Élément incontournable de noël, le sapin trône fièrement dans le salon de tous les foyers en fin d'année. Mais le roi des forêts est promis à un funeste destin quand vient le mois de janvier. Une alternative écologique existe depuis quelques années : la location de sapin.
"On est attaché au sapin de noël, c'est difficile de ne pas passer noël sans sapin. Mais après, prendre un sapin coupé qui va être jeté, c'est toujours un peu écœurant", confie Gaël, un père de famille. Chaque année en France, ce sont entre cinq et six millions de sapins qui sont vendus au mois de décembre. Et quasiment autant qui sont jetés aux premiers jours de l'année suivante. Une hécatombe qui passe de plus en plus mal chez nombre de Français sensibles au sort de la planète. Une alternative existe et se développe depuis quelques années en Normandie.
A Saint-Paterne-Le Chevain, près d'Alençon, Gaël est venu chercher son sapin, le même que l'an dernier. "L'année dernière, je suis allé le récupérer pour la première fois. C'est super de le retrouver. Mais je ne l'aurais pas reconnu si on ne me l'avait pas montré", s'amuse-t-il. Le maître des lieux, Ludovic Coulon, a mis son activité en pause ce premier vendredi de décembre pour accueillir ses clients. "Ça va être LE gros week-end." Car depuis cinq ans, ce paysagiste de métier propose de la location de sapins. Cette année, sur son terrain, près de 900 arbres en pot attendent de découvrir leur nouveau foyer.
Comptez entre 17 et 55 euros selon la taille du sapin. "La première année, les gens payent la valeur du sapin de façon à ce qu'ils en soient responsables. Si ils oublient de l'arroser, il va revenir sec", explique Ludovic Coulon, "On a fait des petites feuilles avec toutes les explications. Normalement, ça se passe bien." Car une fois les fêtes passées, les clients ramènent leur sapin au paysagiste, qui en assurera l'entretien tout au long de l'année. Moyennant dix euros, ils pourront récupérer leur arbre au noël suivant. "On garde son sapin plusieurs années. À un moment donné, il va être trop grand, donc on fait un échange : les gens ne repayent pas un autre sapin. Nous, on a de la demande dans les mairies, il nous faut des arbres de 3-4 mètres."
Un bon geste à travers un sapin
900 arbres cette année, contre 400 l'an dernier. L'activité lancée cinq ans plus tôt par Ludovic, en parallèle de son métier de paysagistes, rencontre un certain succès. "J'en aurais eu 400 ou 500 de plus, ils auraient trouvé preneurs, Il faut que refasse un peu de travaux pour en stocker beaucoup plus l'année prochaine." En ce mois de décembre, les anciens clients sont au rendez-vous, tout comme les nouveaux. "Il a deux têtes, c'est la classe, il n'y en a pas beaucoup comme celui-là, il est unique !", se réjouissent Malorie et Lucie devant leur acquisition. Les deux sœurs se sont converties à la location "surtout pour le côté écologique". L'aînée explique : "il faut faire attention à ce qu'on fait et puis c'est bon pour la planète. Pourquoi ne pas faire un bon geste juste à travers un sapin." Ludovic Coulon confirme : "Quand vous achetez un sapin coupé, il faut savoir que derrière, il y a dix ans de culture. Là, vous pouvez encore garder le même sapin pendant dix ans. Vous sauvez dix sapins de la poubelle."
Dans l'Eure, Mathieu Lasne, paysagiste à Amfreville-St-Amand, se désolait "du gaspillage de voir un sapin être utilisé seulement un mois et finir ensuite dans un broyeur ou incinéré comme un déchet." Il s'est, lui aussi, lancé dans la location il y a un an. "On amène le sapin directement chez le particulier, en collectivité ou en entreprise début décembre. Le client va le garder sur un mois complet. On vient le rechercher début janvier." Comptez 60 euros pour un sapin d'1 m 50 à 2 mètres. "Si on prend le coût du carburant, le transport, la main d'œuvre et le prix du sapin, on est moins cher qu'un sapin classique", assure le paysagiste qui a opté pour de l'épicéa plutôt que pour le très en vogue Nordmann. "L'épicéa reprend beaucoup mieux en pot. Un Nordmann, c'est un pivot. L'épicéa, ce sont des racines en périphérie."
Patricia Peley a fait la connaissance du paysagiste l'automne dernier lors des automnales du château d'Harcourt. Elle a immédiatement été séduite par le concept. "Je me posais la question depuis plusieurs années, la proposition me semblait très ingénieuse et très écologique", indique cette chef d'entreprise qui a décidé de louer un sapin cette année pour son domicile ainsi que pour sa société, "Moi, j'adore les arbres, je déteste quand on les coupe. C'est une horreur pour moi." L'écologie, c'est l'argument numéro un des clients de Mathieu Lasne. "On n'a pas envie de faire mourir les sapins, on en a marre de la consommation des arbres qui poussent avec plein de pesticides, qui sont coupés et après sont jetés", fustige Guilhem Vivier, "à la base, on était parti sur un sapin en plastique : on le range pendant l'année et on le sort que pour noël." Le trentenaire a finalement trouvé dans la location une solution en accord avec ses convictions. "C'est mieux qu'un sapin en plastique, il y a toujours une odeur, il y a le côté vivant et puis c'est joli un sapin."