Accusée d’être à l’origine de la tenue d’obsèques sans corps dans le cercueil, une société de pompes funèbres du Calvados conteste la fermeture administrative de trois mois imposée par la Préfecture. Elle intente deux recours au tribunal administratif.
[Mise à jour du 16 octobre 2024 : les pompes funèbres Le Tourneur du Val vont pouvoir reprendre leurs activités. La suspension temporaire de l'habilitation de la société a été abrogée le 14 octobre.]
"La suspension prononcée par le Préfet du Calvados contre les pompes funèbres Le Tourneur du Val est entachée d’erreurs factuelles", Raphaël Fatout n’y va pas par quatre chemins pour dénoncer la fermeture administrative de trois mois prononcée à l’encontre de sa société à la suite d’une inhumation qui s’est mal déroulée.
Des obsèques sans corps dans le cercueil
Samedi 14 septembre, une famille s’est rendue au crématorium de Caen pour un dernier adieu à Annick D. Si l’office a bien eu lieu devant le cercueil, le corps de la défunte n’était pas à l’intérieur, sans que la famille ne soit informée. Depuis, cette dernière, scandalisée, cherche un responsable. Le crématorium et les pompes funèbres se rejettent la faute. La Préfecture, elle, a déjà tranché, infligeant une interdiction d’exercer de trois mois au Tourneurs du Val.
La décision du préfet laisse accroire de manière trompeuse qu'une crémation a été organisée sans le corps de la défunte, ce qui est totalement faux.
Raphaël Fatout, pompes funèbres Le Tourneur du Val
Dans les faits, la crémation du cercueil vide n'a pas eu lieu. Pour autant, l'incinération du corps de la défunte a eu lieu, mardi 17 septembre, après que les pompes funèbres ont prévenu la famille de la problématique. Personne n'a pu se rendre sur place.
À qui la faute ?
Légalement, les pompes funèbres endossent la responsabilité de la mise en bière et de la mise en scellé du cercueil, en présence d'un officier de police judiciaire. Cette dernière étape n'a pas pu être réalisée puisque le corps n'était pas présent.
La grande interrogation de cette affaire est "pourquoi le cercueil est-il allé jusqu'au crématorium ?"
"Mon sous-traitant va au crématorium avec le cercueil qui n'est pas scellé, et informe le crématorium qu'il n'y a pas le corps parce qu'il y a eu un souci à la mise en bière, explique Raphaël Fatout, gérant des pompes funèbres. Il laisse le relais à ce moment-là au crématorium pour faire une cérémonie ou pas. Dans mon idée, le crématorium va informer la famille et prendre les mesures pour refixer une autre date, ou pas".
De son côté, le crématorium de Caen se défend : "Le cercueil était bien fermé à son arrivée. Le transporteur mandaté par l’opérateur funéraire l’a déposé directement sur le catafalque, sans aucune intervention de l’équipe du crématorium qui n’a donc pas manipulé le cercueil. Notre équipe n’a découvert la situation qu’au moment où l’opérateur a contacté l’établissement par téléphone, après le lancement de la cérémonie". Il se prévaut alors du "respect pour le temps de recueillement de la famille" pour expliquer le fait de ne pas avoir "interrompu la cérémonie en cours".
Immense perte de chiffre d'affaires et possibles licenciements
Pour la préfecture, la faute a donc été commise par les pompes funèbres. Évidemment, Le tourneur du Val conteste et agite les conséquences importantes que la fermeture de trois mois va engendrer pour la société. "On risque de perdre plus de 200 000 euros HT de recette et risque de devoir mettre fin à certains contrats de travail".
L'entreprise basée à Trouville-sur-Mer demande l'organisation en urgence d'une réunion avec la préfecture "dans l'intérêt de ses salariés et des familles se trouvant dans son périmètre d'activité". Son patron met en avant le fait que la société est "réputée pour son humanité, irréprochable depuis son début d'activité", qu'elle a "la confiance totale des familles de Trouville-sur-Mer et du Pays d'Auge".