Des litres de colorants rouge et vert fluo déversés en Seine-Maritime : pour quoi faire ?

Une opération de traçage a débuté ce lundi 23 octobre à Autretot (Seine-Maritime), près d'Yvetot. Pour comprendre le cheminement de l’eau, du ciel aux rivières, des colorants sont injectés dans une "bétoire". Un point d’engouffrement des eaux pluviales naturel, et typique de la région.

Des litres de liquide rouge sang déversés dans la nature. Pas d’histoire de meurtre sordide, ni de scandale de pollution industrielle : ce lundi 23 octobre, ce sont des colorants sans danger pour l’homme ou pour l’environnement qui coulent dans le paysage cauchois à Autretot (Seine-Maritime), et qui devraient réapparaître dans les prochaines heures dans les rivières.

Au contraire, c’est bien pour mieux connaitre la nature que cette "rhodamine" a été déversée. Dans le cadre d’un projet de forage, le syndicat mixte du Caux-central a mandaté la société IDDEA pour effectuer cette opération de traçage. Le colorant faisant office de traceur.

"L’objectif c’est de trouver et de comprendre le cheminement de l’eau", explique Ludovic Turban, responsable du traçage. Trois traceurs (rouge, vert fluo et incolore) sont injectés à trois endroits différents. Ils apporteront des informations sur la vitesse d’écoulement et la destination de ce cheminement. Le point de départ du voyage de ce colorant étant un point d’engouffrement pas comme les autres : une bétoire.

Plus de 9 400 bétoires en ex Haute-Normandie

C’est une spécificité locale liée au sous-sol crayeux de l’ex Haute-Normandie. "En traversant le sol, l’eau de pluie acquiert une certaine acidité qui lui permet de dissoudre la craie" souligne la Chambre d’Agriculture de Seine-Maritime. "Au fil des années, des vides se forment en profondeur, qui atteignent parfois la surface", formant ainsi ces fameuses bétoires.

Si les bétoires ne sont pas toutes connues, on en compte au moins 9 400 sur le territoire. Des recensements cartographiés existent, réalisés par la DDTM 76 (Direction Départementale des Territoires et de la Mer) ou encore par le SIGES Seine Normandie (Système d'Information pour la Gestion des Eaux Souterraines).

Il ne faut pas confondre "bétoire" et "marnière". La différence ? Les marnières sont des cavités souterraines creusées par l’homme pour en extraire la craie. Les bétoires sont, au contraire, des éléments naturels.

Un risque de pollution des eaux

Lorsqu’il pleut, soit l’eau des précipitations s’infiltre lentement à travers les différentes couches du sol (à une vitesse d’environ 1 mètre par an), soit elle ruisselle, et s’infiltre par les bétoires. Cette fois, ça va beaucoup plus vite : 100 mètres par heure.

Cela conduit à un risque de pollution des eaux. Car avant de s’infiltrer aussi rapidement vers les réservoirs souterrains, l’eau se charge en particules de terre et en produits phytosanitaires pendant son ruissellement.

Selon Géraldine Lemaistre, directrice du syndicat mixte du Caux-central, "les molécules polluantes peuvent arriver en 18 à 24 heures" à la ressource. Il faut donc moins d’une journée pour qu’une goutte de pluie atteigne un cours d’eau ou un captage ! "Quand on identifie les points d’infiltration rapide comme cette bétoire, ça permet en cas de difficulté de savoir qu’il faut réagir vite sur la ressource pour pas laisser l’eau rentrer sur notre réseau d’eau potable."

Cela vaut pour les pesticides mais pas seulement. Cette bétoire est positionnée entre une route départementale et une autoroute. Un accident impliquant un camion qui transporte des matières dangereuses pourrait contaminer les captages d’eau potable.

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