L'Hôpital de Cherbourg contraint de fermer des lits, pendant les fêtes, faute de personnel

Désorganisation au Smur, fermeture temporaire du service d'oncologie, service des urgences et de chirurgie en grève, les syndicats de l'hôpital de Cherbourg tirent la sonnette d'alarme, alors que la direction se veut confiante. Explications avec leurs différents points de vue.

Le SMUR confronté à une pénurie de médecins spécialisés

La semaine avait mal commencé pour le Service mobile d'urgence et de réanimation (SMUR) dans le Nord-Cotentin.

Habituellement, deux unités, l'une à Cherbourg, l'autre à Valognes sont opérationnelles. Sauf que lundi matin, une absence maladie chez l'un, un problème de coordination chez l'autre, bref aucun des deux n'a pu fonctionner jusqu'en début d'après-midi. 

"C'est très symptomatique de nos difficultés , explique Éric Labourdette, secrétaire Général National FAFPH . Vous imaginez, parfois, il n'y a qu'un SMUR. S'il part dans la Hague, comment on gère une urgence à Picauville ?" 

Côté direction : Bénédicte Gastebois, directrice de qualité et des ressources humaines, confie avoir beaucoup de mal à trouver des médecins Smuristes. 

"On fait appel à des agences d'intérims depuis une dizaine d'années. Pendant les fêtes et l'été, c'est très compliqué. La demande est plus importante que l'offre.

Quand nous avons qu'un seul Smur sur Cherbourg, le SAMU 50 déclenche soit le SMUR de Cherbourg, soit celui de Coutances."


 



En décembre, la direction comptabilise 7 fermetures du SMUR de Valognes (contre un jour et demi, en novembre).

"Nous avons eu trois départs non prévus cette année. Pour compenser, on a pu recruter quelques temps partiels, mais l'effectif reste insuffisant. Pourtant, on essaie d'être attractif.
 

On propose des contrats de cliniciens, mieux payés, pour capter les intérimaires.


Mais parfois, certains ne veulent pas rester car il y a trop d'activités à Cherbourg, et ça effraie les médecins spécialisés", explique la direction.

 

 

Pourquoi le service d'oncologie est-il temporairement fermé ?

Jusqu'au 5 janvier, le service d'oncologie est fermé, soit 14 lits. "C'est une décision prise en urgence lors du directoire de jeudi 19 décembre".

Cette fois-ci, c'est un problème d'effectif para-médical, qui est à l'origine de cette fermeture. "Il manquait 10 infirmières et aides-soignants. L'agence d'intérim n'a pas pu nous fournir de personnel. Ce n'était jamais arrivé.

On s'est donc résigné à fermer ponctuellement ce service, qui est le moins impacté en terme d'activité. On programme peu de chimio pendants les fêtes."


► Regarder le reportage de Stéphanie Potay
 


Les syndicats, eux, s'indignent : "Les infirmières d'oncologie viennent renforcer le plateau de chirurgie, alors qu'elles n'ont pas pratiqué dans ce service depuis des années. C'est n'importe quoi"
 

Éric Labourdette, secrétaire Général National FAFPH :
 

On flottait, mais aujourd'hui on coule. On est à l'os. On précarise les contractuels.  


Le contexte ? Le plan Copermo : Quésaco ?

En ligne de mire, Copermo, ce drôle de mot inquiète le personnel hospitalier. "C'est un redressement judiciaire si vous préférez. 190 postes vont être supprimés en 4 ans ", traduit le syndicaliste.

Cette nouvelle réorganisation vise un retour à l'équilibre pour l'hôpital de Cherbourg qui affiche près de 80 millions d'euros de déficit cumulé.

D'après ce plan, l'hôpital Pasteur doit augmenter ses recettes à hauteur de 60% et limiter ses dépenses à hauteur de 40%.

Bénédicte Gastebois, directrice qualité et des ressources humaines :

C'est exceptionnel. D'habitude, Copermo, c'est 50/50. Là, on nous a validé un plan qui vise davantage l'augmentation des recettes. Cela veut bien dire que nous avons de l'ambition pour cet hôpital


Si on rentre dans les détails, ces 40% d'économies vont concerner :

- des économies d'achats pour l'établissement
- des économies sur les effectifs à hauteur de 190 ETP (Equivalent Temps plein)

La direction explique : "Si nous règlons notre problème d'absentéisme, évalué à 8%, on peut déjà rendre 50 ETP. Ce n'est pas rien. Nous avons aussi fermé 22 lits, soit 35 postes".

 



Pour les 105 postes restants, une réorganisation est en cours dans les services (55 soignants sont concernés) mais aussi dans les bureaux administratifs et logistiques (50 postes).

"On s'est aperçu en comparant avec les autres hôpitaux que nous étions en sureffectif de 25% chez les administratifs, comme les sécrétaires médicales. Donc on se réorganise. On ne renouvelle pas certains contractuels"
 



Mais entre la théorie des chiffres et la réalité du terrain, ça coince parfois. Prenons l'exemple de la maternité. 10 lits ont été fermés car on recensait une baisse de 5% d'accouchements par an.

Sauf qu'en juillet, l'activité a explosé, toutes les femmes accouchaient au même moment et le personnel s'est vite retrouvé en grande difficulté.

C'est là, toute la subtilité. L'hôpital public en général et les services d'urgences en particulier ne se gèrent pas comme n'importe quelle administration, où règne l'anticipation.

Jeudi 26 décembre, la direction recensait 45 lits vides et assurait "on ne met pas la population en danger", mais les soignants, eux, se sentent à bout de souffle.

 


Tous ses dossiers, Smur, Copermo, dialogue social, personnel à cran, s'accumulent sur le bureau de la nouvelle directrice, Séverine Karrer, qui arrivera le 2 janvier.

Elle vient du CHU de Caen et devrait à priori ne pas manquer de défis à relever pour cette nouvelle année 2020, dans le Cotentin. 

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