Jugée en appel devant la cour d'assises d'Evreux pour le meurtre de son conjoint violent, cette mère de famille de la région de Dieppe a été condamnée le 23 octobre 2021 à la même peine qu'en première instance aux assises de Seine-Maritime en 2020.
Une peine de dix ans de réclusion criminelle a été prononcée samedi soir (23 octobre 2021) en appel aux assises de l'Eure à l'encontre d'Alexandra Richard, 43 ans, condamnée pour "meurtre sur conjoint" pour avoir tué son compagnon violent en 2016.
Cette mère de trois enfants avait été condamnée à la même peine en première instance en novembre 2020 à la cour d'assises de Seine-Maritime.
A Evreux, les jurés de la cour d'assises d'appel n'ont donc pas donc retenu la légitime défense. A l'énoncée du verdict, quelques pleurs dans les rangs de la famille d'Alexandra Richard ont été entendus dans la salle d'audience. En montant dans le fourgon de la pénitentiaire, Alexandra Richard a lancé à ses enfants "bisous je vous aime".
"Une erreur judiciaire absolue"
Un des deux conseils d'Alexandra Richard, Maître Lorraine Questiaux, a estimé que ce verdict était une "honte absolue" et une "erreur judiciaire absolue".
"Les débats ont montré qu'il n'y avait pas les moyens de la condamner pour homicide volontaire. Les circonstances de la légitime défense étaient établies", a-t-elle estimé.
"Tous les efforts des luttes féministes sont mises de côté. La parole de la victime est niée. Le système patriarcal est puissant", a ajouté Me Questiaux.
Des associations féministes soutiennent Alexandra Richard et deux pétitions avaient lancées avant ce procès en appel.
La thèse de la légitime défense non retenue
Le verdict est conforme aux réquisitions du ministère public qui avait écarté la légitime défense :
"Ca ne peut pas être des violences volontaires sans intention de la donner, c'est un meurtre. Elle a à l'évidence des circonstances atténuantes, c'est sûr. Mais on ne peut pas tuer dans ce contexte-là", a estimé samedi l'avocat général Patrice Lemonnier.
Alexandra Richard a tué avec un fusil de chasse son conjoint de 36 ans le 16 octobre 2016 à leur domicile de Montreuil-en-Caux (Seine-Maritime). Celui-ci, en état d'ébriété, venait de se lever de son fauteuil en la menaçant de lui "défoncer la gueule", a-t-elle expliqué.
Le jour du drame, son conjoint s'est mis à boire à midi et l'accusée lui a dit qu'elle allait le quitter, selon elle.
Au cours de son réquisitoire, l'avocat général a estimé que l'accusée avait "une difficulté avec la réalité".
"Alexandra Richard a développé des éléments d'agression, des menaces de mort qui ne sont pas vérifiables. Plus le temps passe, plus elle en rajoute", a dit Patrice Lemonnier. L'avocat général a reconnu que la victime, qui avait été condamnée en 1999 pour avoir tiré sur un rival amoureux, pouvait avoir des accès de violence.
Un des deux avocats de l'accusée, Me Quentin Dekimpe, avait plaidé pour la légitime défense :
"Si elle a saisi cette arme, c'était pour se défendre. Une défense légitime face à cet homme qui aurait pu la tuer", a-t-il dit.
"Les fluctuations des versions de Mme Richard ne sont pas en lien avec une manœuvre : c'est le fruit d'un trauma, de la peur, des carences dans le recueil de sa parole", a également déclaré Me Dekimpe lors de sa plaidoirie.
A l'issue de ce procès en appel, Alexandra Richard devra décider dans les cinq prochains jours s'il elle saisit la cour de cassation pour "un pourvoi" et un éventuel nouveau procès.