C’est celui avec lequel il est parti à la conquête de l’Angleterre. Le bateau de Guillaume Le Conquérant va être reconstruit. Les travaux ont débuté en janvier à Honfleur. Le public va pouvoir assister à l’avancement de ce projet, car la construction prend la forme d’un chantier-spectacle, impulsé par l’association « La Mora ».
Le projet est double : réhabiliter une friche sur les quais d’Honfleur et reconstruire à l’identique le bateau de Guillaume Le Conquérant baptisé « La Mora ».
Le bateau d’une longueur de 35 mètres sera mis à l’eau dans le bassin d’Honfleur en 2027, si tout va bien. « Il sera amené à circuler le long des côtes normandes », explique le délégué général de l’association La Mora, Alexandre Arnoux. L’objectif est de lui faire faire des haltes dans les ports qui pourront accueillir un bateau de 35 mètres.
L’emmener en Angleterre serait vraiment le but final
Alexandre Arnoux , Délégué général de l’association La Mora
Avec 35 mètres de long et 5 de large, la Mora pouvait à l’époque accueillir 60 rameurs. Guillaume le Conquérant serait parti de St Valéry-sur-Somme en direction de l’Angleterre le soir du 28 septembre 1066, avec une flotte de plus de 700 bateaux. Selon Pierre Bouet, historien médiéviste, 15000 hommes et 5000 chevaux auraient fait la traversée.
La Mora : une reconstruction basée sur des preuves
Il existe peu d’images de cette époque. L’unique représentation visuelle du bateau de Guillaume le Conquérant est ce navire viking figurant sur la tapisserie de Bayeux. Sur cette œuvre, réalisée peu de temps après le couronnement de Guillaume sur le trône d’Angleterre, le bateau avec lequel il était parti apparaît très clairement.
La représentation de La Mora sur la Tapisserie de Bayeux a toutefois interpellé certains historiens. En effet, le nom du bateau de Guillaume apparaît dans un document unique conservé à Oxford, intitulé "La liste des navires", un inventaire quasi complet des bateaux engagés dans l’épopée.
C’est Mathilde qui avait offert ce bateau à son époux Guillaume pour qu’il conquière l’Angleterre. Or, dans "la liste des navires", la description de La Mora correspond au visuel de la Tapisserie de Bayeux...à un détail près, comme l’explique l’historien Pierre Bouet : «Elle a voulu qu’à la proue de ce navire il y ait un enfant doré indiquant avec sa lance la direction de l’Angleterre. Cette sculpture est présente sur la Tapisserie de Bayeux mais au lieu de la mettre à la proue, les brodeuses se sont trompées et l’ont mis à la poupe, à l’arrière."
La reconstruction de La Mora scénarisée
Pour reconstruire ce navire d’inspiration viking, Les équipes de l’association ont travaillé avec le musée de la Tapisserie de Bayeux et le musée de Roskilde au Danemark.
On a toute la matière scientifique pour pouvoir faire des répliques fidèles : la qualité des bois, les assemblages, les outils utilisés.
Marc Ronet, architecte naval
Le chantier de reconstruction de La Mora, colossal, s’étalera sur quatre ou cinq ans et sera ouvert au public, selon le concept de chantier-spectacle. Les visiteurs pourront découvrir la construction d’un bateau viking en temps réel, mais aussi des savoir-faires de l’époque.
Ainsi, la Mora sera érigée avec la technique du « refendage ». Au 11e siècle, explique l’architecte naval Marc Ronet, les scies n’étaient pas utilisées. Pour fabriquer des planches, les hommes fendaient le bois dans le sens de la longueur à la hache.
Le chantier spectacle de reconstruction de la Mora s’accompagne d’un projet scénographique et pédagogique. Une immersion dans l’épopée de la conquête de l’Angleterre et, plus largement, l’histoire maritime de la Normandie, à travers un parcours dans quatre salles thématiques. Les travaux ont démarré début janvier. Les visiteurs pourront embarquer dans l'aventure de la reconstruction de La Mora dès l’automne prochain.
Voyez le reportage de Karine Lepainteur et de Thierry Cléon.