ? Le caennais n'a pas l'explication, mais il est fier de rendre ainsi hommage aux athlètes.
Il l'a appris deux jours avant l'évènement seulement. SoLiCe sera le dernier des 178 porteurs de flamme olympique qui se relayeront ce jeudi 30 mai sur le parcours calvadosien. Comme le veut la tradition, c'est donc lui qui portera la flamme olympique jusqu'à l'esplanade de l'hôtel de ville de Caen, accueilli par une haie d'honneur composée de 24 jeunes issus du monde sportif ou des agents du Département. C'est lui qui embrasera le chaudron, un peu après 19h30.
Un beau cadeau pour cet artiste bien connu des Caennais, qui ne s'explique toutefois pas ce choix.
C’est peut-être le choix de l’humilité. Le comité n'a pas choisi une célébrité, mais quelqu'un qui est vraiment de Caen. Je suis né à Caen, mes enfants aussi.
SoLiCe, graffeur
Surpris, il l'a été dès le départ, quand le département du Calvados l'a contacté à l'automne dernier pour faire partie des relayeurs. Un secret qu'il a bien gardé, car son nom devait être validé par le comité d'organisation des Jeux Olympiques et Paralympiques, Paris 2024, en décembre dernier.
Deuxième surprise, quand il se retrouve dans les 14 premiers noms annoncés (10 noms choisis par le Département et 4 par la ville de Caen).
"Au départ, je devais être à la maison départementale des sports et au dernier moment, on m’a annoncé que je serai plutôt dans les derniers, voire le dernier. Et mardi matin, le comité de Paris 2024 m’a contacté pour me dire que je serai celui qui allumerai le chaudron.".
Un premier choix qui prenait tout son sens, puisqu'il est l'auteur de la sculpture posée devant la maison départementale des sports à Hérouville-Saint-Clair, dans la banlieue de Caen. Une peinture sur des palis d'ardoises scellés dans du béton. "L'œuvre représente la diversité des mouvements exercés dans le sport en général" explique l'artiste sur son compte facebook.
SoLiCe, un artiste résolument caennais
La ville de Caen représente beaucoup de choses pour moi. C’est là où j’ai grandi, où j’ai appris à graffer. C’est mon terrain de jeu.
SoLiCe, graffeur
SoLiCe a grandi à Caen au n°4 parvis de notre Dame de la Gloriette puis au n°6. "Je me souviens des sacrifices que ma mère faisait pour qu'on habite dans ce quartier qui a marqué ma vie. Elle dormait dans un canapé convertible, nous laissant la seule chambre pour mon frère et moi !" raconte l'artiste dans un post facebook, bel hommage à sa mère :
"C'est grâce à ces choix que j'ai rencontré le skate, le graffiti. Jamais je n'aurais rencontré le centre-ville de Caen et la culture urbaine en habitant autre part. Merci maman 🙃"
Comme les jeunes du quartier, il est allé à l'école primaire et au collège René Lemière, à deux pas de la Préfecture. Un lieu qu'il vient de relooker aux couleurs du Débarquement.
Mais pas question d'abîmer ce vieux bâtiment classé. C'est un trompe-l'œil que le graffeur a installé : un photomontage réalisé sur ordinateur et accroché sur un châssis temporaire, pour les commémorations du 80ᵉ anniversaire du Débarquement.
Sur la toile, on aperçoit une grande et une petite main pour symboliser la transmission de la mémoire, et des colombes signes de paix et de liberté.
Un homme ordinaire qui fait des choses extraordinaires
Le cahier des charges du comité d'organisation de Paris 2024 était clair : le Département devait lui proposer des gens ordinaires qui font des choses extraordinaires, et pas seulement dans le domaine sportif. Il fallait des personnalités qui incarnent les énergies fondatrices des Jeux :
- l'énergie du sport avec des personnes qui font rayonner le sport et sa pratique
- l'énergie des territoires avec des personnes qui entreprennent ou innovent
- l'énergie du collectif avec des personnes qui s'engagent pour une société plus solidaire, plus inclusive et plus durable.
SoLiCe est l'auteur de plusieurs fresques importantes dans la culture Caennaise, comme celle d'Orelsan sur la Presqu'île, ou encore celle à 38 m de haut sur la façade du Centre de cancérologie François Baclesse, inaugurée en septembre 2023.
C'est aussi un artiste engagé qui n'hésite pas à dénoncer, avec ses graffs, les féminicides ou la guerre. L'art de la rue, c'est pour lui un moyen d'interpeller les passants sur ce qu'il se passe dans le Monde.
"J'aime l'esprit d'ouverture des JO"
En juillet prochain, SoLiCe suivra les JO, et notamment le basket, avec ses deux grands garçons qui sont eux-mêmes joueurs amateurs.
J'aime les valeurs de l'olympisme comme l'ouverture d'esprit et la paix. Dans une même épreuve, il y aura des joueurs de pays en guerre qui vont se côtoyer.
SoLiCe, graffeur
SoLiCe partage les valeurs des JO : "Le but du Mouvement olympique est de contribuer à la construction d’un monde meilleur et pacifique en éduquant la jeunesse par le biais d’une pratique sportive en accord avec l’Olympisme et ses valeurs."
Pour cet artiste de Street Art, choisir des inconnus pour porter la flamme, c'est aussi une preuve d'ouverture d'esprit. Avec lui se relayeront, notamment, Svetlana Mintova-Lazarova, chercheuse, et Maxime Wille, pompier au SDIS et arrière-petit-fils de Léon Gautier, "un homme ordinaire devenu héros" selon Emmanuel Macron.