Des militants se sont rassemblés ce dimanche 8 mars à l’occasion de la journée des droits des femmes pour une marche de 2.6km dans les rues de Caen. Objectif : dénoncer les inégalités salariales.
Ils n’ont pas été choisis au hasard. Ces 2.6 kilomètres qu’ont foulé les manifestants ayant répondu à l’appel de l’intersyndical ce 8 mars, journée des droits des femmes, sont hautement symboliques pour Caroline Bojarski, membre du collectif droits des femmes. "Ce sont 2.6 km pour faire référence au 26% qui représentent l’écart de salaire entre les femmes et les hommes encore aujourd’hui", exposait la jeune femme la veille de la marche, lors d’une première action de dénonciation dans les rues de Caen.
Des inégalités de salaires réelles difficilement quantifiables
En effet malgré les lois successives (1972, 2001, 2006 et 2014) visant à assurer l’égalité salariale, les hommes toucheraient en France en moyenne un salaire supérieur de 26%. Le résultat d’un calcul qui mêle les temps pleins et les temps partiels (alors que les femmes sont bien plus nombreuses à travailler à temps partiel). Cet écart varie donc selon les études et la multitude de paramètres, mais il oscille généralement au-dessus des 20%.Dans une note adressée le 25 mars 2019, l’observatoire des inégalités résumait les choses ainsi : "Le salaire mensuel net moyen des hommes, en équivalent temps plein est de 2 438 euros en 2015, celui des femmes de 1 986 euros, soit un écart de 452 euros. Les femmes perçoivent donc, en moyenne, 81,5% du salaire des hommes (1 986 divisé par 2 438), ou ont un salaire inférieur de 18,5%. Ou encore, ce qui revient au même, les hommes touchent en moyenne un salaire supérieur de 22,8% à celui des femmes."
L’analyse de cette note, qui se base sur des chiffres fournis par le Ministère du Travail révélait que la discrimination "pure", à situation égale donc, serait d’environ 10%. "Si l’on tient compte des différences de tranches d’âge, de type de contrat, de temps de travail, de secteur d’activité et de taille d’entreprise, il reste un écart moyen de salaire entre les femmes et les hommes d’environ 10,5 % ." Autrement dit, les femmes toucheraient en moyenne 12.8% de moins que les hommes.
Une dénonciation globale des inégalités
Si cette initiative appuyée par ce symbole a pour objectif d’interpeler sur les inégalités salariales,elles ne sont qu’une parcelle des problèmes pointés du doigt par les militantes. "Il y a aussi les tâches domestiques qui sont réparties de manière inégalitaire, les violences au quotidien qu’elles soient sexuelles ou encore le harcèlement de rue, les stigmatisations et la précarité de manière générale", ajoutait Caroline Bojarski.
Samedi, cette dernière dénonçait notamment avec son collectif la précarité menstruelle qui concernerait près de 1.7 millions de femmes en France, en particulier les femmes sans domicile et les étudiantes précaires. Une collecte de protections hygiéniques reversée ensuite à la Croix Rouge était d’ailleurs organisée. "Un succès", jugeait samedi les organisateurs, membres du Leo Club Alpha Caen-Conquérant.
A Caen cet après-midi, la veille du #8MARS2020, elles dansent déjà pour la #JourneeDesDroitsDesFemmes pic.twitter.com/SfnOkvaBLI
— Liane Courté (@LianeCourte) March 7, 2020
Une solidarité cruciale... en attendant des réformes d’envergures ? En 2015, l'Assemblée Nationale avait voté une baisse de la TVA sur les protections hygiéniques de 20 % à 5,5 %. Appliquée à partir du 1er janvier 2016, cette mesure permettait de les considerer désormais comme des produits de première nécessité et non plus des produits de luxe. Le gouvernement a annoncé l'expérimentation dès 2020 de la gratuité des protections hygiéniques dans plusieurs lieux collectifs. A terme, la France pourrait peut-être emboiter le pas de l’Ecosse qui a voté fin février la gratuité des protections périodiques pour toutes les femmes.
Retour sur l’évolution du droit des femmes en France en 12 dates
- 1804 : Il est inscrit dans le Code Civil que « le mari doit protection à la femme, la femme doit obéissance à son mari ». Elle devient donc incapable juridiquement.
- 1880 : L’enseignement secondaire est autorisé pour les filles.
- 1907 : Les femmes mariées peuvent disposer librement de leur salaire.
- 1938 : Suppression de l’incapacité juridique de la femme mariée
- 1944 : Les femmes obtiennent le droit de vote et d’éligibilité par ordonnance du Général de Gaulle.
- 1965 : Les femmes peuvent gérer leurs biens propres et exercer une activité professionnelle sans le consentement de leur mari.
- 1972 : Le principe de l’égalité de rémunération entre les hommes et les femmes pour les travaux de valeur égale est reconnu.
- 1975 : La loi autorise l’interruption volontaire de grossesse (IVG) par la loi Veil.
- 1993 : La loi du 8 janvier affirme le principe de l’exercice conjoint de l’autorité parentale à l’égard de tous les enfants, quelle que soit la situation des parents (mariés, concubins, divorcés, séparés).
- 2000 : La loi autorise la délivrance sans ordonnance des contraceptifs d’urgence et l’égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et aux fonctions électives est garanti par la loi.
- 2006 : Alignement de l’âge légal du mariage pour les filles. Il passe de 15 à 18 ans.
- 2013 : Même si elle était considérée comme désuette depuis bien longtemps, il aura fallu attendre 2013 pour la disparition d'une ordonnance du 7 novembre 1800 concernant le travestissement des femmes, à savoir l'interdiction du port du pantalon. Une interdiction qui avait été partiellement levée par deux circulaires en 1892 et 1909 autorisant le port féminin du pantalon "si la femme tient par la main un guidon de bicyclette ou les rênes d'un cheval".